Solitude

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Cela faisait des heures qu'ils avançaient dans la neige, seul leur souffle rythmait leur progression laborieuse. À chacune de leur expiration, une épaisse vapeur s'échappait de leur bouche. Enfin, au détour d'un chemin, ils aperçurent les grandes colonnes dorées apparaître au loin. Le cœur du dieu du tonnerre s'arrêta de battre l'instant d'une seconde. Il allait rentrer chez lui, retrouver ses repères, sa maison et pourtant une once d'amertume le dévorait. Il avait peur de ne pas reconnaître la cité, peur que son frère l'ait transformée en temple du chaos. Thor le connaissait assez bien pour savoir que le désordre était un de ses penchants naturels. Alors le crime et l'horreur auraient été les seuls maîtres des lieux.

Dissimulés sous des capes, les deux guerriers marchaient sur la cité qui se réveillait doucement. Il était encore tôt et le temps n'était pas vraiment propice à la promenade. Peu de monde avait osé mettre le nez dehors par cette fraîche journée . Deux Einherjar peu soupçonneux gardaient les portes de la cité quand ils les franchirent.

« Et ils ne viennent même pas nous demander ce que l'on fait là ! Quelle bande d'incapables ! bougonna Thor furieux de voir la cité sans défense.

— Chut ! N'attire pas l'attention on réglera ça plus tard, chuchota Sif. »

Les rues étaient quasiment désertes. Tout était si paisible. Ce n'était pas vraiment le tableau auquel le dieu du tonnerre s'attendait et au fond de lui cela le rassurait.

Les deux guerriers s'arrêtèrent dans une auberge. Ils devaient toujours trouver un moyen pour entrer dans le palais sans éveiller les soupçons et sans alerter la sentinelle royale alors ils ne trouvèrent rien de mieux que d'écouter les ragots des piliers de comptoir bien matinaux. Après tout ils ne pouvaient pas prévoir comment l'armée réagirait si Thor se présentait aux portes du palais. Se rallierait-elle au dieu du tonnerre, l'héritier légitime, ou bien resterait-elle fidèle à Loki ? Ils ne voulaient pas risquer de déclencher une guerre civile ou un soulèvement de l'armée contre l'un ou l'autre frère. Le mieux était d'attendre et de réfléchir à la situation avant d'agir. Pourtant Thor voulait à tout prix entrer dans le palais et parler à son frère pour tenter de le raisonner avant de prendre des risques inconsidérés.

Ils entrèrent dans l'établissement en saluant silencieusement les trois hommes qui étaient accoudés au comptoir et qui se turent en les voyant. Puis, et comme si de rien n'était, les trois hommes reprirent leur conversation pendant que le dieu du tonnerre commanda deux cornes d'hydromel frais avant d'aller s'asseoir à l'autre bout de la pièce.

Assis à l'une des tables, un vieil homme seul à la barbe hirsute baragouinait quelque chose. Thor et Sif restèrent là, assis en silence, buvant leurs cornes tranquillement en attendant que l'endroit fût plus animé. Puis, un vieil homme vêtu d'une grande fourrure de loup entra et rejoignit les trois hommes au comptoir.

« Bonjour Messieurs, fit-il en les saluant. Oh, par les dieux, quel temps ! Et dire qu'on est en plein été. Vraiment il se passe des choses étranges. »

Les trois autres compères acquiescèrent en rigolant.

« Et pourtant il n'y a pas de quoi rire ! s'insurgea tout haut le vieil homme qui parlait seul. »

Face aux rires des hommes du comptoir, il se leva précipitamment en se dirigeant vers eux d'un air menaçant.

« Ne savez-vous pas ce que cela signifie ? Le Fimbulvinter est là, le terrible hiver avant le Ragnarök. La fin est proche ! souffla-t-il les yeux hagards.

Le Crépuscule d'Asgard (Loki - Tome I)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant