Chapitre 1

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Tout d'abord, le bruit du vent dans les arbres. Les branches qui s'entrechoquent doucement. Puis la danse silencieuse des feuilles, véritable jeu d'ombres derrière les paupières closes. Et enfin le chatouillis de l'herbe sur le visage, les insectes qui courent sur la peau nue. Les yeux fermés, Andora sourit. Allongée sur le sol meuble, elle profitait de l'instant. Ses longs cheveux bruns se mélangeaient avec les brindilles et les pétales de fleurs que le vent avait arrachés. Elle inspira profondément, savourant l'odeur chargée de la terre humide et celle, plus corsée, de la mousse sur les arbres.

Au loin, une cloche sonna. Un sourire étira les lèvres de l'enfant. Ca y est ! Elle était en retard ! Loin de s'alarmer de cette nouvelle, elle se redressa sur ses coudes et contempla d'un air moqueur la foule qui se pressait vers la ville. Marchands ambulants, troubadours et badauds se bousculaient pour entrer les premiers, quitte à se marcher dessus. Elle ricana. Cette année, ils se passeraient d'elle. Elle avait prévu son coup bien en avance, et avait filé dès les premières lueurs de l'aube, faisant sauter ses leçons au temple par la même occasion. Sortir de l'enceinte fortifiée d'Arradon avait été un jeu d'enfant et elle avait passé le reste de la matinée à jouer dans les bois. Mais c'était maintenant que le véritable objectif de son plan apparaissait. C'était maintenant qu'il fallait absolument rester cachée.

Avec précautions, Andora se leva et épousseta sa robe. Elle avait prévu de se rendre plus profondément dans les bois, ayant repéré tantôt un vieux chêne dont le tronc noueux lui servirait d'abris. Après un dernier regard vers la marée humaine, elle se détourna sans regret et s'avança vers la forêt. Du moins essaya.

- Hééé!

Soulevée du sol, Andora tenta vainement de se soustraire à l'étreinte de son ravisseur. Peine perdue.

- Ca fait des heures que je te cherche !

- Normal, ça fait des heures que je me cache !

Un soupir accueillit sa remarque et l'enfant sentit qu'on accélérait l'allure. Elle vit à regret l'ombre rassurante des bois disparaître progressivement. Elle fit la moue. Cette fois-ci, elle n'était vraiment pas passée loin.

- Tu peux me poser tu sais ? se risqua-t-elle à proposer.

- Pour que tu files ensuite ? Jamais ! Quand je pense à tout ce qu'il nous reste à faire ! Déjà qu'on avait du travail par dessus la tête !

- Désolée Miranda...

Andora sentit le regard de sa sœur peser sur ses épaules. Elle fit celle qui n'avait rien vu et attendit que la tempête passe. La technique se révéla payante car au bout de quelques secondes, le pas de Miranda se fit plus lent et Andora toucha de nouveau le sol. Dès qu'elle le put, elle sauta sur ses jambes et étira ses muscles ankylosés. A ses côtés, une main sur les hanches, sa sœur reprenait son souffle.

- Le pire, c'est que je n'arrive même pas à te faire culpabiliser, haleta celle-ci.

- Mais j'ai dit que j'étais désolée !

- Pour que ça marche, il faut le penser !

Andora se rembrunit.

- Je déteste quand tu fais ça, maugréa-t-elle.

- Quand je fais quoi ?

L'enfant éluda la question d'un geste de la main. Miranda soupira.

- Et moi je déteste quand tu refuses de t'expliquer ! Bon, on verra ça plus tard ! Maman nous attend !

Sans attendre de réponse, elle saisit la main d'Andora et l'entraîna de force vers la ville. Gonflant les joues, l'enfant se laissa traîner par son aînée, bien décidée à résister jusqu'au bout. Mais déjà les remparts d'Arradon apparaissaient.

AndoraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant