Chapitre 10

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-Avant que je te raconte tout, j'aimerais juste que tu saches que c'est mon passé. Et que je ne referai plus jamais tout ça. Et même si j'ai confiance en toi, je voudrais que tu me promettes de rester avec moi.

-Je te le promets, Harry. A jamais, tu te souviens ?

Un léger sourire vint illuminer le visage d'Harry. Bien sûr qu'il s'en souvenait. Il avait l'habitude de lui répéter ces deux mots sans arrêt, pour l'assurer de son amitié.

-A jamais.

Harry prit une dernière respiration avant de se lancer. Peut-être que ce n'était pas si grave au final, peut-être qu'il se faisait des films quant à la gravité de ses actes. Peut-être qu'il ne devait pas tant s'inquiéter, peut-être qu'Emma trouverait ridicule la manière dont il avait eu peu de tout lui révéler. Mais au final, lui savait que ses actes n'étaient pas si bons que ça, et qu'il méritait tout ce qui lui était arrivé. Pire, il avait l'impression de ne pas avoir assez payé pour sa faute.

-Je ne sais pas vraiment par où commencer. Par le début, je sais, mais je dois encore le trouver ce début... Ça a commencé quand j'étais plus jeune, au début de mon adolescence. J'étais un rebelle, je ne respectais rien, aucune règle. Je ne sais pas pourquoi j'étais comme ça, mais je ne pouvais pas m'en empêcher. Je n'étais pas le mec qui frappe les autres, le mec qui menace pour de l'argent, le mec qui défonçais tout et n'importe quoi. Non, j'étais celui qui répondait aux profs, qui essayait de voler, qui passait par-dessus les interdits. J'étais contre toute forme de violence. Et pourtant, je le suis devenu. Je m'étais toujours promis de ne pas utiliser mes poings, mais il y a eu cette soirée. Je revenais des cours, tranquillement. Je crois que j'avais douze ans, quelque chose comme ça. Je venais de me faire coller et ramenais de mauvaises notes, rien d'inhabituel pour moi en fait. D'ordinaire, je traînais dehors avec mes potes et faisait les quatre-cents coups. Cette fois-ci, je ne me souviens plus exactement pourquoi, mais j'ai décidé de rentrer plus tôt chez moi. J'ai entendu des cris de femme. Ma rue était plutôt calme alors ça m'a étonné. Mais ce qui m'a le plus étonné, c'est que les cris venaient de chez moi. Je n'y croyais pas, je ne voyais pas ce que ça pouvait être. J'étais paumé avec mes pensées, je ne comprenais pas. Il n'y avait pas de doute possible, ça ne venait pas de chez un des voisins, mais bien de ma maison. Malgré le côté fort que je me donnais, j'ai eu peur. J'ai pensé que des voleurs étaient rentrés pendant que ma mère faisait sa sieste ou que ma grand-mère avait eu un problème quand elle était venue comme tous les jours à la maison. J'ai pensé à appeler mon père, ou à hurler dans la maison pour faire partir les éventuels intrus. Je n'ai pas osé. J'aurais peut-être dû le faire, au final. En tout cas, je suis rentré à pas de loup dans la maison. Sans bruit, je suis monté à l'étage, là d'où provenaient les cris. J'ai aperçu quelques morceaux de verre pare-terre, et du liquide. Je n'ai pas réfléchis, j'ai pensé que c'était les fenêtres qui avaient été brisées. J'ai suivi tous les morceaux de verre qui m'ont conduit directement devant la chambre de mes parents. C'est à ce moment-là que je suis devenu une brute.

Je suis d'abord resté sur place, ne sachant pas quoi faire et extrêmement choqué. Ma mère était contre le mur, elle se tenait de toutes ses forces, mais elle en avait perdu beaucoup. Elle pleurait et criait. Mon père était en face d'elle, les mains pleines de sang. Puis il lui a donné un coup dans les côtes. Pas un petit, mais un violent comme pas possible. Du sang est sorti de la bouche de ma mère, qui pleurait de plus en plus. Il lui a redonné un coup, elle s'est effondrée au sol. C'est quand elle a manqué de s'évanouir que j'ai enfin pu réagir. J'ai attrapé mon père de toutes mes forces et l'ai tiré en arrière. Je lui ai donné un poing, un bon. Il était soûl, et il s'est écroulé par terre. Je suis allé chez ma mère, blessée comme jamais. Elle avait du sang qui coulait de partout, des hématomes déjà visibles et un teint blanc. Cette vision m'a traumatisé à vie. J'ai mis ma mère sur le lit et l'ai soignée du mieux que je pouvais. Je ne voulais pas appeler une ambulance, j'avais honte. Honte de mon père d'avoir été comme ça envers elle, honte d'être son fils, honte de ne pas avoir réagi avant, honte de ne pas avoir vu ma mère se faire battre avant, honte de n'avoir rien pu faire. Ma mère m'a souvent dit que je n'y étais pour rien, je me sentais coupable. Je n'avais pas envie d'avoir à expliquer aux ambulanciers que j'avais été présent. Mais aussi, je n'avais pas envie de montrer que mon père était un alcoolique violent, qui battait sa femme. Je ne voulais pas que les gens le voient comme ça, parce qu'après tout, il avait toujours été le seul référent masculin que j'avais. Nous jouions au foot ensemble, parlions filles et drague, je me confiais à lui et lui faisait de même. C'était mon modèle, un peu mon héros. Il avait perdu toute forme de fierté que j'avais de l'avoir pour père, mais je voyais les pères de mes amis, tous des avocats, des architectes, des médecins et autres distingués. Ils emmenaient leur famille dans des parcs d'attractions le week-end et leur payaient des glaces. Ils ramenaient des fleurs à leur femme pour leur faire plaisir et achetait des magazines à mes amis. Je ne voulais pas que les autres voient mon père tel qu'il était vraiment. Ce n'était plus mon père, mais ça ne regardait pas les autres.

Le temps d'une danse II H.S.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant