• Chapitre 3 •

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Naomi

Une épaisse et lourde fatigue s'abat sur moi.
Je secoue la tête plusieurs fois avant de me diriger vers le distributeur. Dans ce genre de moment, le café est mon meilleur allié.
— Jeff, je vais me prendre un café. Tu veux bien m'attendre en bas ?
— Okay, fais vite. J'ai la dalle.
Il fonce vers les ascenseurs sans attendre ma réponse. La nourriture et Jeff c'est tout une histoire d'amour et cet abruti ne prend pas un gramme. Salaud. Je contemple le liquide sombre remplir peu à peu le gobelet et souffle.
Au moment où mon esprit décide de vagabonder loin de mon corps, je repense à Adan Brown. Pourquoi accapare-t-il mes pensées ? Je ferme les yeux et tente d'oublier ce type. Je n'ai pas de regret, il m'a mal parlé et il méritait mon insulte.
Enfin, c'est ce dont j'essaye de me persuader...
Avec mon esprit divaguant, je n'ai pas remarqué la hauteur du café dans ce mince gobelet. Je le prends du bout des doigts, manquant de le laisser tomber tant la chaleur est intense. C'est une très mauvaise idée de prendre un café brûlant, trop épais pour ce minuscule bout de carton. Mais, je refuse d'attendre qu'il se refroidisse. Il faut que je quitte cette salle au plus vite, elle est bien trop étouffante.
Un pied à peine à l'extérieur de la pièce qu'une voix tonne dans mon dos.
— Mademoiselle Anderson !
Ce qui devait arriver, arriva. Merde, fait chier...
J'émets un bon et renverse quelques gouttes de café sur mon décolleté. Je grimace de douleur en sentant ma peau rougir suite à la chaleur qui coule le long de mon joli chemisier crème. Digne d'une scène au cinéma...Pourquoi faut-il que ça arrive à moi...
Je pose le carton sur l'un des meubles collé au mur et me tourne vers l'auteur de ce désastre. Comme je m'y attendais, monsieur Brown se tient là, un sourire carnassier plaqué sur les lèvres. 
— Toujours aussi peu concentrée à ce que je vois. 
Une flamme s'allume dans ma poitrine, rien de très positif malheureusement. Je contrôle ma respiration et m'adresse à lui, d'une hypocrisie mal camouflée.
— Monsieur, y a-t-il un problème ?
— Eh bien, commence-t-il, le problème mademoiselle. C'est la façon dont vous vous êtes exprimée ce matin, en ma présence. 
— Je ne savais pas qui vous étiez. dis-je d'un ton plus cassant que je ne l'aurais voulu.
— Mais désormais vous le savez, non ? Alors pourquoi votre ton trahit-il vos paroles ?
— Mon ton est tout à fait adapté pour vous.
— Adapté pour "moi" ? Il sourit, mauvaisement.
J'opine de la tête et serre rageusement les poings. Il est vraiment désagréable mais, diablement séduisant. Plusieurs chaleurs se battent en duel dans ma poitrine.
— Pour une femme qui travaille dans la communication, je vous trouve très impolie. Avez-vous ne serait-ce qu'une petite idée de ce que je suis capable de faire ?
— C'est une menace ? 
— Non, juste un petit rappel.
Je ne sais plus quoi dire. Il réplique sans cesse, me coupant la possibilité de riposter.
— Très bien. Au revoir, monsieur Brown.
Je lui tourne le dos et pénètre dans l'ascenseur toujours tendue comme un arc.
— Au contraire. Je dirais à bientôt.
— Je doute que l'on se croise à nouveau.
Et je l'espère.
— Eh bien, je prie pour cela arrive alors.
Quoi ? Les portes se referment au moment où je croise son regard polaire.
Il prie pour que cela arrive ? Est-ce que c'est une plaisanterie. Pour commencer, il profite de sa place pour me faire taire et il se fiche de moi par dessus le marché. Je fuis l'ascenseur et accours vers mon ami d'un pas d'ogresse.
— Je vais et je veux changer de boîte ! Je fulmine, ce patron n'est qu'un sale crétin...mal fini, arrogant, prétentieux avec bien plus de défauts qu'un humain peut avoir en sa possession ! me plains-je auprès de Jeff qui me dévisage, surpris.
— Euh...Naomi, je te présente Flora.
— Enchantée.
Mes yeux rencontrent ceux d'une jeune femme avec un sourire rieur aux lèvres, je me renfrogne instantanément.
— Enchantée...dis-je d'une voix à peine audible, elle me tend sa main que je viens prendre, embarrassée. Excuse-moi Flora, je n'ai pas fait attention.
— Ce n'est rien. me rassure-t-elle.
— Flora, ça te dirait de venir manger avec nous au Belsray ?
Demande Jeff.
— Désolée mais, je dois manger avec mon frère.
— Tu as un frère ici ? Comment il s'appelle, peut-être qu'on le connaît ?
— Il s'appelle, Adan.
J'écarquille les yeux malgré moi et manque de m'étrangler avec ma salive. Adan ? Comme Adan Brown, l'homme que je viens d'insulter de tous les noms...Un trou, vite un trou pour que je puisse m'y enterrer vivante.
— Ah...Eh bien, on va te laisser. Il ne faudrait pas le faire attendre, n'est ce pas ?
— Oui, il peut être très colérique lorsqu'il s'agit de nourriture. rigole-t-elle, j'ai été ravie de vous rencontrer.
Elle nous offre un dernier sourire avant de se diriger vers les ascenseur, perchée sur ses hauts talons. Dès que les portes se referment, Jeff pouffe de rire. Je lui fiche un coup dans le bras et soupire.
— Arrête un peu tu veux.
— T'as fait fort là ! se moque-t-il en se tenant le ventre. Sérieusement...?

Après notre repas au restaurant, nous reprenons le chemin de la Brown'sEntreprise. Je n'ai pas eu le courage d'avouer à Jeff toutes les choses qui m'ont troublée ce matin avec Brown. Malgré le fait qu'il soit vraiment insupportable, je ne parviens pas à le chasser de mes pensées.
J'ai rarement vu quelqu'un d'aussi hypnotisant et mystérieux, ma curiosité semble se décupler de tous ses sens. J'ouvre une page internet et tape vivement sur le clavier "Adan Brown".
Des centaines de liens s'affichent "Adan Brown, l'iceberg de la famille Brown." Je jette un coup d'œil autour de moi et appuie sur ce premier lien. Des photos s'ouvrent en grand. 
Une d'elles a été prise dans un angle en biais, on peut observer plusieurs personnes devant un cercueil en bois clair qui s'engouffre peu à peu dans la terre. Sur la deuxième photo, je reconnais le visage de Gale Brown, ses mains entourent les épaules d'un petit garçon au regard vide, pas une larme ne coule sur son beau visage.
Un frisson me transperce la peau, je passe ces terribles photographies avec dégoût, comment peut-on faire cela ? Comment peut-on empiéter si brutalement sur la vie personnelle de quelqu'un...?
Lorsque les images disparaissent enfin, d'autres s'affichent. Son visage n'a pas vraiment changé. Ses traits sont insipides, pas de sourire, pas de joie, rien. 
Mes mouvements ne s'arrêtent plus, je lis plusieurs articles sur lui, tous plus sensationnels les uns que les autres.
La violence, la haine, la tristesse font partie de lui, c'est dotant plus troublant. Je ferme brusquement les pages et m'étale sur le bureau.
Pourquoi éveilles-tu autant ma curiosité ?

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Haut Niveau - Tome 1 -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant