Pdv Tyler
J'avais passé une excellente soirée avec Emma. Sans prise de tête, juste des rires, des blagues et des conversations n'ayant pas grand sens la plus part du temps. C'était rare que je passe des soirées comme ça, puisque habituellement mes soirées alliaient musique, alcool et fumeurs.
C'était tout sourire que j'étais rentré dans ma maison, pensant que rien ne pourrais m'enlever cet air joyeux. Mais en voyant la mine triste de mon père, je compris que je ne garderais pas longtemps le sourire que j'affichais. Mon père n'avait pas eu besoin de me dire un mot puisque j'avais direct compris que c'était à propos de ma mère. Depuis l'appel du médecin, l'état de ma mère s'était vraiment dégradé. Elle était maigre, son visage était creusé, son corps peinait à bouger et même sourire paraissait insurmontable pour elle. Quand j'avais été là voir à l'hôpital quelques jours auparavant, j'avais été frappé par son regard à la fois doux et épuisé, lorsque j'étais entré dans sa chambre. Ses yeux perçants imploraient de l'aide et personne n'était capable d'y remédier. En attendant nous attendions tous qu'il se passe quelque chose, pour ma part j'espérais qu'un miracle se produise et que le traitement fasse soudainement effet. Mais c'était un rêve trop ambitieux et au final l'espoir se résumait à remplir son cœur de fausses promesses.
Je pris alors brièvement mon père dans les bras et deux minutes plus tard je démarrais en trombe pour rejoindre l'hôpital. En arrivant, je couru dans les couloirs en direction de la chambre de ma mère, bousculant sur mon passage quelques infirmiers qui se trouvaient là. Mais une fois devant la porte de la chambre, je me stoppais net. J'avais peur de voir dans quel état j'allais découvrir ma mère par rapport à la dernière fois. Son état s'était tellement dégradé depuis que son cancer avait été diagnostiqué, tout était allé trop vite sans que personne ne puisse être préparé à ce qui arrivait.
Je pris alors une grande inspiration et appuyais sur la poignée pour ouvrir la porte. Mon geste se fit doucement et la porte s'ouvrit alors sans un bruit. En entrant, je vis ma mère les yeux fermés et branchée à tout un tas de machines comme la fois précédente. Calmement je m'approchais d'elle pour ne pas la réveiller. Son visage si doux et souriant autrefois, était marqué par la douleur même en dormant. Ses yeux fermés bougeaient et se fronçaient en signe de douleur et sa bouche se serrait. Délicatement, je saisis sa main gauche et commençais à y effectuer des petites caresses. Je savais que ce n'était pas grand chose et que ça ne ferait pas partir la douleur mais cela semblait l'apaiser, puisque sa bouche se décontracta petit à petit. Mes doigts glissaient sur sa main frêle et amaigrie et ce geste me détendait moi aussi. Petit, ma mère me faisait la même chose lorsque j'avais du mal à trouver le sommeil et cela me rassurait beaucoup. J'espérais que ma mère ressente la même chose, je voulais qu'elle sache qu'elle n'était plus seule.
Plusieurs fois, des infirmières étaient venues me voir me disant que je ne pouvais pas rester ici avec elle. Mais toutes avaient très vite abandonné de me faire partir en voyant mon air plein de determination et de tristesse. J'avais donc passé une bonne partie de la nuit assis sur une chaise à côté de ma mère en espérant qu'elle ouvre les yeux. Durant ce temps, plusieurs pensées me venaient en tête mais toutes tournaient autour de la mort. Mes questions restaient sans réponses, puis d'autres questions venaient chasser les précédentes. Au fond je n'avais pas peur de la mort, mais j'avais peur de ce qui venait après. Je ne comprenais pas comment c'était possible de continuer sa vie, en sachant qu'une personne venait de nous quitter.
Au bout d'un moment, ces questions s'arrêtèrent de tourner dans ma tête et elles laissèrent place à d'autres pensées. Automatiquement, le visage d'Emma m'apparu et je me mis à parler d'elle à voix haute. A vrai dire, je parlais d'elle à ma mère comme dans une vraie conversation. La seule différence était que j'étais seul à faire la conversation, puisqu'aucune réponse apparaissait. J'entendais juste son souffle à la fois fort mais lent, quand je stoppais mon dialogue. Je ne savais pas pourquoi je parlais d'Emma à ma mère, peut-être parce que je pouvais parler sans être jugé par un regard ou bien parce que parler d'Emma me faisait plaisir. Difficile de savoir quelle option était la bonne mais je continuais de raconter notre soirée et les différents moments passés avec elle, bien qu'ils étaient courts et peu nombreux.
Mon récit se stoppa cinq minutes plus tard, lorsque je sentis les doigts fins de ma mère serrer légèrement ma main. Lorsque mes yeux croisèrent les siens, il me fallut du courage pour retenir un sanglot. Je voyais à son regard que c'était le dernier moment que j'allais passer avec elle et mon cœur se serra davantage en pensant à ça. En voyant que je me retenais, elle esquissa un petit sourire du mieux qu'elle pouvait comme pour vouloir me rassurer. Et puis d'une voix à peine audible, elle me chuchota « Emma doit être une bonne personne ». A ce moment là, les sanglots que j'avais réussis à retenir eurent plus de force que je n'en avais et une larme coula le long de ma joue. Entendre cette phrase me fit penser que jamais Emma ne rencontrerait ma mère, alors que c'était deux femmes totalement identiques. Je compris alors qu'Emma n'était plus un simple défi, sans le vouloir elle était devenue importante même en lui parlant peu. Avec elle j'avais l'impression d'être moi même, sans être obligé de me cacher derrière un masque.-Elle te ressemble répondis-je doucement
Après cette phrase, les yeux de ma mère se fermèrent faiblement et sa respiration s'intensifia. Incapable de bouger, je restais à côté d'elle en la regardant. Sa main était toujours dans la mienne et je ne voulais pas défaire ce contact.
Il était impossible de savoir quand son cœur cesserait de battre, cela pouvait être maintenant ou demain. Mais ce qui était sûr c'est qu'elle ne passerait pas une nouvelle nuit. Elle s'était battue contre ce cancer, mais malgré la force qu'elle y avait mise elle avait perdu ce combat. Et maintenant il était temps pour elle qu'elle arrête de souffrir. Même si je n'étais pas prêt à la voir partir et à devoir vivre sans elle, une partie de moi savait que c'était la meilleure option pour elle et c'était d'ailleurs la seule.
Mon père arriva peu de temps après que ma mère se soit rendormie. Il lui avait fallut du temps pour souffler et accepter ce qui arrivait. Sans dire un mot, il était venu se placer à côté de moi et il avait posé sa main gauche sur ma cuisse, en signe de soutien. C'était aussi dur pour lui que pour moi, lui perdait sa femme et moi je perdais ma mère. Elle représentait un pilier dans la vie de chacun. Mais désormais nous ne serions que tous les deux et nous allions devoir nous aider.J'en veux au monde et à la tumeur qui l'a mise à terre.
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On se ressemble sans le vouloir
Romance« Tu fais croire à tout le monde que tu es une fille sage et qui ne fais jamais de conneries. Mais moi je pense que tu n'es pas comme ça Emma, tu n'es pas la fille que tout le monde pense connaître car tu es beaucoup plus. Au fond, on se ressemble s...