RÈGLE N°5

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NE PAS SE PROMENER DEHORS TOUT SEUL


— En plein dans le mille ! s'exclama le vieux, toujours en position de tir derrière lui.

Le couteau toujours en travers de son crâne, Willy pivota vers le taré. Il n'avait pas fait un quart de tour que son corps tomba dans les escaliers comme une poupée désarticulée.

Pom. Pom. Pom.

Sa tête atterrit aux pieds du vieux qui la dégagea de son chemin d'un puissant coup de pieds. Le crâne de Willy sembla se fracasser contre le mur, et j'en eus un haut-le-cœur. Du sang dégoulinait de partout. Ça empestait une odeur de métal très forte et écœurante.

Mes yeux se fixèrent sur le corps mort de Willy pendant un moment interminable, jusqu'à ce que le vieux se remette à bouger. Son bras bougea, pour être exact. Très lentement, comme si j'étais un petit animal qu'il ne voudrait pas effrayer, il se baissa au-dessus du cadavre de Willy et retira son couteau.

Andy ? Ça serait pas le bon moment pour dégager ?

En me rendant mon regard fixe, il se mit à essuyer la lame sur sa chemise à carreaux.

La Terre pour Andrew ! Ça sent pas bon du tout là.

Le vieux tendit alors le bras derrière sa tête aussi loin qu'il le put, comme s'il jouait aux fléchettes.

Cours bon Dieu de merde !!

Cette fois-ci, le message était passé cinq sur cinq. Mort imminente en vue, on s'arrache.

En manquant de trébucher, je fis volte-face et m'engouffrai dans le couloir à toute allure. Derrière ma tête, j'entendis le couteau se ficher en plein dans la porte d'une des chambres. C'était moins une. Maintenant, il fallait que je reste hors de portée du Maître des couteaux si je ne voulais pas finir embroché.

Oui sauf que... et bah mon cerveau refusait encore de connecter tous mes neurones entre eux, si bien que je ressemblais à un alcoolique en train de tenter un marathon. En clair, je me cognais contre tous les murs toutes les deux secondes. Pratique pour éviter - sans le faire exprès - le couteau, mais pas assez pour l'empêcher de me rattraper. Je l'entendis monter les marches à toute vitesse. Il fallait que je le sème. Il fallait que j'évite de rester dans son champ de vision.

Et vroom ! Virage à gauche toute !

J'ouvris la première porte qui vint à moi, et la verrouillais une fois à l'intérieur de la pièce. Toujours avec la grâce et l'élégance d'un ivrogne, je fis un rapide tour sur moi-même pour évaluer mes chances de survie. Une armoire, un robinet, des toilettes, une baignoire, un papier peint jaune pâle... La salle de bains. J'étais dans la salle de bains. Chance de survie : 65 %. Ça aurait pu être pire.

— Mon petit cochon ? Où es-tu ? chantonna le vieux taré.

Ses pas résonnaient derrière la porte. Chance de survie : 35 %.

Okay, j'étais très mal barré là ! Je me ruai sur l'armoire et l'ouvrit à la volée pour en sortir tout ce qui pourrait mettre utile. Un déodorant, des rasoirs, des aiguilles, des ciseaux de couture, j'avais pas le temps de faire un tri. Dans le désespoir, j'allais sûrement tout lui jeter à la figure et puis prier pour que ça le fasse reculer. Les aiguilles glissèrent entre mes mains moites et tombèrent par terre. Je m'apprêtai à me baisser pour essayer de les ramasser, quand le bois de la porte vola en éclat à quelques mètres de ma tête. Le vieux était en train de marteler la porte à coup de couteau. Par la fente, on voyait déjà jusqu'à son épaule.

HéloïseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant