Live Die Love - TOME 1

13 16 février 2019

Cela fait 6 mois que j'ai perdu ma fille.
6 mois que je réapprends à vivre sans elle. 6 mois que je n'ai pas remis les pieds dans la chambre. Je ne peux pas.

La douleur est toujours présente.  J'essaie de l'apprivoiser pour ne pas devenir folle.

Je ne bois plus que le soir, pour sombrer dans un sommeil sans rêve.

La journée, je sors de plus en plus souvent dans la forêt. Je chasse sans tuer un seul animal. Je m'entraîne à repérer leurs traces et à avancer sans faire aucun bruit.

J'ai fait des arbres mes cibles de prédilection : lançant pendant des heures les couteaux effilés de Tante Abby, je déverse ma haine au monde qui m'entoure.

A chaque instant, je revois les visages sans vie de Schelley et de mon père.
J'ai tellement de rage envers lui. Je lui en veux à en crever. Il aurait dû la protéger. Et ma mère, où était-elle lorsque cela s'est produit ?

Mes hurlements me réveillent chaque nuit. Est-ce cela ma vie maintenant ?

Je somnole dans le salon depuis un moment lorsque j'entends un bruit, une sorte de grognement à l'extérieur de la maison.

De la fenêtre, j'aperçois une de ces choses avancer lentement sur la route.

Dans ma tête, l'image de ma fille surgit, mordue puis morte dans mes bras. Sans réfléchir, la rage aux lèvres, je prends le pistolet de mon père et sors de la maison.

- Je vais te faire la peau !

Il semble ne pas me voir. Je m'approche rapidement. Rien. Il continue de marcher en claudiquant bizarrement. L'un de ses bras tient uniquement par un bout de chair et son talon droit a été arraché.

Je lui lance avec hargne :
- Hé ! Ho ! Viens ici ! T'as pas envie de me bouffer ?
Hum, regarde comme je suis appétissante !

J'ai envie qu'il s'approche pour lui éclater la tête. Je regrette même d'avoir pris le revolver, j'aurais dû prendre la matraque, me dis-je presque en transe.

Attiré par le bruit, je le vois qui se dirige dans ma direction. Son regard glisse sur le mien. Il a l'air de chercher quelque chose.

- Putain, on dirait qu'il ne me voit pas !

Je me place devant lui, à quelques pas. Ma main ne tremble pas, je suis prête à presser la détente au moindre geste. Une image traverse mon esprit : je revois le visage de mon père rempli de fierté lorsque je réussis pour la première fois à atteindre la cible qu'il m'avait désignée. Cette pensée me rend encore plus hargneuse.

Le mort ne bouge toujours pas. Il devrait me sauter dessus, non ! Il est végétarien lui aussi ou quoi ? Je suis tiraillée entre la haine, l'envie de le buter et la surprise.

Je lève le bras pour tirer. Au moment d'appuyer sur la détente, je le vois qui s'écarte légèrement pour continuer son chemin.

Je meurs d'envie de venger les morts qui me hantent.

Mais je ne suis pas une meurtrière... Je ne veux pas renoncer à ce pourquoi je me suis toujours battue.

Tuer pour sauver ma peau, oui, tuer par vengeance, non.

Dégoûtée, je baisse mon arme et le regarde s'éloigner.