Chapitre 1 : Changer de vie - Alie (réécrit)

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— Tu es sûre que tu ne veux pas garder ton appartement ? Tu auras un pied à terre quand tu reviendras de ton séjour.

Jessy tentait de me convaincre. Mais je ne voulais pas garder de lien à San Diego, ville dans laquelle j'étais installée depuis deux ans. La jeune femme avait été ce qui se rapprochait le plus d'une amie. C'était la petite sœur de mon ex, Peter. Je les avais rencontrés à une soirée de lycéens. J'avais aidé Jessy qui avait un peu trop bu. Peter était venu la chercher. J'avais rapidement craqué pour ses jolis yeux noisette et ses fossettes sur le menton. Il avait dix-neuf ans, moi juste dix-sept. Plus tard, il m'avait invitée sous prétexte de vouloir me remercier d'avoir pris soin de sa sœur. Puis on avait continué à se voir sans autre raison que d'avoir envie de passer du temps ensemble.

Les yeux larmoyants, elle tentait de me convaincre.

— Même si c'est fini entre vous, tu m'as moi.

Cela faisait maintenant quatre mois que nous nous étions quittés, enfin que Peter m'avait quittée. Il avait été mon premier, pour tout. Je l'avais aimé et je crois que je l'aimais encore. J'aurais tout fait pour lui. Nous avions vécu de merveilleux moments, il représentait tellement pour moi. J'avais déjà imaginé un avenir où nous nous serions mariés et où nous aurions eu des enfants. Bon, il était vrai, pas tout de suite. Je n'avais que vingt ans. Il était encore trop tôt pour y songer. Je n'avais pas vu la rupture venir. Nous venions de passer trois années ensemble. Cela comptait quand même, enfin je le croyais.

Cependant, il m'avait laissée, abandonnée en disant qu'il ne ressentait plus que de l'amitié, une sorte d'attachement. Je ne pouvais pas en dire autant. Je n'avais même pas cherché à le convaincre qu'il devait me garder, que je l'aimais bien assez pour nous deux. J'avais vu cela dans certains films, à chaque fois j'avais trouvé l'héroïne pathétique. Je ne voulais pas faire pitié. L'humiliation avait été bien suffisante. J'avais accusé la nouvelle, sans réagir d'abord. Puis lorsque l'information avait été assimilée, j'avais ouvert les yeux pour constater qu'il était déjà reparti. Peut-être aurais-je pu vivre cette rupture sans rien faire d'autre que de continuer ma vie étudiante mais vivre en face de chez sa sœur devenait de moins en moins supportable.

J'avais tenu quinze jours, me cachant pour pleurer mon amour perdu. Je surveillais les fois où il venait voir Jessy. Au début, il jetait un coup d'œil vers ma porte, une fois même j'avais cru qu'il allait venir. Puis un matin, alors qu'il était venu rendre visite à sa sœur, il n'était pas seul. Elle était magnifique et elle le regardait avec des étoiles dans les yeux. En attendant que la porte ne s'ouvre je l'avais vu lui sourire en lui caressant la joue. Il l'avait ensuite embrassée, tendrement. Ce fut à ce moment-là que j'avais compris. Il ne reviendrait pas. Il ne m'aimait plus, plus comme moi je l'aimais.

Je m'étais octroyé une nuit de pleurs, pas une de plus. Le lendemain, je mettais mon appartement en vente, prévenais la fac que je mettais mes études de droits en standby et allais passer des tests pour entrer dans l'armée trois mois plus tard.

J'avais toujours voulu le faire, devenir militaire comme mon père. Il avait été soldat dans l'US air Force, il était mort en mission en Afghanistan alors que je n'avais que quinze ans. J'avais gardé son insigne d'aviateur dans mon portefeuille, comme un talisman qui me protégeait. Je me souviens encore du chagrin qui nous avait frappé ma mère et moi lorsque nous avions appris qu'il ne reviendrait pas. À l'époque j'avais promis à ma mère de ne pas m'engager, elle ne voulait pas perdre une autre personne à cause de l'armée.

Pourtant, à ce jour cette promesse était caduque. Maman était morte d'un cancer du sein. En quelques mois, la maladie l'avait rongée. Je me souvenais de sa souffrance et de la lente et douloureuse agonie qui lui avait fait perdre espoir de rémission. Finalement elle avait pu finir sa vie à la maison, dans son lit. Elle s'était éteinte dans son sommeil un peu plus de trois ans après la disparition de mon père.

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