Chapitre 11

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10-10 baissa les paupières et dissimula son visage avec ses mains pour éviter d'être aveuglée, par l'astre de feu qui brûlait dans la voute à la teinte bleutée. La chaleur était étouffante et elle avait l'étrange sensation de rôtir vivante dans cet endroit. Comme par réflexe, elle fit un bond en arrière et se retrouva, sur son fessier, à l'ombre sous sa tente.

Des pelourses de sueur rampaient dans son dos et roulaient sur son front. La peau rougie par le soleil, elle attendit que la sensation de brûlure s'estompe et c'est l'esprit refroidi qu'elle se remémora un détail crucial : Dans la zone zéro, il existait deux moments qui formait une journée. Tout le contraire de la sphère où il faisait constamment nuit. Les notions de "jour" et "journée" n'existaient donc pas dans leur jargon.

Jour et nuit. Soleil et lune. La température était donc plus haute la journée à cause de l'astre de feu dans le ciel.

10-10 passa une main sur son front humide. Il devait faire plus de trente degrés dehors, à l'inverse de la sphère où la température ne frôlait jamais les cinq degrés. Il était hors de question qu'elle sorte d'ici à moins qu'elle ne souhaitait finir liquéfiée. La blonde comprenait maintenant pourquoi Ymiris avait préféré s'exiler sur la lune. Même lui aussi puissant qu'il pouvait être n'était pas capable de supporter l'ardeur du soleil.

Soudainement, une tignasse aurbun émergea dans son champ de vision et c'est un regard azur, soucieux qui rencontra le sien.

— Qu'est ce qu'il y a ?

Le coeur de 10-10 tressaillit et elle tenta vainement de l'ignorer. Pourquoi se sentait-elle autant happée par des mots et des phrases aussi insignifiants, simples salutations et preuves de courtoisie. Ces mots qui la rendaient si heureuse quand monsieur Myrius les déclaraient. Pourquoi chérissait-elle tant leur prononciation ?  La jeune fille avait toujours pensé que c'était le fait qu'ils soient prononcés par lui qui la rendait si gaie. Mais voilà que ces même phrases avaient sur elle, un effet semblable dites par une personne qui espérait sûrement, en secret, voir sa tête détachée de son corps.

La blonde réprima le sourire hypocrite qui voulut poindre sur le bout de ses babines et quittant le regard charismatique de la rousse, se concentra sur un tracas. Un nouveau problème se présentait à elle. Comment allait-elle faire pour expliquer à Amandine son ennui, sans faire usage de la parole. Ce cas était un problème mineur, rien comparé aux autres choses qu'elle ne pourrait pas exprimer. Il y a quelques heures, elle s'en fichait complètement persuadée qu'elle n'aurait pas à piper mot avec ces êtres exécrables. Grosse aberration ! 10-10 s'était montrée si impulsive, cela ne lui ressemblait en aucun cas. La zone zéro lui faisait développer de noirs défauts.

Si affirmer être muette lui permettait d'ignorer bon grand nombre de personnes ici, éviter les interrogatoires et sûrement le flot de paroles incessants des autres, cela corsait aussi la communication. Tout ça pouvait lui porter préjudice à l'avenir.

Pour le moment, elle devait essayer de se faire comprendre par des signes.

C'est ainsi que la captive commença une série de signes incongrus, espérant faire capter à la rousse son besoin de rester à l'abri. Elle désignait sa peau, le ciel à travers le toit de l'endroit et tout ce qui était en mesure de faire penser à l'effet de la chaleur sur elle. Malheureusement, la blonde ne récolta qu'un froncement de sourcils roux, preuve indubitable que tous ses gestes étaient sybillins à Amandine. La non-élargie fini par s'avouer vaincue. 

10-10 n'était pas en mesure d'exprimer ce besoin. Jouer à l'aphone réduisait la liste de ses nécessités — déjà infime. En somme, tout cela ne l'arrangeait pas le moins du monde.

— Désolé mais je ne comprends pas ce que tu essayes de me dire.

La rebelle ne finit pas sa phrase que déjà une tignasse châtain clair dépassa le pan de la tente et deux pupilles noirs allèrent de la blonde à la rousse. Au même moment une douce fragrance embauma l'air de la pièce et l'entêté de tout à l'heure pénétra enfin la tente. L'incompréhension modelait ses traits.

10-10 ou LiLy ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant