Chapitre 6

530 21 2
                                    


Quand les peripeties n'en finissent plus.

Porter

Après une nuit au confort plutôt acceptable, je me remets en selle pour une nouvelle aventure. Je prends une douche rapidement, enfile mes vêtements de la veille puis je file dans le café le plus proche, histoire d'avoir quelque chose dans le ventre avant le long trajet qui m'attend. Le lieu est désert, tant mieux, le matin il me faut ma dose de liquide noir avant d'être opérationnel. Et après mon périple d'hier dans la famille de Rose et cette fichue manie de toujours vouloir aider mon prochain, je suis content d'être enfin au calme. Je laisse un billet sur le comptoir ainsi que quelques pièces de plus pour la serveuse et je suis fin prêt à partir.

Je pousse les portes et remarque que le temps commence à se gâter. Le ciel est gris tout comme mon humeur. Je ne sais pas pourquoi je me suis levé dans cet état ce matin, peut-être parce que je commence à me sentir seul sur ces routes quasiment désertes. Je m'empare de mon téléphone et compose le numéro de Matt, lui seul pourra m'aider à reprendre confiance en moi. Si je cogite trop longtemps, je sais que je ferai demi-tour et repartirai en direction de la Californie. Il va falloir que je réfléchisse à une solution pour trouver un nouveau logement. Quand Alice m'a quitté, j'ai failli me retrouver à la rue, j'avais vendu ma maison lorsqu' on a pris la décision de vivre ensemble, je ne pensais pas que cela se finirait ainsi. Heureusement, Matt m'a hébergé un temps, cependant je ne compte pas profiter de sa générosité plus longtemps. Je raccroche mon téléphone, toujours d'une humeur massacrante, peut-être encore plus que tout à l'heure puisque mon cousin ne répond jamais quand j'ai besoin de lui. Je surfe sur internet pour visualiser mon itinéraire du jour : il me reste environ deux heures trente avant d'arriver dans le Colorado. Je devrai en parcourir huit de plus pour arriver au Kansas. C'est largement faisable si je ne m'arrête que quelques minutes pour déjeuner.

C'est un réel plaisir de traverser le Colorado. Cet état possède une diversité de paysages extrêmement incroyable : montagnes rocheuses, canyons, déserts et dunes de sable à perte de vue. Ses petits villages aux allures de western ainsi que ses grandes villes comme Denver ou Aspen sont des atouts attrayants qui valent le détour. J'emprunte la Trail ridge road, une route nationale de soixante-dix-sept kilomètres. Ma main glisse sur la poignée d'accélération, l'adrénaline monte, c'est la première fois que je roule aussi vite depuis mon départ. La route est déserte en ce début d'après-midi c'est pour cette raison que je peux me permettre un petit écart de conduite. Je ne fais de mal à personne, je ne mets personne en danger, mis à part moi peut-être. Un seul geste mal calculé, un tremblement, pourrait me faire quitter la route, mais je suis très prudent, je ne fais qu'un avec ma bécane. Mon estomac commence à se tordre, je ne sais pas si c'est l'adrénaline ou s'il est temps pour moi de prendre enfin un vrai repas : j'opte pour la seconde option. Je décélère et emprunte la prochaine sortie. Je suis encore à quelques kilomètres du Kansas, mais je pense pouvoir y arriver avant la tombée de la nuit. Je me gare devant une pizzeria, j'en ai l'eau à la bouche. Je n'ai aucune origine italienne, pourtant je raffole de ces cochonneries. Je m'installe, une serveuse se rend directement à ma table. Je commande une pizza forestière ainsi qu'une Corona. La serveuse me sourit, mais je fais semblant de ne pas l'avoir remarquée, j'ai décidé de rester discret pour éviter de me fourrer encore dans des situations improbables ! Elle revient quelques minutes plus tard avec mes plats, mais cette fois, elle ne me calcule pas. En pleine dégustation de mon repas, mon portable se met à vibrer. Je décroche, il s'agit de Matt.

- Salut, Matt.

- Salut, cousin, comment vas-tu ?

Je passe l'épisode de ma petite déprime de ce matin, je ne sais plus très bien si j'ai envie d'en discuter. Je n'aime pas faire part de mes sentiments en général, encore moins à Matt qui a tendance à se faire du souci pour moi. Il serait capable de me rejoindre si je lui disais que je vais mal. Et puis depuis mon enfance et la mort de mon père, j'ai appris à tout garder. Ma mère ne s'est jamais vraiment souciée de moi, et ma grand-mère avait déjà ses propres problèmes, je ne voulais pas qu'en plus elle s'inquiète pour moi. Il y avait Matt, mon confident de toujours mais quand ses parents ont déménagé en Californie, on a pris un peu de distance. Ce n'est qu'en rejoignant les King que j'ai repris contact avec lui. Je n'ai jamais voulu être un poids pour qui que ce soit, ce n'est pas maintenant que ça va commencer. La seule qui me comprenait réellement c'était Sage, mon premier amour. Je savais qu'elle pouvait être une oreille attentive et en retour elle savait qu'elle pouvait se reposer sur moi, mais encore une fois, c'est une personne que je n'ai pas su garder à mes côtés. À croire que je fais fuir tous les gens qui comptent. Enfin pour Sage, c'est différent car c'est moi qui l'ai abandonnée.

King Of Bikers-Porter Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant