Chapitre 20

3.2K 109 6
                                    

Pdv Prélude / Paula

Je ne sais pas ce qui m'a pris de réagir comme ça avec Ryan. Je dois être victime du syndrome de Stockholm, c'est impossible autrement. J'ai peur. Je suis en train de lui tomber dans les bras, il faut que je me ressaisisse, hors de question de le laisser faire ! 

C'est pas toi qui voulais te laisser faire pour ne plus avoir peur ? 

Peut-être mais j'ai changé d'avis !

Voilà que je me parle à moi même. Je suis vraiment devenue folle dans cette villa de malade, avec des mecs dingues qui prennent des filles pour des jouets. Je hais ce terme et pourtant je n'ai pas arrêté de l'utiliser pendant la conversation avec Ryan.

Cela fait au moins une demie heure que je suis là, dans la pièce, à regarder par la baie vitrée. Nous sommes entourés d'une grande forêt, autrement dit, pas de voisinage pour venir nous secourir. En plus, la forêt a l'air épaisse et j'ai peur de m'y perdre, je ne sais même pas où je suis. A mon avis nous n'avons pas du nous éloigner très loin de New York, sinon Ryan ne pourrait plus aller travailler. Je n'ai pas entendu les informations depuis plus d'une semaine, je ne sais pas si je suis recherchée, je ne sais pas s'il y a eu un grave accident ou encore si Trump a balancé une bombe atomique sur la tronche de nos amis les Coréens… Enfin ça, c'est peu probable tout de même… 

Voyant bien que ça ne sert à rien de m'étérniser plus devant la fenêtre, je retourne au creux de la pièce et décide de fouiller les armoires, celles où Ryan avait sorti son journal l'autre jour. Je tente de fouiller mais même les meubles sont fermés à clé. Je jure avant de fouiller partout à la recherche de ces maudites clés mais au bout de dix minutes, je n'ai toujours rien trouvé dans cette pièce immaculée de poussière et plutôt vide, hormis les instruments qui la comblent. Le seul tiroir ouvert, contient des livrets de partitions.

Je finis par m'asseoir sur le tabouret, près du piano. Je joue quelques notes, quelques morceaux des livrets que j'ai trouvé, mais je ne m'amuse pas vraiment. Qui s'amuserait dans ma situation en même temps ? J'aime la musique, c’est très intéressant et relaxant, mais ce n'est pas ma passion. Ma vie serait plus tournée vers la danse ! Quoique rien que penser au fait que Tyler soit un danseur, ça me dégoûte.

La musique c'est pour faire revivre ma sœur, faire vivre ma grande sœur défunte à travers les mélodies vivantes et joyeuses comme les mélodies plus mélancoliques. Mais là, seule et enfermée comme je suis, je n'arrive pas à jouer. Aucune note ne sort comme je l'entends, je me lève et me dirige vers une boîte de violon. Ce n'est pas mon instrument, Ryan a dû le rembarquer, je ne sais trop pourquoi. Je soupire avant de déballer l'instrument et je le fixe. Il est pas mal mais je ne suis pas sûre d'arriver à jouer mais bon, je vais essayer.

Je joue quelques notes et je remarque qu'il est totalement désaccordé. Je l'accorde tant bien que mal à l'aide du piano, me brûlant les oreilles au passage, et je tente de jouer quelques morceaux. Je joue bien mais je vois bien que les morceaux n'ont pas de vie, pas d'âme. Je n'arrive pas à être vivante, à rendre ma sœur vivante dans mes mélodies avec cet instrument. Elle ne l'a jamais touché, je pense, c'est pour ça que je n'y arrive pas.

Et oui, c’est pour ça que mon instrument est si important. Avant, ça n'avait pas d'importance, mais le jour où j'ai appris sa disparition, ça en a pris. Mon violon, elle l'avait touché plusieurs fois, pris en main, elle m'avait aidé à jouer avec, elle l'avait accordé aussi au début quand je n'y arrivais pas, elle m'avait aidé à mettre de la colophane sur l'archet, toutes ces petites intentions qui nous paraissaient anodines au début et qui le jour de sa disparition, sont devenues primordiales.

Les larmes coulent le long de mes joues en souvenir de son doux visage et de sa tendre voix, ses yeux bleus gris, identiques aux miens, identiques à ceux de ma mère, notre mère, ses longs cheveux bruns virevoltants dans le ciel, ses lèvres délicates, souriante, comme toujours. Le visage de ma mère, mon visage. Nous étions toutes les trois semblables. Ma petite sœur, Cherry, à beau avoir quelques traits de ma mère, elle ressemble beaucoup plus à mon père. Elle a des cheveux bruns bouclés, des yeux marrons foncés, des petites fossettes trop mignonnes, des petits ongles ronds, contrairement au miens plus en longueur, et elle adore le dessin. C'est sa passion à elle, à croire que nous sommes une famille d'artistes. Ma mère et ma grande sœur, c'était la musique, ma petite sœur le dessin, mon père il était plutôt travailleur, il pensait pas trop à l'art même s'il nous encourageait toujours dans nos choix, et moi c'est la danse.

Captive (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant