Captive (Tome 1)

Chapitre 38

Pdv Prélude / Paula

En repensant aux évènements de tout à l’heure, je me mets à pleurer silencieusement. Je vais être vendue comme un animal… Et si c’est le cas, qu’est-ce qui se passera ensuite ? Je doute fort que je ne serve que comme femme de ménage…

J’entends Lucy qui se réveille en grognant faiblement. Je m’approche d’elle et l’aide à se relever. 

-Comment tu te sens, lui demandais-je timidement.

-Ça va, ça va… Et toi ?

-Ça va.

Je préfère ne pas l’inquiéter avec le trafic de femmes, elle doit déjà s’occuper d’elle même.

-Où est Megan ? 

-Je ne sais pas, il n’y avait que toi qui étais de retour dans la cellule… Je pensais que tu saurais ce qu’il lui était arrivé…

-Je redoute le pire, surtout avec ce cinglé de Evan.

Automatiquement, elle place ses mains sur ses bras entaillés. J’avais eu le temps, pendant son sommeil, d'observer toutes les plaies, ce n’est vraiment pas joli. 

On reste silencieuses un long moment à observer la porte, comme si à tout moment quelqu’un allait l’ouvrir et nous annoncer : “Allez y les filles, vous êtes enfin libres !”. Mais ce n’est là qu’une utopie débile. Personne ne va nous venir en aide, j’en suis sûre. Je vais sûrement connaître le même sort que ma soeur et ma mère, nous allons toutes les trois se rejoindre au paradis. Au moins je pourrais de nouveau retrouver les bras rassurants de ma mère et écouter la douce voix de ma soeur…

Les secondes, les minutes, les heures s’écoulent et rien ne se produit. Lucy fait le tour de la cellule pour se dégourdir un peu les jambes. Je vois bien qu’elle souffre mais je ne peux rien faire pour elle et ça me rend dingue. Si je pouvais faire la moindre chose…

-Prélude ?

-Oui Lucy ?

-Chante pour moi s’il-te-plaît.

Je suis surprise par sa demande. Je me gratte le crâne, un peu déstabilisée et voyant son air sérieux et le supplice dans ses yeux, je me mets à chanter doucement le premier air qui me passe par la tête. “Take me to church” de Hozier. 

Les paroles de cette chanson sont un peu spéciales mais j’aime beaucoup l’air de celle-ci. Lucy lâche un léger rire sans joie et me chuchote :

-Bon choix Prélude, bon choix…

Elle se met alors à danser sur l’air que je fredonne. Elle ne fait pas des choses très complexes, ses bras tremblent et semblent avoir du mal à rester en place. Elle puise dans toutes ses dernières forces pour faire cette danse lente mais qui exprime tous les sentiments qu’elle ressent en ce moment. Tristesse, peine, haine, rancoeur. Son visage se tord par moment sous la douleur mais elle force, force sur ses demies pointes, sur le bout de ses doigts rougis. 

Je l’envie. Elle est très gracieuse, elle est belle. Lorsque ma soeur est morte, j’ai tellement souffert que je me suis laissée tombée dans les abîmes de l’anorexie avant de faire de la boulimie pour combler mon chagrin. Désormais, j’ai l’impression d’avoir perdue toute ma grâce, tout mon éclat. Cet éclat qui fait briller les yeux des spectateurs et qui fait briller une danseuse sur scène. Je n’ai plus rien de cette lueur qui vous éblouit et vous réjouit. 

J’ai envie de la rejoindre, oh oui je le veux, mais je suis incapable de bouger, tout ce qui se passe m'effraie, je ne suis pas aussi forte qu’elle, je me contente de chanter, en me disant qu’au moins je pourrais lui faire plaisir.