Cameron
— Ça va, mec ?
La voix de Hunter m'arrache à mes réminiscences.
Après lui avoir répondu d'un vague grognement, je jette un nouveau coup d'œil à ma montre et constate qu'il ne reste plus guère plus de temps avant mon vol. Une boule douloureuse vient se loger dans ma gorge.
Putain ! Je ne peux pas croire que ça va se terminer comme ça !
Comme mue par une volonté propre, mon regard survole encore une fois la foule. Certains se pressent vers les comptoirs d'enregistrements tandis que d'autres disent au revoir à leurs amis ou à leur famille. Il y a aussi tous ceux qui scrutent les panneaux d'affichage. Et enfin, ceux qui se dirigent vers les salles d'embarquement. Dans un instant, je ferais partie de ce contingent-là. Comme eux, je devrais franchir les portiques de sécurité et ça sera terminé.
Sans répit, mes yeux fouillent la nuée de visages. Celui de Rachel reste désespérément invisible. Inutile de continuer à se faire des illusions. À cette heure, elle ne viendra plus.
Hier, pendant le pot organisé pour l'arrivée de James Graham, lorsque je l'ai tenue serrée contre moi ; que je l'ai sentie trembler ; que je l'ai embrassée ; qu'elle m'a répondu avec cette passion presque désespérée ; que j'ai ressenti son émotion, j'ai repris espoir. J'en étais certain. Pour elle aussi, il y avait plus qu'une simple attraction physique entre nous. J'étais persuadé qu'elle reviendrait vers moi. Je me suis dit qu'elle allait m'appeler. Qu'au moins, elle nous donnerait une chance de nous expliquer.
J'ai guetté un signe. J'ai attendu son appel. En vain. Finalement, c'est moi qui ai laissé un message sur son répondeur. Pathétique. À croire que dans l'état où je m'étais mis, je n'avais plus que deux neurones en état de fonctionner.
Et tout ça pour rien. La vérité, c'est qu'elle ne tient pas assez à moi pour envisager une relation à distance. Mon expérience avec Kendra aurait pourtant dû me servir de leçon.
— Tu devrais y aller, proposé-je à Hunter. Mon vol va être annoncé d'un instant à l'autre.
— Je ne suis pas aux pièces, réplique-t-il d'un ton dégagé. Je me casserais lorsque tu auras passé le portique.
— Pourquoi ? Tu as peur que je ne le prenne pas, ce fichu vol ? lancé-je avec l'intention de faire un peu d'humour moi aussi.
Pas vraiment une réussite. La tension qui a transparu dans ma voix m'étonne moi-même. Et mon pote n'est pas en reste. Le regard qu'il coule vers moi le signifie clairement.
— Et pourquoi pas ? Rien ne t'y oblige, observe-t-il à juste titre. Il y a des navettes toute la journée.
— Tu penses bien que l'idée m'a un peu traversé l'esprit, ironisé-je. Non. Si elle ne vient pas, le message sera limpide pour moi. Je ne vais pas la harceler...
— Qui parle de harcèlement ? Tu t'arranges pour la revoir une dernière fois. Et si c'est toujours non. Eh bien, tu lâches l'affaire, mec ! Et tu n'auras plus rien à regretter.
Je garde le silence. Je suis tenté. Oh oui, vraiment tenté.
— La balle est dans son camp, vieux. Je crois que j'ai suffisamment piétiné mon amour propre comme ça, argué-je finalement avec autodérision avant de reprendre. Un autre café, ça te dit ?
— Oh non, mec ! Je frôle l'overdose ! Mais avec tout l'alcool que t'as ingurgité hier soir, je peux comprendre que t'en aies besoin. Et vu ta tête, si tu veux mon avis, une cargaison entière ne suffirait pas, se fend-il gentiment la poire.
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Près de toi : Love in L. A. 1
RomanceRachel : Une originale. C'est comme ça qu'on m'a toujours définie. J'aurais pu apprécier ce qualificatif, et même l'aimer vraiment. Seulement, je crains que pour la plupart « originale » ne soit un terme plutôt édulcoré pour parler de ce petit truc...