Chapitre 8

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Je rejoins ma voiture en traînant des pieds. Avant de monter à l'intérieur, je jette un dernier coup d'œil à la caserne dont je sors. Mon pompier n'est pas d'ici mais cet homme au cheveux grisonnent le connaît. Ça me retourne l'estomac de devoir partir alors qu'il a la réponse à ma question, alors qu'il saurait me dire où le trouver.

Je monte derrière le volant et reste quelques instants là, sans rien faire, le cerveau en bug. J'essaie d'accepter l'idée de m'éloigner de celui qui pourrait m'en dire plus. Partir me rend malade.

Je m'apprête à démarrer pour rentrer chez moi quand mon regard est attiré par ce papier qui contient toutes les adresses. Je m'en empare, le regard perdue. J'ai du mal à lire les mots qui y sont inscris, les lettres se mélangent, prenant un malin plaisir à me torturer encore davantage.

Quand, enfin, je réussis à déchiffrer le premier mot, ma décision est prise. Non, je ne rentre pas, je continue. Je dois persévérer, comme Lui l'a fait avec moi. Sans son acharnement, je ne serais plus de ce monde.

J'entre les coordonnées dans mon téléphone, le pose sur son support et démarre le moteur. Une détermination nouvelle prend possession de moi. Si un passant me voyait, il prendrait sûrement peur en voyant ma tête.

- Rejoignez l'itinéraire, m'ordonne mon GPS.

Je sors donc ma place dans une contre-allée, le long de la route et suis les indications. Le trafic est fluide et je progresse assez facilement jusqu'à rejoindre un axe principale. Mon feu passe au orange, je m'arrête, me retrouvant première de ma file. Les voies perpendiculaires passent au vert et une moto démarre. Je tourne la tête dans sa direction et la détail, comme à mon habitude. C'est une magnifique Z750 noir matte. Ses suspensions et jantes sont d'un doré saisissant. Le bruit qu'elle dégage provoque une multitude de frisson dans tout mon corps.

Je regarde passer l'engin puis le vois disparaître dans mon rétroviseur. Mon feu repasse au vert et je reprend ma route vers la seconde caserne.

Une nouvelle moto apparaît dans mon rétroviseur. Une petite bombe verte slalome entre les véhicules avant de passer avec agilité à côté de moi. La longueur des cheveux, la finesse de la taille et le jean skinny m'indique que c'était une femme. Une bouffé de jalousie me saisie, je voudrais tellement être à sa place plutôt que bloquée dans la circulation...

Après un temps qui me semble interminable, j'arrive enfin à la seconde caserne. Cette fois-ci je n'ai pas d'hésitation, j'entre en m'annonçant.

- Bonjour, il y a quelqu'un ? je dis à la cantonade.

Je tourne sur moi même, cherchant un uniforme bleu marine caractéristique. Je ne m'attarde pas sur les lieux, très peu intéressée par l'architecture cette fois-ci. Je suis venue chercher des réponses, pas faire une balade touristique.

- Oui, bonjour, me répond une voix féminine.

Je fais volte-face et tombe nez à nez avec une jolie blonde. Ses cheveux sont tirés en arrière par une queue de cheval haute. Son sourire ainsi que son visage joviale m'invite à la confiance et à la confidence.

Je ne m'attendais pas à tomber sur une femme, elles sont tellement rares. Il faut avoir du cran pour endurer ce travail entourer d'autant d'hommes.

- Je recherche quelqu'un, j'espère que vous allez pouvoir m'aider...

Je lui déballe mon histoire. Deuxième fois de la journée que je raconte mon récit et la même compassion apparaît dans les yeux de la jeune femme. Je me demande, soudainement, si ma recherche n'est pas étrange pour provoquer cette réaction.

Je ne lui parle pas de la caserne précédente. Je ne lui dis pas que l'on m'a refusé toutes information la fois précédente.

- Je suis sincèrement désolée mais je ne peux rien vous dire, me répond la jolie blonde face à moi.

Mes espoirs retombent comme un soufflet. La solidarité féminine elle connaît pas ?

- Pouvez-vous me dire s'il est de cette caserne au moins ? j'essaie de savoir.

D'un sourire triste, la jeune femme me confie que non, il n'est pas de sa caserne et qu'elle ne pourra pas m'en dire plus.

Je baisse la tête face à sa réponse. Ma déception est immense. Personne n'acceptera donc de m'aider ?

Je remercie la blonde et ressors, sans me retourner. La dernière fois j'ai reçu un conseil dont je ne voulais pas, alors je m'abstiens cette fois.

Dehors, je prends une grande inspiration pour effacer la tristesse qui se propage peu à peu en moi. Je ne dois pas céder, ils auront beau mettre des obstacles sur ma route, je réussirais malgré tout à avancer.

Une bourrasque de vent me frappe de plein fouet, envoyant mes cheveux voler dans tous les sens. Je savoure la sensation de l'air qui pénètre dans mes poumons, me remémorant le souvenir de la brûlure que m'a provoqué la fumée.

Un nouveau coup de vent envoi mes cheveux me frapper le visage de plein fouet. Je ferme les yeux, laissant la nature se déchaîner, me rappeler la chance que j'ai de pouvoir à nouveau la savourer.

Je respire l'air frais, dégustant le plaisir de pouvoir emplir mes poumons. Le souvenir de mes bronches en feu, m'empêchant de m'oxygéner convenablement me saisie. Je me rappelle parfaitement de la difficulté que j'ai eu à respirer, me provoquant une toux foudroyante, plus douloureux que des épines dans mes veines.

Je remonte en voiture et saisie mon volant à deux mains. Je sers de toutes mes forces pour extérioriser ma frustration Tout en poussant un gémissement.

Je m'empare ensuite de mon téléphone, de ma liste d'adresse et entre la suivante. S'ils pensent pouvoir me décourager  avec leur silence, ils se trompent ! Je compte bien retrouver cet homme, même si tout le monde semble s'acharner à le garder loin de moi.

Je démarre, sors de ma place et rejoins la route. Une moto jaune passe à vive allure à côté de moi et laisse dans son sillage un bruit étouffé de moteur en pleine accélération.

Il fait beau aujourd'hui, je vais très certainement en croiser encore beaucoup d'autres, des deux roues.

Je tourne à droite, puis continue sur cinq cents mètres tout droit. Encore à droite puis la première à gauche. Au rond-point, je prends la troisième sorties sur les cinq disponibles. Au loin, un feu vert est visible. Il passe au orange puis au rouge. Personne devant moi, je suis de nouveau la première au feu. Deux scooters s'arrêtent à ma droite et une moto à ma gauche.

Je n'ai jamais été fan des scooters alors je tourne la tête vers la moto. Elle est noir, matte. Elle me dit quelque chose mais impossible de remettre le doigt dessus.

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Où Que Tu Sois...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant