Chapitre 2

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Quand j'ouvre la porte de l'appartement, une petite figure pointe de la salle de bain.

- maman!! chuchote t elle.

- coucou ma chérie.

- ne fais pas de bruit, papy a dit de pas le déranger, il est fatigué...

«super»

- toi aussi, tu as l'air fatiguée.

- j'ai beaucoup vomi, tu sais, maman... ho!

Et elle y retourne. Je la retrouve en train de nettoyer consciencieusement le toilette avec une lingette, elle m'explique que mamy ne veut pas qu'elle en mette partout... quel enfant de trois ans nettoie derrière lui quand il a été malade????

«...moi, à son age...»

- tu as mangé un peu?

- non, mamy a dit que comme ça, j'aurai plus rien à vomir... j'ai mal au ventre, tu sais maman...

Elle est glacée, toute pale... je lui propose un petit morceau de sucre et suis ravie de voir ses yeux pétiller... ça lui fera un peu d'énergie...

Je trouve un sachet d'anti vomitif... et miracle, elle le garde.

Je la soulève et l'allonge dans mon petit lit dans mon ancienne chambre d'enfant qui est devenue la sienne, avant de venir me glisser près d'elle. Ma fille est épuisée, elle s'écroule de sommeil contre moi.

J'ai horreur de revenir ici, je n'y ai pas dormi depuis des années, et de toutes façons, je n'y ai jamais bien dormi... même avant... avant...

«NON!! NE PAS Y PENSER!!»

Je me concentre sur la respiration de ma fille, il ne faut pas que je laisse mes pensées vagabonder... il ne manquerait plus que je pique une crise et que je réveille mon formidable père adoptif si fatigué...

Je me roule en boule et m'étreint moi même... j'ai envie de regarder internet... mais je ne peux pas... je ne voudrais pas réveiller Émilie... les images me manquent... En fait, je me sens si seule, j'aurais tellement besoin de me sentir protégée que j'ai pris l'habitude de regarder des images de couples enlacés, je fais ça pendant des heures avant de dormir... ça doit être tellement agréable de sentir des bras forts autour de soi, on doit se sentir tellement en sécurité... en tout cas, les femmes sur les images ont l'air heureuses... Pour tenir ma panique à l'écart, je pense à mon image préférée, un couple enlacé, souriant, les yeux dans les yeux... lui a ses bras autour d'elle et derrière eux, il y a la mer démontée...la femme n'a pas l'air apeurée, elle regarde le gars et semble vraiment bien...

J'aimerais ressentir ça, juste une fois...

Émilie bouge un peu...je me tiens prête à l'emmener vite aux toilettes mais non, elle ne se réveille pas.

Je suis fatiguée... il faudrait que je dorme... je regarde mon petit ange et ferme les yeux.

«ERREUR FATALE.»

Je plonge dans mes cauchemars, je suis de nouveau dans la cave de mon oncle adoptif, dans la cage... ma cage qui a été ma maison pendant les deux mois qui ont détruit ma vie... la peur, l'odeur de mon urine, le froid, la faiblesse, le goût de bile dans ma gorge, tout remonte!

J'ouvre les yeux et cherche de l'air.

Ma fille, ma fille est près de moi, je ne suis plus là bas. Je ne suis plus là bas, mais je suis dans cette tombe qu'est l'appartement de mes parents adoptifs, cet appartement où j'étouffe, où je suis obligée de laisser ma seule lumière en ce monde...

J'arrive à contenir mes sanglots, je reprends mon souffle... je suis sortie de mon cauchemar à temps, je n'ai pas fait pipi dans le lit...

Quand mon oncle s'approchait de la cage, j'avais tellement peur que je me faisais dessus, et quand mes cauchemars sont trop... réalistes, cela m'arrive encore bien que je n'ai plus 16 ans mais 21...

Je me dégage de la douceur de l'étreinte de mon bébé, je vais la réveiller si je reste près d'elle, juste avec les battements assourdissants de mon cœur.

Sans bruit, j'attrape mon sac et mon pc portable. Voilà, les images tendres et rassurantes me font du bien... il est possible qu'un homme approche une femme sans la détruire irrémédiablement, sans avoir des objets de torture pour la faire hurler de douleur avant qu'elle s'évanouisse... sans vouloir lui faire des choses tellement contre nature que je n'imagine pas qu'un autre que lui envisage ça... c'est possible...

«Oui, ça doit l'être mais pas pour moi...»

Moi, aucun garçon ne peut me toucher, pas même nos trois danseurs... ils sont gays, je le sais, je sais bien qu'ils n'ont aucun intérêt pour les femmes en général et moi en particulier, ils sont gentils et doux comme des agneaux mais c'est impossible... cela me demande beaucoup de stratégie pour que personne ne le remarque... Mon amie Jackie, le sais elle, je lui ai raconté mais personne d'autre..

En cliquant sur les images, l'une d'elle ouvre une fenêtre, le couple est nu au lit! J'ai pas réussi à retenir mon cri de panique! Émilie bouge mais heureusement ne se réveille pas...

Les minutes passent au ralenti, je suis épuisée mais je sais que je ne dois pas fermer les yeux, l'oncle Roger n'attend que ça pour envahir mon cerveau.

SURVIVRE APRÈS MON ENLEVEMENT  Spin off M.A.P.L.V.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant