Chapitre II

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Fin du mois d'août 1939 :

Ce fut sans aucun doute le plus bel été de la vie d'Archie et Robbie. Ils s'aimaient à ne plus se lâcher. Leur relation était secrète, certes, mais cela ne les empêchait point de profiter l'un de l'autre. Ils passaient tous leurs jours et toutes leurs nuits ensemble, si bien que Robbie commençait sérieusement à manquer à son travail, au plus grand énervement de Jack Lilis.

****

Une journée de plus venait de se terminer. La chaleur commençait peu à peu à disparaître pour laisser place à la fraîcheur du soir. Les parents Lilis, pensant que cela faisait longtemps, avaient décidé d'organiser un nouveau dîner avec leur famille. Jack invita par la même occasion Robbie, d'abord étonné d'une telle demande mais qui accepta, d'abord par politesse, puis afin de pouvoir revoir son fils.

Après sa toilette qui dura une heure, il revêtit son plus beau costume, malgré qu'il ne lui ait pas coûté cher, car, dans une famille semblable aux Lilis, il faut toujours se mettre sur son trente et un pour ce genre de dîner interminable et fatiguant.

Prêt à sortir, sa chemise à la main, il s'arrêta lorsqu'il vit sa machine à écrire. Une idée lui vint alors à l'esprit. Il prit place devant cette dernière et commença la rédaction d'une petite missive, parce qu'il devait faire vite, adressée à celui qu'il aime. Pourquoi un pareil projet ? Eh bien, Robbie était ce genre de garçon aimant mais discret. Il ne révélait que très rarement ses sentiments, et, en ressentant de très forts pour Archie, il s'était dit que les lui écrire serait plus facile pour lui.

"J'imagine, sans cesse, dans mes rêves, comme lorsque je suis éveillé, votre corps nu aux côtés du mien, haletant de désir et m'abandonnant peu à peu à vos fantasmes"

Cette phrase n'allait pas. Elle n'exprimait en aucun cas son amour pour Archie mais plutôt son envie charnelle. Il est vrai qu'il y pensait souvent mais ne l'ayant jamais fait avec un homme, cela le terrorisait.

Il chassa rapidement cette affreuse pensée et se concentra à nouveau dans la rédaction d'une autre lettre, plus romantique et beaucoup moins sensuelle.

19h00 :

Le dîner se déroulait dans la joie, entre les rires des triplées, et la bonne humeur, avec les blagues de Jack Lilis et les divers sourires amusés en guise de réponse.

Archie et Robbie, assis l'un en face de l'autre, se jetaient, comme la première fois au lac, des regards furtifs mais discrets. Ils appréciaient beaucoup ces brefs coups d'œil, bien que Robbie n'y répondait que très peu, sentant le lourd regard du père d'Archie sur lui. Ce dernier comprit alors et s'arrêta immédiatement.

Jack Lilis prit la parole et s'adressa à Robbie. Il lui demanda la raison pour laquelle il manquait souvent son travail. Le ton de sa voix trahissait son irritation. Le jeune homme ne sut répondre. Ses joues prirent une teinte rouge. Archie le vit et voulut le défendre, mais comment ? Révéler leur idylle devant tout le monde, n'était point une bonne idée. Son père n'avait guère l'esprit ouvert concernant une relation amoureuse entre deux hommes. Il l'avait très souvent dit haut et fort : il trouvait cela répugnant. Il chercha alors une autre solution mais rien ne lui venait à l'esprit. Il fut brutalement coupé dans sa réflexion par son père, qui reprit une nouvelle fois la parole, mais d'un ton plus sec :

- Je suis au courant pour vous deux.

Archie et Robbie se lancèrent alors le même regard, sans toute fois montrer une once d'inquiétude. Archie lui répondit :

- De quoi parlez vous ?

- Ne me prends pas pour un idiot mon fils. Tu entretiens une relation avec lui.

Archie nia alors tout afin de protéger Robbie, mais ce dernier, comme poussé par un élan de courage fit face à Mr.Lilis, le regarda droit dans les yeux et lui avoua tout, depuis le début et dans les moindres détails. Malheureusement, cela ne changea guère. L'homme affirma ne rien vouloir entendre et obligea le jeune homme à sortir de sa maison, ce qu'il fit immédiatement, la tête basse, le pas rapide et le visage couvert de honte et de tristesse.

Arrivé en dehors de la demeure, prêt à rentrer chez lui, il fut arrêté par la voix fragile d'Archie, le suppliant de rester :

- Par pitié, ne pars pas !

Ce dernier se retourna, la tristesse coulant de ses yeux :

- Je suis désolé, mais je ne peux rester ici...

Il lui avait dit cela dans un chuchotement rempli de désespoir. Il fouilla ses poches d'une main tremblante et en sortit sa lettre, enfermée dans une petite enveloppe blanche, qu'il remit à son aîné en lui lançant un dernier regard, où ils purent mélanger leurs iris bleus, ce qui leur réchauffa un instant le cœur, puis Robbie partit, dans la nuit, fraîche et calme.

Archie le regarda, sans un mot... excepté dans ses mains.

𝑫𝒆 𝒕𝒐𝒖𝒕 𝒎𝒐𝒏 𝒆̂𝒕𝒓𝒆 𝒋𝒆 𝒍𝒆𝒔 𝒂𝒊𝒎𝒆 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant