Marguerite

53 27 1
                                    

Aimé était un garçon curieux, créatif. Il adorait jouer avec ses pinceaux sur ses nombreuses feuilles blanches. Il adorait voir le liquide baigner le papier, et puis y rajouter des couleurs. Il adorait s'exprimer à travers les arc-en-ciels, créer des nouveaux mondes, de nouvelles histoires.

Mais, il cachait ses passions, les gardait en secret, enfermées dans son cœur naïf.

Aimé semblait n'avoir aucun visage, aucune personnalité. Il tentait aussi bien qu'il pouvait de leurs ressembler, d'être comme eux, d'être une pâquerette.

Après tout, c'était la seule chose qu'il avait appris à faire depuis tout petit. Les suivre de tous les côtés, avoir les mêmes habits, les mêmes marques, coiffer ses cheveux de la même façon. Satisfaire leurs attentes, leurs passe-temps. Plaire à l'un, plaire à l'autre.

Bien qu'une fois sortit de sa chambre, de sa pièce magique; il avait l'impression de jouer l'acteur. Il désirait être apprécié, désiré.

Alors il se réduisait à être un mouton, sans distinctions, sans émotions. Il suivait la foule.

Mais, un jour, assis sur la chaise près de son bureau; il regarda son papier, le papier qu'il avait dans le passé remplis de teintes de vies. Il prit son pinceau, son crayon, et rien ne sortit. Il n'avait plus d'inspiration, plus d'émotion à force de les écraser au fond de son âme tourmentée.

Pendant des semaines, il essaya de peindre sur de nouvelles surfaces, des cahiers, des serviettes, son bureau, ses murs, ses habits, des feuilles d'arbres, des briques. Rien. Rien ne marchait.

Aimé sentait son âme, confuse, perturbée. Il n'arrivait plus à s'exprimer, et il en avait besoin. Toute sa vie, la peinture lui avait permit de sortir de se monde où il était compressé, jours après jours. Où il voulait seulement être aimé. Les différentes nuances sur les bouts de papier lui avaient permis de vivre.

Peu importe à quel point il essayait, les feuilles restaient pures, vides.

Frustré, désespéré, il se regarda dans la glace.

Ses yeux étaient petits, abimés, tristes. Sa peau était pale, sans vie. Son nez semblait rangé, comme dans un tiroir, oublié. Ses fossettes avaient disparues comme de nombreuses espèces dans le monde.

Il prit une couleur dans ses mains usées et la reprocha de tête et peigna. Il peigna son visage jusqu'à que ses cheveux soient collés entre eux, jusqu'à l'extrémité de son cou, jusqu'à ses yeux tombent de fatigue.

Animé, son visage était un éclat de pigmentations, de vie.

Il avait retrouvé une partie de lui même qui avait été perdue au fond de son esprit.

Satisfait, il commença à appliquer des couches de maquillage, de peinture sur sa douce peau, chaque matin. Et il décida de sortir de chez lui, comme ça, montrant une partie de lui même aux autres, se rendant vulnerable.

Il voulait être aimé, mais réussir à vivre avec lui même, à s'apprécier et embrasser sa créativité, ses passions, il avait compris que c'était plus important.

Il sortait du moule, on le regardait étrangement, on le piétinait de temps en temps, on se moquait. Parce qu'il était un peu différent.

Aimé avait grandit, il n'était plus une petite pâquerette poussant partout dans les près. Il ressemblait plus à une marguerite, plus imposante, plus resplendissante. Son cœur était jaune, coloré comme ses portraits. Ses pétales étaient blanches et représentaient ses papiers, prêts à être peints de vie.

Il était une marguerite, celle qu'on pouvait rassembler dans un bouquet et, il savait qu'il n'était pas seul. Il avait rencontré tellement de personnes comme lui, qui sortaient de ce trou creusé, qui mangeaient la passion, toutes les teintes des saisons.

Aimé était finalement aimé pour qui il était, pour ce qu'il représentait.

Un monde en fleurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant