Le lendemain matin, Elsa s'extirpa difficilement du lit. La nuit avait été courte. Elle fit sa toilette et s'habilla d'une longue robe en velours bleu-vert au tour de taille paré d'une ceinture de fils d'or. Elle enfila soigneusement ses gants blancs. Pour terminer, elle tressa ses cheveux avant de les enrouler en un chignon impeccable. Elle avait tant de fois répété ces gestes qu'elle n'y pensait même plus.
Elle observa le résultat dans le miroir et le souvenir de son reflet la nuit passée lui revint à l'esprit. Elle secoua la tête et sortit.Une fois dans le couloir, son attitude était changée. Elle avait un port de tête impeccable, les épaules redressées, le regard assuré et autoritaire. Tout en elle respirait la royauté, de la racine de ses cheveux au bout de ses doigts. Il ne manquait plus que la couronne, qui, elle le savait, lui reviendrait bientôt.
Comme en écho à ses pensées, son majordome débarqua.
" - Votre Majesté, je tenais à vous informer que le Duc de Weselton avait confirmé sa présence à votre couronnement.
- Merci William. Faites passer l'information à Mme Jyrianka je vous prie. C'est elle qui se charge de la liste d'invités.
- Bien, votre Majesté."
Sans demander son reste, il s'en fut aussi vite qu'il était arrivé.Elsa se rendit alors compte qu'elle se sentait bien seule dans ce grand château.
"Mais à vrai dire, cela vaut mieux, se rappela-t-elle. Moins de monde, moins d'émotions, moins de risques. Moins de blessés potentiels."
A cette réflexion, elle fronça les sourcils, légèrement paniquée. Son couronnement, tant attendu après des années durant lesquelles Arendelle n'avait pas de guide, serait une grande célébration, ça ne faisait aucun doute. Des grands seigneurs du pays et des alentours étaient conviés, ainsi que tous les habitants d'Arendelle.Soudain, Elsa réalisa alors à quel point cet évènement serait dangereux. Elle serait entourée de monde. Énormément de monde. Tous venus pour la voir, elle. Des centaines de paires d'yeux seraient braquées sur elle tout au long de la soirée. Mais ce qu'elle avait de pire à craindre, c'était le moment de son sacrement. Au moment où la chapelle entière la tiendrait pour seul centre d'attention, elle devra tenir les symboles de royauté. Les tenir à mains nues. Réalisant cela, Elsa eut un sursaut incontrôlé suivi d'un frisson.
"C'est impossible. Je n'y arriverai jamais, murmura-t-elle d'une voix désespérée, se tenant les tempes de ses poings fermés."C'est alors qu'elle entendit des bruits de pas. Quelqu'un venait. En observant sous ses pieds, Elsa se rendit compte qu'elle avait gelé une petite partie du parquet. D'un geste précipité, elle prit le tapis qui se trouvait un peu plus loin et le plaça par-dessus, camouflant les traces de son anormalité. Juste à temps pour apercevoir Anna passer à l'angle du couloir. L'apercevant, sa cadette s'arrêta et l'observa, comme si elle hésitait.
Mal à l'aise et voulant à tout prix éviter de supprimer la distance qu'elle s'était efforcée d'installer, Elsa détourna le regard et s'en alla.Incapable de regarder ta soeur en face. Lâche.
Pourtant, quelques pas plus loin dans un couloir perpendiculaire, Elsa s'arrêta de nouveau. N'était-ce pas elle qui se sentait seule tout à l'heure ? Après tout, Anna était sa soeur. Et si...? Mais la petite voix dans sa tête la rabroua.
Toutes ces années passées à l'éviter pour réduire tes efforts à néant par une simple envie de compagnie ? Allons, allons, Elsa. C'est égoïste ça. Tu n'as pas honte ? Protèges ta soeur, éloigne-toi d'elle. Tu vas lui faire du mal. Tu vas la détruire. Comme à chaque fois que tu t'attaches à quelqu'un. Elle mérite mieux.
Elsa n'était pas égoïste. Elle savait que ce monde n'était pas fait pour elle. C'était déjà une chance d'exister. Alors, elle se ferait toute petite, gardant ses sentiments pour elle. Elle ferma les yeux.
"Cache tes pouvoirs, n'en parle pas. Étouffe tes émotions et maîtrise tes sentiments, récita-t-elle"
Quand elle les rouvrit, ses prunelles n'exprimaient plus rien d'autre qu'un masque serein et ses lèvres affichaient un petit sourire.Plus tard dans la journée, après avoir réglé un nombre de préparatifs qui dépassait l'entendement, Elsa s'affala sur la banquette au pied de son lit, épuisée.
Relève-toi Elsa. Ce n'est pas l'attitude d'une princesse.
Pour l'instant, Elsa se fichait bien d'avoir l'air d'une princesse. Elle aspirait juste à souffler un peu. Tout de même, c'est incroyable le nombre de choses qu'il pouvait y avoir à gérer pour un simple couronnement !
"Ils ne pourraient pas simplement me mettre une couronne sur la tête et me laisser tranquille, grommela-t-elle pour elle-même."Elle tourna la tête et observa ses draps humides, trace du givre de la nuit passée qui avait fondu. Après tout ce temps, Elsa aurait dû ne même plus faire attention à tous ces détails qui caractérisaient sa vie avec des pouvoirs surnaturels. Pourtant, elle n'y parvenait pas. Chaque petit flocon était un coup au coeur. Chaque petite arabesque de glace, un poignard dans le ventre, lui rappelant qu'elle était différente. Anormale. Dangereuse.
Dire qu'Elsa en souffrait était un euphémisme. Cela la martyrisait, lui torturait l'esprit, la faisait trembler de douleur. Pas seulement son don étrange, mais aussi, et surtout, ses conséquences.Elsa s'isolait, repoussait sa soeur, de potentiels amis, l'extérieur du château. Le monde. Elle cherchait à protéger les autres et à se protéger, s'enfermant dans une carapace de douleur et de glace. Chaque émotion, chaque sentiment qu'elle enfouissait au fond d'elle la poussait un peu plus près de ses limites, la poussant à craquer, à exploser. Et chaque fois, elle tenait bon, telle une forteresse inébranlable. Mais à l'intérieur, elle n'en menait pas large.
Ce qui lui permettait de tenir ? Elle l'ignorait. La force de l'habitude peut-être. Après tout ce temps, elle s'était sûrement endurcie, sans jamais tout à fait accepter cette séparation du reste du monde. Les humains n'étaient pas faits pour vivre seuls. Elsa ne faisait pas exception à la règle.
Oh certes, en tant que princesse, Elsa était entourée de beaucoup de monde. Du personnel et sa soeur en particulier. Mais son entourage était physique, pas affectif. Et malgré le fait qu'elle puisse parfois se laisser aller à désirer une quelconque compagnie, Elsa se l'interdisait fermement. Elle savait qu'elle n'y avait pas droit. Et quelque chose, ou quelqu'un elle l'ignorait, y veillait de près.
Cette chose l'avait prévenue : Anna s'était retrouvée blessée. Et malgré cela, Elsa eut le culot de rester attachée à ses parents. Et ils étaient morts. C'était de sa faute, Elsa le sentait. Quelque chose le lui murmurait, une voix qui sifflait dans sa tête comme un venin, qui s'infiltrait dans ses veines, dans son corps comme un poison.Tu les as tués. Idiote. Tu n'as pas eu assez de courage pour t'en séparer. Voici les conséquences de tes actes. Egoïste. Tu ne mérites aucune peine. Tu ne mérites rien.
Elsa le savait. Chaque fois qu'elle osait s'attacher à quelqu'un, il lui arrivait malheur. Chaque fois qu'elle osait faire un joli rêve, celui-ci s'évanouissait pour ne laisser place qu'aux sombres pensées de son imagination. Ses cauchemars. Elle se réveillait alors, en proie à la peur, et ses pouvoirs prenaient le dessus.C'était dans ces moments qu'elle les ressentait alors vraiment. La solitude. L'angoisse. Des sentiments qui s'infiltraient en elle par chaque pore de sa peau et lui glaçaient le sang, la paralysaient. Le froid. Voilà son véritable ennemi.
Elsa aurait voulu se battre. Elle aurait voulu affronter son adversaire en le regardant droit dans les yeux, lui affirmer qu'elle n'avait pas peur de lui. Mais ce serait mentir.
Son ennemi, bien qu'il n'ait pas de forme, lui faisait bien plus peur que n'importe qui. Parce qu'il était en elle. Il se cachait dans son corps, aux tréfonds de son esprit et la rendait impuissante. Et alors, que lui restait-t-il ? La fuite ? Mais on ne peut pas fuir son ombre Elsa.
Tu es piégée.
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Voilà pour le seconde chapitre de « Le Froid » ! Il ne se passe pas grand-chose, je m'en excuse. L'action vient un peu plus tard, promis ;)
Le prochain chapitre sera sûrement pour la semaine prochaine. En attendant, j'attends vos avis !
A+
Ashley Darling ❤️
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Le Froid [ABANDONNÉE]
Fiksi PenggemarArendelle, juillet 1839. Au royaume, l'excitation était à son comble. Près de trois ans s'étaient écoulés depuis que le Roi et la Reine d'Arendelle avaient sombré dans le naufrage de leur bateau, et dans une semaine, la princesse Elsa serait enfin c...