Le collège s'était déroulé de la même horrible façon que la primaire. C'était simple, plus rien n'allait. La maison était une torture, le collège une longue expérience de douleur et de solitude. Plus que jamais, Guillaume n'était chez lui nul part. Ses frères étaient partis pour de bon, laissant Maman régner à la maison en tyran. Depuis qu'elle avait découvert que Guillaume faisait rentrer dans sa maison le corbeau, elle était constamment sur son dos. Le peu de liberté qu'il avait pu avoir en sixième s'était envolé en cinquième, et se renforçait chaque année.
Maman l'avait découvert un soir entrain d'ouvrir la fenêtre de sa chambre toujours presque vide. Elle n'aurait peut être pas piqué une crise, si cela n'avait pas été en hiver, un jour de pluie. Elle ne se serait pas peut être pas énervée si le corbeau était arrivé quelque seconde après, se poser sur le bras de Guillaume. Peut être pas non plus, s'il n'avait pas pris un petit morceau de pain pour le nourrir. Le croassement du corbeau avait fait peur à Maman, mais l'oiseau eu plus peur d'elle que l'inverse. Il repartit à tir d'aile, laissant seul son ami subir les foudres de celle qui se faisait appeler mère. Sa colère fut terrible et Guillaume crut qu'elle ne s'arrêterait jamais. Les cris avaient empli ses oreilles et résonnaient dans sa boite crânienne même après son départ. Il avait mal aux bras, aux mains et aux joues. Ce jour là, elle l'avait encore privé de dîner. Ce jour là, il était encore enfermé.
Guillaume avait tout de même grandit. Il avait enfin coupé ses cheveux blonds, très courts, pensant qu'un minimum de moquerie cesserait. Il n'en fut rien, cela attira même l'attention pendant un temps. Ces yeux froids étaient ressortis de sa tignasse claire, glaçant les gens sur leur passages quand il faisait ressortir sa haine. Il s'habillait toujours avec les t-shirt de groupe de rock et de métal de ses frères, avec des jeans slim noirs troués d'usure, et non pas fait par le fabriquant. Ses baskets avaient lâché, il avait dû en prendre d'autre, dans les habits qui restaient des anciens êtres vivants de la maison. Il n'en avait pas trouvé à sa taille et en avait donc des trop grandes, Maman refusait bien entendu d'en acheter. En hiver, sa période préférée, et bien la seule chose qu'il était sûr d'aimer, il portait de long pull blanc qui couvrait son cou avec des manches très larges, en dessous de la veste en cuir noir de l'un des jumeaux. Il s'arrangeait toujours pour qu'on ne voit jamais ses bras, été ou hiver, la veste en cuir était parfaite pour ça. Il savait aussi qu'il aimait les pulls. Ils permettaient de faire des gestes obscènes quand il en ressentait le besoin, sans que personne ne le sache, mais de cacher aussi les traits rouges sur ses bras, les tâches bleues de son dos, les ronds noirs brûlant.
Guillaume n'allait pas bien, vraiment pas. Mais il avait construit une si belle façade pour prouver le contraire au monde, que les professeurs n'y voyaient rien. À quelques exceptions près. Certains professeurs de français avaient bien mis des mots dans le carnet, s'inquiétant pour le pré-adolescent, mais Guillaume ne les avait jamais montré à Maman. Maman avait été claire: plus aucune plainte de l'école. Il s'était contenté de les signer en imitant la signature de Maman et de répondre un mot avec sa main gauche pour différencier l'écriture de la sienne. Il ne pouvait pas se permettre que Maman ait un autre prétexte pour le gronder. Si les professeurs de français, uniquement, s'était inquiété de son état, c'était parce que son échappatoire, son seul lieu de défouloir, où tristesse et haine se mélangeait, où ses problèmes apparaissaient, c'était ses copies d'expression écrites. Une fois en début de quatrième il avait marqué « La mort recueille la fleur de l'âme, avec le même désir que le jardinier qui l'a fait grandir. » pour le sujet suivant :Vous écrirez un texte racontant la fin des mémoires du jardinier. Le professeur avait bien tenté de lui demander pourquoi il avait écrit ça, même si ce n'était pas trop grave, mais Guillaume avait simplement répondu que ça lui était venu comme ça. Cela n'avait pas vraiment de valeur, mais le doute était permis sur le bien être de l'élève, après plusieurs copies du même genre. Aucune autre véritable preuve de son mal être n'aurait pus être décelé dans les autres matières, les professeurs suspicieux abandonnaient donc rapidement, les minces soupçons qu'ils avaient.
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Guillaume
Teen FictionGuillaume n'est ni gentil, ni méchant, il est lui. Il n'est pas l'enfant dont un parent rêve, mais pas non plus un vilain garnement. Guillaume est un enfant. Guillaume est innocent. Tout le monde trouve Guillaume un peu bizarre. Pour vous, Guillaume...