5/ La primaire

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Guillaume avait étonnement passé une année de CP très tranquille. Il était toujours très seul mais ne s'en souciait pas, faisait avec beaucoup d'application ses devoirs, et maintenant qu'il savait lire, feuilletait le dictionnaire avec entrain pour y découvrir des mots étranges et inconnus. Il aimait énormément l'école et toutes ses merveilleuses choses qu'il y apprenait. Certains élèves se souvenaient encore de l'incident en grande sections, mais n'en parlaient plus vraiment. Effectivement, Guillaume faisait maintenant très attention à ce qu'aucun enfant ne le voit jouer avec son ami, pas qu'il en ait honte loin de là, mais il ne voulait plus avoir à les affronter et à défendre son corbeau. Pour cela il fallut faire une douloureux compromis avec l'oiseau de jais. Ils ne devraient pas jouer ensemble trop longtemps, donc Guillaume devrait passer la récréation du midi seul et les petites récrés il pourrait les passer avec le corbeau. La mécanique mise en place, les élèves qui ne le connaissaient pas, le considéraient comme un enfant introverti et solitaire. Il passait inaperçu aux yeux de la plupart des adultes, mais cela ne le gênait pas encore. Le matin, il était accompagné par ses soeurs, et c'était généralement l'une des trois qui venait le chercher, devant faire un détour, elles rechignaient toutes à la tâche. Ces journées étaient en somme banales, sans être extraordinaire, elles n'étaient pas plate pour autant.

Si la vie de Guillaume, n'évoluait pas à l'école, de nombreux changements s'était effectués dans la maisonnée. Les deux grands frères ne venait plus très souvent les voir, mais les jumeaux étant toujours très tapageur, les remplacèrent rapidement pour faire leurs quotas de bêtise. Maman, elle, était de plus en plus irascible, elle s'énervait pour un rien, la vaisselle qui n'était pas faite ou un vêtement qui trainait. Mais maintenant, elle ne passait plus toutes ses journées dans sa chambre, elle avait trouvé un travail qui lui occupait tout son temps, si bien qu'elle rentrait tard, d'une humeur exécrable, criant sur ses enfants et Guillaume compris. Même s'il se faisait tout petit, le moindre prétexte était un sujet pour le disputer: s'il faisait trop de bruit quand il s'amusait dans sa chambre, sa dernière note en mathématique, le désordre du salon, ou encore qu'il se fasse oublier dans la maison pour échapper à une quelconque sentence, qu'il devait mériter, puisqu'il se cachait pour éviter Maman. Une fois, Maman avait hurlé tellement fort que Guillaume avait cru que l'immeuble allait s'effondrer, il s'était bouché les oreilles par réflexe. Maman s'était alors encore plus mise en colère et lui avait donné une fessé.

Si ces évènements étaient de plus en plus courant, ce n'était pas tout. Les triplés, qui avaient ignorées Guillaume jusque là, l'embêtaient. Au début, ce n'était que des taquineries un peu déplaisante, seulement des phrases dites dans la soirée, ou dans la cuisine "Tes cheveux sont longs dit donc, tu pourrais être une fille!" ou encore " T'es maigre! On dirait un squelette!". Ces plaisanteries de mauvais goût ne plaisaient pas à Guillaume mais il ne pouvait pas protester. En CE2, elles trouvèrent une nouvelle taquinerie bien pire. Guillaume avait les cheveux blonds, il était vrai, plutôt long, le carré arrivait en haut de ses épaules. Il était aussi très mince, si bien que l'on voyait ses côtes sans forcer. Il pouvait donc passer pour une fille. Ses soeurs trouvèrent donc bon de lui donner des surnoms féminins ou le traiter comme une fille, quand l'une des trois devait aller le chercher à l'école, devant tous ses camarades. Certains petits entendirent les moqueries des ainés, et pouffèrent. Les trois soeurs répétèrent ces moqueries si souvent que celle-ci s'étendirent au sein même de l'école. Guillaume n'appréciait pas, mais alors pas du tout, cette mauvaise blague.

Un jour, il le fit remarquer à une de ses soeurs, qui se braqua et lui cracha à la figure ces mots durs: "Tu n'as qu'à pas ressembler à une fille, petite!". Il n'insista plus, à la maison du moins. Guillaume n'avait pas vraiment remarqué ces moqueries distantes au début à l'école, mais on venait maintenant le voir en groupe pour demander s'il était vraiment une fille. Guillaume le prenait très mal et répondait toujours méchamment à cet humour. Il n'avait pas l'air tant d'une fille que ça et tous le savaient, alors pourquoi s'acharnaient-ils sur lui? Il ne leur avait rien fait et n'était jamais venu les embêter. En plus, leurs agissements ridicules empêchaient Guillaume et le corbeau de rester ensemble, car les importuns venaient sans cesse l'embêter. Et ce qui devait arriver arriva, un groupe de garçon venu le titiller le virent assis à côté de l'oiseau, tous deux en grande conversation, unilatérale, sur pourquoi certaines feuilles qui tombent en automne sont vertes et non pas rouges orangés. Ils l'entourèrent avec un sourire malicieux en coin. Par réflexe et souvenir il mit sa main devant l'oiseau pour le protéger. Les garçons ricanèrent, un brun au regard sournois dit:

GuillaumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant