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« We are such stuff

As dreams are made on, and our little life

Is rounded with a sleep. », Prospero, The Tempest, William Shakespeare.


                                                                                                                                                                                           I

Malaïka fit un bon et le rata. Elle atterrit sur ses genoux avec un large sourire, amusée par le défi. Rapidement, elle se releva et se mit à courir par le rattraper, obligée de sauter sur des lignes fines disparaissant et apparaissant sans prévenir. Elle escalada plusieurs plateformes, ne suivant désormais qu'une trace colorée. Elle l'avait perdu de vue mais traquait son empreinte de poésie, fine, subtile, suffisamment belle pour colorer le fond noir rempli de pièges. Il ne lui manquait plus que celui-là et après elle pourrait sortir.

Dans un réflexe presque surhumain, elle se courba pour éviter la corde qui passa au-dessus d'elle et elle roula dans les ténèbres sans distinguer le ravin qui l'attendait. Son corps commença à chavirer mais elle s'accrocha sur le rebord mou et, utilisant toute son imagination, elle réussit un immense saut en se soulevant à la force de ses poignets afin d'atteindre une nouvelle plateforme, essoufflée. La trace commençait à disparaître.

Malaïka ferma les yeux pour seulement tenter de l'entendre ou même de la voir derrière ses paupières. Le sceau lyrique se percevait encore dans le tombeau de ses cils et, ses pupilles toujours nappées noirs, elle continua sa quête, sautant, roulant, se courbant, courant guidée par la poudre vermeille qui possédait ses nerfs.

Plus les minutes passaient, plus elle mettait son esprit en danger, elle le savait, mais l'arôme du défi engourdissait toutes ses pensées et elle se sentait hantée par l'empreinte onirique qui enrobait désormais ses poumons. Les autres reposaient, sages et lumineuses, dans sa sacoche de cuir, elle ne pouvait pas abandonner si près du but, alors qu'il ne lui restait qu'une ultime rime à saisir.

Dans le dédale rêveur, elle finit par la trouver et put ouvrir ses yeux pour admirer ce joyau écarlate aux mille facettes, tremblant par sa fragile pureté. Des raies de lumières le parcouraient calmement et se diffusaient dans la cavité noire, l'illuminant de cercles nacrés tournoyant et chauds. Malaïka n'avait plus qu'un dernier petit effort à fournir. Patiemment, pour ne pas l'effrayer, pour ne pas risquer de l'abîmer par sa brusquerie, elle se recula puis, telle une flèche, elle décolla. Elle traversa l'air comme une simple ligne, rapide, presque dissolue dans les lueurs ivoiriennes et rondes, et elle se saisit du diamant rutilant.


Le plumage du prince paon ploie, alourdi

Des couleurs somptueuses, pédantes et vives

Qui prolongent son corps indigo et poli

Car de l'éclat sont nées ses manières avives.


Il fanfaronne, flatte, invite les oiseaux

Dans son nid fastueux serti de son duvet,

Un lit laineux où flânent les courtois corbeaux

Les cygnes innocents, les perruches lovées.


Monarque soleil et lune de la forêt

Ses nuances de majesté sculptent les raies

Les lèvres des rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant