Chapitre 9

1.1K 57 34
                                    

Le même schéma que la journée de la veille se répéta. Emma se réveilla, prépara le petit déjeuné pour ses enfants, but un café long mais sans sucre, réveilla ensuite son fils et sa fille avec énormément de tendresse et d'amour, les laissa déjeuner tranquillement, monta se préparer, glissa ses bagues à son annulaire gauche, les observa longuement pendant quelques secondes, termina de se préparer, redescendit pour débarrasser, fit rapidement la vaisselle, parlementa avec sa fille pour laisser Swan à la maison mais évidemment Alice gagna la discussion - comme d'habitude, et les déposa chez ses parents qui étaient plus que ravi de pouvoir passer du temps avec leurs deux petits enfants préférés. Ils étaient surtout leurs deux seuls petits enfants mais elle garda cette réflexion pour elle et conduisit tranquillement jusqu'au Granny's. Elle y commanda son éternel chocolat chaud à la cannelle ainsi qu'un Nespresso glacé au caramel avec tout un tas d'assortiment de viennoiserie. Une fois la commande payée, elle prit le chemin de son studio de photo où, aujourd'hui, elle y retrouva August qui l'attendait avec impatience mais surtout avec son éternel sourire. Ils s'assirent tous les deux autour de la table de la salle de pause et discutèrent de tout et de rien pendant de longues minutes. Emma aimait d'autant plus son ami - qu'elle considéraient plus comme un frère - pour ça, ils pouvaient parler pendant des heures de la pluie et du beau temps, du bulletin de météo, d'une photo prise par l'un ou par l'autre, de la couleur des chaussettes de Lilith qui étaient très rarement la même, de la clarté du ciel en journée ou de la brillance des étoiles la nuit. Ils pouvaient discuter de tout et n'importe quoi sans ne jamais s'ennuyer et surtout, ils ne manquaient jamais de sujet de discussion ! Il était exceptionnel et s'était d'ailleurs l'une des raisons qui l'avait poussée, plusieurs années plus tôt, à prendre la défense de celui qu'elle avait aimé surnommer pendant de longues années « le rouquin ».

Elle se rappelait de ce jour comme s'il s'était déroulé la veille. Une fois de plus, elle avait eu des problèmes avec le père de sa famille d'accueil. Encore un homme avec les mains bien trop baladeuse pour Emma qui, du haut de ses huit ans, n'avaient pas l'habitude de se laisser faire quel que soit la situation. Tard dans la nuit, alors que cet homme – qui se devait normalement de représenter une quelconque figure paternelle pour elle, une figure d'autorité – s'était glissée dans sa chambre alors qu'absolument tout le monde dormait à poing fermé dans la maison, elle n'avait pas hésité une seule seconde à lui asséner un magnifique coup de pied dans ses bijoux de famille avant de sauter de son lit, d'attraper son sac à dos qu'elle laissait toujours à côté de la porte de sa chambre pour être prête à toute éventualité possible et de partir le plus rapidement possible. Elle était passée dans le salon et avait trébuché sur les cadavres de bouteilles vides qui trainaient sur le plancher, l'homme était évidemment complètement saoul. Elle l'avait entendu descendre, difficilement, les escaliers et était partie en courant vers la cuisine pour sortir par la petite porte de la pièce, allez s'avoir pourquoi personne ne la fermait jamais. Elle avait couru aussi vite que ses petites jambes le lui permettaient, elle ne s'était pas arrêtée en entendant le père de la famille dans laquelle elle était placée l'appeler au loin, au contraire, elle avait redoublé d'effort pour fuir le plus loin possible que cet homme qui la dégoutait. Ella avait traversé le parc public puis emprunter plusieurs petites rues et, après de longues minutes de course effrénée, elle avait fini par le semer. Elle avait continué de courir encore quelques minutes pour être sûre d'être en paix et s'était finalement arrêté en se laissant lourdement tombé sur un banc, complètement essoufflé. Ses poumons la brulaient affreusement mais elle ne pouvait s'empêcher de sourire en repensant au coup qu'elle avait offert à cet abruti qui avait pensé pouvoir profiter d'elle sans en subir les conséquences. Elle n'était peut-être qu'une petite fille de huit ans mais elle savait un tant soit peu se défendre. Elle était restée de longues minutes sur ce banc, à reprendre son souffle, avant de reprendre sa route. Si elle avait bien appris une chose de ses nombreuses fugues c'est qu'il ne valait mieux pas rester trop longtemps au même endroit. Les pères de famille comme lui étaient plutôt déterminés à garder le chèque qu'ils recevaient chaque mois, elle savait que dans quelques heures elle aurait plusieurs patrouilles de policier à sa recherche alors autant mettre de la distance entre eux maintenant. Elle avait repris sa course à petite foulé, elle s'était enfoncée dans la nuit noire, elle avait traversé plusieurs rues de cette ville avant de se glisser à l'intérieur d'un immeuble, juste derrière l'une des habitantes. Elle avait attendu que la femme monte dans l'ascenseur pour se recroqueviller derrière les boites aux lettres pour y passer la nuit. Finalement, une nuit s'était transformé en deux nuits, puis trois et finalement quatre. Elle avait dormi quatre nuits dans cette entrée d'immeuble avant qu'on ne se rende compte de sa présence, évidement elle s'était enfuit avant que le concierge n'ait le temps d'appeler la police. Elle avait fui en courant le plus loin possible pour être certaine d'avoir la paix encore quelque temps mais malheureusement pour elle, les officiers avaient fini par la retrouver dans la journée alors qu'elle se baladait tranquillement dans les rues de la ville. Elle n'avait pas été ramené dans sa famille d'accueil, contre toute attente, les policiers l'avaient simplement déposé à l'orphelinat sans lui faire la morale, sans lui poser de question, sans ne rien dire. Les autres fois elle avait eu le doit à de vrai interrogatoire mais pas cette fois-ci. Devant la porte de l'orphelinat, elle avait hésité à repartir en courant, elle n'avait aucune envie de retourner en foyer, mais avant qu'elle n'ait eu le temps de faire un quelconque mouvement, elle avait senti une main attraper son épaule et la forcer à avancer. Elle avait été emmenée dans le bureau de la directrice qui lui avait évidemment passé un réel savon. Elle l'avait écouté sans ne rien dire, après tout que pouvait-elle dire ? « Le père de ma famille d'accueil s'est glissé dans ma chambre alors je me suis défendu comme j'ai pu » ? Qui aurait cru une gamine de huit ans ? Qui l'aurait cru en sa parole ? Absolument personne. Alors elle n'avait rien dit, elle avait écouté la vielle femme en fixant le sol qui était drôlement sale. Après de longue minute à se faire engueule, elle avait enfin eu le droit de sortir pour regagner sa chambre, chambre qu'elle partageait avec des personnes dont elle ne connaissait absolument rien et qu'elle n'avait pas non plus envie de connaitre. Elle était alors descendue au rez-de-chaussée pour apprivoiser se nouvel endroit dans lequel elle allait devoir passer les jours à venir avant de mettre un plan au point pour s'enfuir loin. Le plus loin possible. Alors qu'elle était en train d'observer la cour pour juger si elle pouvait s'enfuir par là pendant une nuit, elle s'était rendue compte qu'un groupe de minable était entassé les uns sur les autres en cercle. Comme s'ils cherchaient à encercler quelqu'un ou quelque chose. Elle s'était approchée du petit groupe, curieuse de comprendre ce qui était en train de se passer. Elle avait alors aperçu un gamin, qui devait avoir à peu près son âge même s'il semblait être légèrement plus petit qu'elle, recroquevillé au sol. Son sang n'avait fait qu'un tour dans ses veines, elle avait remonté ses manches et interpelée les adolescents qui se trouvaient autour de l'enfant roux. Avant qu'ils aient le temps de dire quoi que ce soit, elle en avait frappé un avec son sac à dos, un autre avec un violent coup de poing dans la mâchoire, un autre avec un coup de pied dans les parties. Les deux autres qui se tenaient toujours debout avaient simplement reculé de plusieurs pas avant de partir avec leurs potes. Elle avait remis son sac correctement sur son dos et avait tendu la main au garçon qui était toujours au sol. Celui-ci, apeuré, s'était relevé et l'avait regardé de haut en bas, elle avait détesté sentir son regard l'observer de haut en bas mais elle n'avait rien dit, elle lui avait doucement sourit et lui avait simplement demandé si tout allait bien. S'il n'avait rien de cassé. Il avait légèrement paniqué et lui avait demandé si elle n'allait pas le frapper ce à quoi elle avait répondu qu'elle ne pouvait pas frapper son ami le rouquin. Le petit roux avait froncé de sourcil et elle, elle avait simplement haussé des épaules. Ils s'étaient regardés dans les blancs des yeux avant d'être intrigué par le bruit d'un appareil photo au loin. Ils s'étaient retournés et avaient aperçu une jeune brune qui devait, elle aussi, avoir leur âge. Emma et le roux s'étaient regardé, ne comprenant pas pourquoi cette inconnue les prenait soudainement en photo, et, finalement, en un hochement de tête, ils s'étaient mis d'accord pour lui courir après.

Un doux sourire naquit sur les lèvres de la blonde à ce souvenir. Si aujourd'hui, quelqu'un lui avait dit, que ses deux meilleurs amis seraient se rouquin sans défense et cette stupide brune qui les avait pris en photo, et bien elle aurait beaucoup ri. Mais vraiment beaucoup.

Son amitié avec Lilith et August lui était apparu telle une évidence. Elle avait eu du mal au début, elle n'était pas habituée à avoir des amis ni à rester bien longtemps au même endroit. Elle avait commencé par les repousser tous les deux avant de finalement, leur ouvrir son cœur déjà bien balafré par la vie. Un jour, dans l'une de ses familles d'accueil, la mère de la famille lui avait assuré qu'un jour elle rencontrerait des personnes et qu'elle saurait, elle saurait qu'ils seraient l'amour de sa vie, ses âmes sœurs mais en amitié. Et cette femme avait vu juste, elle avait eu raison, Emma l'avait senti dans son cœur. Aujourd'hui encore, ils étaient tous les deux l'amour de sa vie, ils étaient tous les deux ses âmes sœurs, ils étaient une part très importante de sa vie. Elle le savait, elle ne rencontrerait jamais d'autre personne comme ses deux-là. Elle l'avait toujours su. C'était l'une des raisons qui l'avait poussé, le jour de l'anniversaire d'August, à retourner dans cet orphelinat – dans lequel elle était resté cinq longues années et duquel elle avait fermement refusé de partir – pour les retrouver. Les retrouvailles avaient été empreintes de larmes de joies, convaincre ses deux amies n'avaient pas été une chose très compliquée à faire. Elle les avait soudoyés avec un travail, un toit sur la tête et de quoi manger à leur faim, ils n'avaient évidemment pas été assez fou pour refuser une telle offre. Ils étaient revenus, tous les trois à StoryBrooke. Au départ, ils avaient tous les trois vécus chez Ingrid et Marco qui étaient ravis d'avoir autant de monde à la maison, eux qui avaient toujours voulu avoir une très grande famille à aimer avaient été pour le coup, les plus heureux du monde entier. Emma avait fini par prendre un appartement avec Regina alors August et Lilith s'étaient mis en colocation au plus grand damne de Marco et Ingrid. Finalement, tous les trois, avec toutes leurs économies, ils avaient réussi à racheter, à retaper et à ouvrir un studio photo en plein centre de la petite ville portuaire. Nombreux étaient ceux qui avaient tenté de les décourager, de les convaincre qu'ils ne réussiraient jamais et qu'ils ne pourraient jamais vivre de leur passion mais avec du courage, de l'ambition et beaucoup patience, ils leur avaient démontré le contraire, ils y étaient parvenus. Ils avaient réussi, tous les trois, ensemble. Il leur avait fallu énormément de temps et de patience mais ils avaient réalisé leur rêve. Ils avaient ouvert leur studio photo et aujourd'hui, des centaines de personnes venant d'autres villes faisaient le déplacement pour une simple scène photo que n'importe quel photographe pourrait faire. Elle repensa au parcours qu'ils avaient tous les trois eut, au chemin qu'ils avaient parcouru seul puis ensemble, et elle se sentait tellement fière. Beaucoup d'orphelin finissait mal, souvent très mal, mais eux, ils avaient su se relever, s'entraider, combattre et avancer. Ils avaient réussi à devenir quelqu'un dans la vie, ils étaient devenus de bonnes personnes malgré toutes les épreuves qu'ils avaient dû surmonter.

Complètement perdu dans ses pensées, elle n'entendit pas le tintement de la porte d'entrée de son studio, ni même August qui répétait encore et encore son prénom. Elle n'entendit pas non plus la porte à côté d'elle s'ouvrir ni les pas qui s'approchèrent pourtant bruyamment. Elle était dans son monde, dans sa bulle. Elle sursauta en poussant un léger cri en sentant une main se poser sur son épaule, elle sauta de son tabouret et se posta en face du nouvel arrivant qui venait de la surprendre. Les battements frénétiques de son cœur se calmèrent en constatant que ce n'était que David et un doux sourire étira ses lèvres. Elle soupira doucement et le prit dans ses bras avant de le laisser s'installer. Elle ferma la porte à clé, elle savait bien que le blond n'avait aucune envie de se faire surprendre pendant leur entrevu qui devait rester le plus secrète possible, puis elle lança une playlist qu'elle avait faite exprès pour le moment.

« Allez, on fait voler la veste monsieur le sheriff de StoryBrooke. » Plaisanta-t-elle en s'approchant tranquillement de lui.

David leva les yeux au ciel malgré son sourire, il déposa sa veste un peu plus loin, étira sa cravate et fit sauter plusieurs boutons de sa chemise pour être plus à l'aise. Il attrapa délicatement la main d'Emma, l'attira à lui en souriant un peu plus avant de fermer les yeux et de se laisser entièrement aller.

Six ans d'absence. [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant