CHAPITRE 4

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CHAPITRE 4
M

ERCIE
Il me serre le poignet si fort que je ne sens plus le sang qui afflue jusqu’au bout de mes doigts. Et ses yeux sont empreints d’une fureur qui me laisse sans voix. Ça tombe bien, car lui serre les mâchoires si fort que je peux sentir le grincement de ses dents jusque sur les miennes. Si, si je suis formelle. Je distingue à peine que ses frères se placent derrière lui et que l’un d’eux a capturé Tina qui hurle comme une sauvage. On peut dire que nos réactions sont aux antipodes.
– Non, mais ça va pas bien. Lâche-moi sale brute épaisse d’écossais qui nous fait chier.
Je crois qu’elle a assez bien résumé le fond de sa pensée en quelques mots. Parce que les highlanders, ils nous les brisent grave aujourd’hui. D’abord toujours sur ma route et ensuite à me kidnapper, voilà autre chose.
– Qu’est-ce que vous foutez là ?
Ah tiens, Men in Kilt numéro 4 daigne enfin desserrer les crocs. Ben ce n’est pas trop tôt.
– Où ? Ici, sous cette tente ? Là où j’ai installé tout le repas de mariage de mon frère ? Au mariage que j’ai organisé de A à Z ? Ben je viens voir que personne ne foute le bordel et visiblement j’ai été inspiré. Mais toi, vous…
Je tente de lui parler avec autant de mépris que lui, mais ses horribles yeux verts de manga japonais qui mangent tout son visage me déstabilisent beaucoup. Beaucoup trop.
– … qu’est-ce que vous foutez ici ? Je jure que si vous avez touché au plan de table, Nora va vous étriper et…
Il plaque une main rugueuse et immense sur ma bouche et me soulève pour m’entraîner dans un coin. Et évidemment Men In Kilt numéro 2 ferme la tente derrière nous. Tina a mordu numéro 1. Bien fait pour lui. Je devrais faire pareil. Sauf que je ne peux pas. Il me tient si fermement que je peux à peine respirer. Tout à coup, alors que je sens ses cuisses qui frôlent les miennes à travers le tissu de ma jupe longue, il s’immobilise. Puis me repose au sol. Il me fait signe de me taire d’un doigt sur sa bouche et desserre enfin l’étau formé par son énorme paluche. Mon rouge à lèvres a laissé une trace rouge au creux de sa paume. Bien fait pour lui, c’est un longue tenue !
– Chut.
– Non, mais ça va pas bien dans ta tronche. Je veux savoir ce que vous foutez là. Sinon je hurle.
– Si tu fais ça, on t’assomme.
Tina éclate de rire alors que numéro 2 me surprend avec sa pique à demi-menaçante.
– Mon pauvre vieux. Si tu la touches Jamsi, il va pas être content. Mais genre pas du tout, du tout. Il n’aime pas qu’on embête sa petite sœur. Et je sais pas si t’as une bonne vue, mais il est du genre pas commode le frangin, si tu vois ce que je veux dire. Et puis, entre nous, la témoin qui disparaît avant de passer à table, ça ne se fait pas dans un mariage. Alors même si vous m’avez tout l’air d’un boys band des années 90, et que vous avez les manières d’homme des cavernes du Neandertal, je vous le déconseille. Parce que quand il se fâche le géant, même Nora, elle n’en mène pas large.
– Tina, ne parle pas de James comme ça.
Je déteste quand elle dit du mal de mon frère. Je déteste quand qui que ce soit dit du mal de mon frère. J’exècre ça même. N’empêche que le béotien me lâche la grappe. Et j’en profite pour remettre de l’ordre dans ma tenue et lisser ma jupe. Heureusement après un rapide coup d’œil, ils ne semblent avoir touché à rien. Enfin en apparence. Parce que quand je m’approche de la table sur laquelle est servi le Penny Wedding, je remarque que toute la disposition des plats a changé. Je m’explique. Nora a absolument tenu à mettre le paquet sur le gâteau de mariage, du coup, elle a demandé, comme cela se fait beaucoup en Écosse, que chaque invité apporte de quoi manger et les mariés ont fait appel à un pâtissier de renom pour la touche finale de la soirée. Et c’est moi qui suis personnellement venue superviser l’installation de tous les mets cet après-midi, avant la cérémonie. Et d’abord il n’y avait pas autant de plats, mais surtout, il n’y avait pas ceux-là.
– Attends, attends, c’est quoi ce bordel ? Ils sortent d’où tous ces plats ?
– C’est nous. On a voulu faire une surprise à notre petite sœur adorée.
Ça a beau être le plus gentil de tous qui me fait une courbette tout en arrangeant le buffet, j’ai un mauvais pressentiment. Oh Nora ne va pas du tout apprécier que quelqu’un se soit mêlé de son organisation de mariage. Mais après tout, ils vont se débrouiller entre eux les Highlanders. Puisque visiblement ils n’aiment pas les étrangers.
Aussi, je tourne les talons, agrippe le bras de mon amie et m’enfuis à toute vitesse. Autant que me le permettent mes talons avec lesquels je ne suis pas à l’aise sur cette herbe fraîche. Mais manque de bol, numéro 4 nous barre le passage avant qu’on atteigne la toile de tente pour nous échapper.
– Pas si vite Lass !
Il croise les bras sur son torse et je vois ses pectoraux qui se dressent devant moi. Sympa la vue. S’il n’était pas si arrogant et si désagréable, il ne serait pas mal en fait. Plus que pas mal d’ailleurs. Avec ses avant-bras musclés, ses mollets bien taillés et ses cheveux ébouriffés. Le seul bémol, ce sont ses yeux verts. J’aime les hommes au regard sombre, pas les perfides regards de vipères. Non vraiment il n’est pas du tout, du tout mon genre celui-là. Alors pourquoi ses tétons m’attirent tout d’un coup. Et puis c’est quoi cette fixation sur ses pointes dressées ? Oh et voilà que les miens s’y mettent. Mince, mince, mince, j’ai pas de soutif avec cette dentelle. J’aurais dû écouter Tina. Toujours mettre des protections de nipples. Toujours !
Voilà qu’il lorgne mes boobs maintenant !
– Si tu m’empêches de passer, je hurle si fort que même ton arrière arrière arrière grand-père m’entendra depuis Culloden, compris ?
Il lève un sourcil et serre à nouveau les mâchoires. Pas vraiment décidé à me laisser passer. Tina fait les yeux doux à numéro 3, le seul qui soit à peu près civilisé dans cette famille de cinglés. Je ne peux donc pas compter sur elle.
– Tout doux Lass. Tu ne répètes à personne ce que tu as vu ici et nous on se charge de Nora. OK ?
Il veut jouer les gros durs, mais moi j’ai James dans mon équipe et même s’il n’a rien dit, je sais bien qu’il n’a pas envie de se frotter à lui. Personne n’en a envie. Et Nora a forcément dû parler de son futur mari à sa famille. Ils savent donc qu’il vaut mieux ne pas s’attirer les foudres de mon frère.
– Laisse-moi passer sinon à trois je hurle.
Il croise les bras encore plus fort et ses pecs se gonflent encore plus. Mais toujours aucun mouvement qui indiquerait qu’il cède. Son clan se rapproche et Tina tire sur ma main.
– Mercie, je crois qu’on devrait peut-être, enfin, tu vois…
– Non, ils vont nous laisser passer et tout le monde retournera vaquer à ses occupations tranquillement. Eux resteront à comploter contre je ne sais qui et nous on va aller picoler pour oublier que nos chemins se sont un jour croisés. Compris le béotien ?
Je lève un sourcil vers numéro 4 qui ne me quitte plus des yeux, une lueur malicieuse insupportable venant de faire son apparition dans ses iris. Tiens quand je l’insulte, ça le fait marrer.
– Si vous voulez sortir d’ici les filles, le mieux est de promettre de ne rien dire.
Finalement numéro 3 qui paraissait sympa l’est moins maintenant que lui aussi nous menace.
– OK, promis !
Tina balance sa promesse et quand les forcenés la laissent passer, elle me fait un clin d’œil. Évidemment, numéro 4 me barre toujours le passage et maintenant je suis seule face à eux. Et l’étau est de plus en plus serré autour de moi. Je sens la présence de numéro 1 et numéro 2 derrière moi, et même le sourire de numéro 3 ne suffit pas à me faire oublier que numéro 4 me reluque sans la moindre discrétion.
– Je ne promettrais rien, pas la peine de me regarder comme ça. Vous avez été élevé où sans déconner ?
Bon je fais la maline, mais je ne me sens pas vraiment en bonne posture non plus. Et si je calmais un peu le jeu.
– Ici sur les terres de nos ancêtres. Et nous on ne se prend pas pour des bobos londoniens. On est fier de nos racines. Alors baisse d’un ton Sassenach.
– Toi baisse d’un ton. Et foutez-moi la paix.
Je me dégage et tente de leur échapper quand je sens à nouveau les mains rugueuses de l’ours des Highlands qui me lacère les bras.
– Mais c’est quoi ce bordel ? Lâche ma sœur toute de suite espèce de sale…
Dieu merci Tina est allée chercher du renfort et James est venu à ma rescousse. Immédiatement numéro 4 abandonne son entreprise et je cours me cacher derrière mon grand frère.
– Fais-moi penser à ne jamais, plus jamais inviter la famille de tarés de ta femme.
James toujours aussi loquace ne dit pas un mot, mais me sourit.
Numéro 1 intervient.
– James enchanté, je suis Logan, le frère aîné de Nora. Nous sommes très heureux de faire ta connaissance.
Il lui tend une main, mais mon bourru de frangin de cille pas.
– Qu’est-ce que vous avez fait à ma sœur ?
Logan, puisque c’est son nom me sourit et semble s’amuser de la situation. Un bon comédien, car il ne semblait pas avoir envie de rire il y a une minute.
– Oh ça, nous faisions juste connaissance.
– Ouais ben vous faites connaissance avec qui vous voulez, mais vous laissez ma sœur tranquille, compris ? Sinon vous allez avoir des problèmes.
On dirait bien que le regard de Logan est plus sombre maintenant.
– Ah vous voilà tous ! Mais qu’est-ce que vous faites ici ? Tout le monde vous cherche dehors. Mais attends qu’est-ce que…
Nora qui vient de débarquer elle aussi sous la toile de tente supposée rester secrète à tous les invités, mais dans laquelle le va-et-vient est incessant depuis tout à l’heure, se stoppe net voyant mon frère face au sien. Logan force la main de mon frère à serrer la sienne.
– Comme je le disais à ton mari, nous faisons connaissance.
Il parle d’un ton haut perché et impose le respect. Je comprends que ça soit lui le chef à présent. Un charisme se dégage de lui et sa taille généreuse lui va comme un gant à cet instant. Cependant, James ne s’est jamais laissé impressionner par personne et j’aurais pu me douter que ça n’allait pas commencer ce soir.
– Et j’étais en train de mettre en garde tes frères de laisser Mercie tranquille et de se tenir éloigné d’elle.
Ah dans ta gueule numéro 4, tu fais moins le malin là ! Putain, je suis super fière de mon James chéri, super méga giga fière. Putain, il en jette grave !
Nora qui devait s’attendre à ce genre de scène arbore son plus grand sourire.
– Et bien puisque les présentations sont faites, merci de bien vouloir vous mêler à la fête à présent. Chéri, tu viens ?
Elle tend la main vers James qui la saisit tout ne lâchant pas la mienne et en m’entraînant à sa suite. Je cours pour suivre la cadence, mais il se rapproche de mon oreille.
– Tu restes près de moi et ils ne t’emmerderont plus. Dac Sista ?
Ah un sourire, enfin.

 

A Scottish Wedding Disaster ( Sous Contrat D'edition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant