CHAPITRE 17

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M

ERCIE
– C’est pas mal ton infusion de fillette Blanche neige, mais t’aurais pas un truc un peu plus fort pour mélanger avec ?
Il secoue sa tasse et en observe le fond.
– Tu veux du sucre, du lait, un peu de cannelle ?
Il pince ses lèvres.
– Je pensais plus à du whisky.
Ben tiens, pourquoi je n’y ai pas pensé plus tôt.
– Et alcolo avec ça. Dis donc t’es le mec idéal toi.
Il se gratte la tête et grimace.
– À peu près autant que toi la meilleure hôtesse d’Écosse.
Il tente de s’étirer, mais je vois bien qu’il souffre.
– Tu veux aller t’allonger un peu ? Je peux te montrer ta chambre si tu veux ?
Je crois bien qu’il tente de lever les sourcils, mais il est tellement défiguré que l’effet ne se voit pas. Je le plains et quelque part, ce beau visage entièrement défiguré, c’est une catastrophe. Même si cela me permet de garder mon calme face à lui. Si je en le touche pas, je devrais tenir le coup et résister à ses pulsions de dingue qu’il m’inspire.
– Ma chambre ? Notre chambre tu veux dire ?
Je hoche la tête par la négative.
– Si on veut qu’ils croient à notre couple. Et on le veut tous les deux, crois-moi. Il faut vraiment être un couple. Et donc je te confirme que je dors dans ton lit ce soir.
– Non, non, non, non, non, j’ai pas accepté ça.
Je récupère mon téléphone sur la table, ferme l’écran de mon ordinateur sur lequel j’étais en train de trier mes mails et j’appelle Logan immédiatement.
– Logan, il veut dormir dans mon lit, pas question. J’ai pas accepté ça.
Il rigole à l’autre bout du fil.
– Je m’étonnais que vous n’ayez pas encore commencé à vous entretuer. Tu comprends pourquoi j’étais content de me débarrasser de lui maintenant ?
– Oui ben merci du cadeau.
Jack semble rire de la situation.
– Mercie, Mercie, Mercie. Il a raison. Ce n’est pas parce que tu ne vois pas les gens qui vous surveillent, qu’ils ne sont pas là. Alors oui, tu vas dormir avec lui, tu vas laisser la porte de la salle de bains ouverte quand tu prendras ta douche et tu vas te blottir contre son superbe corps sur le canapé le soir au coin du feu.
– Superbe tu rigoles ? Il ressemble au monstre de Frankenstein ton frère.
Tiens, il rigole moins le criminel. Son frère en revanche hurle dans le combiné. Puis il se racle la gorge et reprend.
– Tu sais, même dans cet état, je connais une bonne centaine de nanas qui aimeraient être à ta place. Jackie est un peu le tombeur de ses dames dans le coin. Alors savoure. Et puis s’il n’est pas en forme, je pourrais toujours sauver l’honneur de notre famille la prochaine fois que je te croise.
Je détache le téléphone de mon oreille et l’observe un moment, atterrée par ce que je viens d’entendre. Il me propose bien ce que je crois qu’il me propose ? Non, mais cette famille est une véritable calamité.
Jack se penche près de mon oreille et chuchote.
– C’est le pire d’entre nous. Tu devrais raccrocher. Je suis certain de pouvoir te faire changer d’avis.
Sa voix suave et chaude m’électrise sans même qu’il ne me touche. Son regard croise le mien à peine une fraction de seconde, mais c’est déjà bien assez pour que je n’écoute plus Logan. Jack soulève son sac et quitte la pièce, se dirigeant droit vers ma chambre qu’il a dû repérer en faisant une inspection minutieuse à son arrivée. Il faut dire que mon Cottage, ce n’est pas un palace non plus, il n’y a que deux chambres, et mon bureau est installé dans le salon.
– Allo, tu m’écoutes ???
Ah oui, mince, le Men In Kilt N° 1, je l’avais oublié.
– Hum, hum.
– Ne laisse pas Jack te déstabiliser. Suis le plan et tout se passera bien. Par contre, la livraison arrivera demain matin. Alors soyez sages ce soir.
Son intonation est répugnante. Je m’apprête à raccrocher quand il me file froid dans le dos une nouvelle fois.
– Et ne me rappelle plus. S’ils n’y croient pas, tu mourras la première, sois-en sûre.
Tout à coup le Highlander qui s’installe dans ma chambre à coucher me manque. Je vais le rejoindre. L’idée qu’il veille à mes côtés ne me dérange plus autant. Et même si j’essaie de me convaincre qu’il ne me plaît pas, je sens bien au fond de moi que le désir charnel rôde dans l’ombre, attendant la moindre faiblesse pour s’insinuer sous ma peau. Comme l’autre jour dans la rue. Et tout à l’heure quand j’ai cru qu’il poserait sa main sur ma joue quand il susurrait tout près de moi.
– Il t’a foutu la trouille, hein ? Je t’avais prévenu que c’était le pire. Logan aime cultiver la terreur, aussi bien dans son boulot que dans sa vie perso. C’est agaçant, t’as même pas idée.
Pendant qu’il me parle, je le vois déballer ses quelques fringues et les entasser dans mes placards sur mes propres vêtements avant de refermer mon armoire.
– Dis donc, je suis inquiet, il y a plus de couvertures dans cette maison que dans un igloo au Groenland. T’as pas le chauffage ?
Sa remarque me fait rire parce que James me le répète tout le temps aussi. Il me manque tellement à cet instant.
– Si, j’ai une cheminée qui chauffe la maison, mais je suis frileuse.
– Pas d’inquiétude Blanche Neige, je suis une vraie bouillotte. Tu n’auras pas besoin de ces horreurs pour dormir avec moi.
Il affiche un sourire provocant qui, je dois bien le reconnaître, lui va comme un gant, exception faite de ses bleus aux yeux. Cela dit, dans la panoplie du bad boy, on est au top niveau-là. Si je l’avais croisé au lycée, j’aurais sûrement fait encore plus de bêtises.
Cette idée me file un frisson d’ailleurs.
– Je t’imagine plus, juste avec ça.
Il se tourne vers moi, visiblement satisfait de sa trouvaille. Ma nuisette longue en satin noir et décolleté dentelle que Tina m’a offerte pour Noël. Que je n’ai jamais porté. Et que je n’ai pas l’intention d’enfiler, ni ce soir, ni jamais. Il doit encore y avoir l’étiquette dessus.
– Puisqu’elle te plaît tant, je te l’offre. Tu seras peut-être un peu serré dedans. Mais après tout, chacun ses goûts.
Je le vois rire et secouer la tête penchée sur son sac. Il en sort un livre et s’assoit sur le bord du lit pour ôter ses chaussures. L’exercice semble difficile. À chaque fois qu’il tente de se plier en deux pour délasser ses Doc Martins, il hurle de douleur.
– Tu pourrais m’aider Blanche Neige ?
Il demande gentiment et de toute façon, l’entendre gémir est une torture pour mes oreilles. Alors je me penche et lui prête main-forte. Alors que je suis en train de m’attaquer à la seconde, il sourit et penche sa tête en arrière.
– Qu’est-ce qui te fait rire ?
– Ben j’imagine que ceux qui nous observent pensent que tu me tailles une pipe dans cette position.
– Quoi ?
Je m’écarte prête à me redresser et il pose ses mains sur mes cheveux pour que je reste en place. Là, c’est encore plus suggestif.
– Reste calme, j’ai une réputation à tenir moi. Je peux pas avoir éjaculé en 20 secondes.
De mieux en mieux. Moi, la nana qui ai été harcelée enfant, qui ai été traumatisé par la violence des rumeurs et des commérages, me voilà en train de faire semblant de sucer un criminel. Je n’arrive même pas à y croire. Je sens que des larmes se forment au coin de mes yeux et toutes mes angoisses ressurgissent, prêtes à me dévorer de l’intérieur.
Jack tire sur mes cheveux pour plonger ses yeux dans les miens et un éclair passe dans son regard. Il force pour que je me redresse et d’un geste souple, vient coller mon corps contre le sien qui s’allonge sur le lit. Nous avons tous les deux les jambes dans le vide, mais nos corps sont allongés l’un contre l’autre en travers du lit. Son visage reposant sur le matelas, observant le mien en reflet.
– Qu’est-ce qui se passe Blanche Neige ?
Je renifle pour ne pas déverser mon trop-plein sur lui.
– Arrête de m’appeler comme ça.
– Pourtant ça te va plutôt bien, je trouve.
– Pas moi, alors arrête.
– À une condition. Dis-moi pourquoi tu as peur.
Je ferme mes yeux, repoussant mes souvenirs cauchemardesques aussi loin que je peux et il pose sa main chaude sur ma joue.
– Respire Mercie, tout va bien. Il faut qu’ils y croient, c’est important, tu comprends ? Je ne vais pas abuser de toi si c’est ça qui te fait peur. Je ne suis pas désespéré à ce point, loin de là.
Je n’arrive pas à affronter son regard, je suis au bord des larmes. Je revois tous ces visages qui savaient, qui en parlaient et qui m’ont poussé au point d’avoir envie d’en mourir. Je me souviens de tout. Et ça ne peut pas recommencer. Je n’y survivrais pas.
– Je n’ai pas peur de toi, mais de moi. De ce que les gens peuvent détruire au fond de moi.
Je suis à bout de souffle et il se rapproche encore, puis sans que je ne m’y attende, dépose un baiser sur mon front.
– Personne ne te touchera. Je suis là. Sans aucune arme pour nous défendre, mais je suis là.
Il n’a pas pu s’en empêcher, il fallait qu’il me balance une pique. Et il a bien fait, je crois. Parce que ça m’a permis de respirer à nouveau. Et surtout de trouver le courage d’affronter ses immenses yeux aux couleurs de l’orage. Qui me rassurent bien plus qu’ils ne m’effraient à présent.

 

A Scottish Wedding Disaster ( Sous Contrat D'edition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant