25- Souvenirs :

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Une fois fait tous les soldats redescendent et enfourchent leurs montures. Nous parcourons ainsi plusieurs bornes sans nous arrêter, tous nos sens aux aguets prêts à réagir à la moindre silhouette monstrueuse. Lorsque l'heure de déjeuner arrive enfin nous faisons une halte afin de laisser nos chevaux reprendre des forces et manger tranquillement. Les soldats quant à eux marchent autour du camps pour ramasser çà et là des fruits ou encore pour les plus chanceux, trouver du bétail dans les bois d'à côté. Je m'approche de Sasha et Conny qui discutent de l'endroit où ils vivaient avant de rejoindre les rangs du bataillon d'exploration.

- Alala ma maison me manque parfois, j'espère aussi qu'ils arrivent à s'en sortir. Soupire Sasha.

- Ou vivais-tu? Demandais je en prenant un sceau pour aller le remplir à la rivière.

- Dans l'enceinte du mur Maria. Ma famille possédait une petite maison dans les bois. C'était vraiment l'endroit idéal pour chasser. Fit -elle en m'imitant.

Nous commençons à marcher vers la rivière en silence puis Sasha poursuit:

- Lorsque l'on a appris que le mur était envahi nous avons paniqués. Notre père essayait de faire monter tout le monde dans la charrette sans perdre de temps. J'ai dû prendre un cheval à côté et l'une de mes sœurs avec. Nous avions chevauché sans relâche puis quelques soldats de la garnison nous ont fait monter par dessus le mur. C'est là que tout a mal tourné. Elle s'interrompt la voix pleine d'émotion, le regard hanté par ces souvenirs.

- Comme la plupart des gens nous nous sommes retrouvés à la rue, à errer dans les bas fonds. Comme la forêt dans le mur Rose est moins grande, nous n'avions pas pu nous y installer. Chacun de nous devait trouver un travail qui nous permettrait d'avoir à manger. Mais cela ne suffisait pas l'hiver est arrivée et j'ai perdu l'un de mes frères. Il avait deux ans. Le froid faisait des ravages et je ne pouvais pas supporter de voir ma famille mourir de faim alors le jour où des soldats sont venus annoncer qu'ils cherchaient de nouvelles recrues, j'ai sauté sur l'occasion.

- C'est très courageux de ta part. Ta famille a réussit à s'en sortir? Demandais-je.

Sasha baissa honteusement la tête le regard fuyant.

- Je ne sais pas si courageuse est le terme exact pour me décrire... Tu vas me trouver lâche mais si je suis partie ce n'est pas uniquement pour ramener de l'argent à ma famille. Je... c'était l'occasion rêvée de ne plus avoir à être confrontée à la peur et à la misère. Je ne supportais plus de voir les corps affamés de ma famille entassés dans un coin de la rue grelottant de froid. J'ai fuis lâchement pour aller dans un endroit où je peux manger à ma faim, j'ai un vrai lit et même accès à une douche.

Elle se tait tandis qu'une larme roule sur sa joue. Je pose le sceau à côté de moi et mets mes mains sur ses épaules pour la forcer à me regarder. Je suis touchée par son histoire et ne peux m'empêcher de repenser au choix égoïste qui m'a poussée jusqu'ici.

- Tu n'es pas une lâche. Il est normal que tu aies choisis cette option. Parfois il faut savoir être égoïste et surtout ne vas pas imaginer qu'ils éprouvent de la rancune à ton égard. Après tout tu es leurs fille et tu as choisis d'aller travailler pour leur ramener de l'argent. Cet acte est loin d'être égoïste.

- J'ai quand même la chance de m'endormir le ventre plein dans de chaudes couvertures moi.

- Peut-être mais crois-tu vraiment qu'ici tout le monde envoie l'argent qu'il gagne à sa famille? La réponse est simple c'est non. T'ont-ils donnés des nouvelles?

- Oui. Commence-t-elle timidement. Avec l'argent que je leurs envoie ils ont pu se trouver une chambre dans une auberge en attendant de trouver une petite maison avec des champs. Mon père a lui aussi trouvé un travail et ma mère reçoit de temps en temps de petites pièces qu'elle raccommode.

La princesse du bataillonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant