Diva

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        Jaskier avait des millions de milliards d'étoiles qui brillaient dans ses yeux ébahis. Il ne savait pas si la sorcellerie utilisée dans cet endroit était la même qui faisait fonctionner ce que Geralt appelait « télé » mais il adorait déjà les mastodontes aux quatre coins de la pièce qui produisaient de la musique à profusion. Lorsque le blond lui avait demandé s'il se rappelait qu'il devait chanter dans une boîte réputée, il l'avait pris pour un fou et, même maintenant, il trouvait ce nom étrange pour un lieu si fantastique.

-Désolé pour l'attente, fit Geralt avec deux verres d'une forme étrange à la main.

Le barde accepta le breuvage orangée même s'il n'avait aucune idée de l'utilité du serpenteau bleu entortillé dans le liquide. Pour ne pas paraître plus étrange encore, il attendit que le rockeur boive et comprit que la chose servait à apporter la boisson jusqu'à sa bouche.

-Pourquoi on ne boit pas directement ? Marmonna-t-il en suivant des yeux les loopings de la paille.

-C'est plus drôle comme ça, Répondit Geralt en sirotant son cocktail, ne boit pas trop, je ne voudrais pas que tu vomisses sur le public encore une fois.

Jaskier ne porta pas attention à ces accusations, trop émerveillé par ce qui lui emplissait la bouche. C'était légèrement brûlant, doux et goûteux à la fois. Cela n'avait rien avoir avec la gnôle qui dévastait le gosier et débouchait nez comme oreille dans son monde. Il soupira de contentement et aspira à nouveau le délicieux jus sous le regard amusé de Geralt.

-Au fait, tu t'es enfin décidé ? Ce sera S.O.B ou Glitter and gold?

Cette question lui assécha tant la gorge qu'il dû aspirer à nouveau le cocktail pendant plus d'une minute. Il pensait même que le blond abandonnerait l'idée d'avoir un jour une réponse en laissant le temps s'écouler mais la sensation qu'il ne le lâcherai pas si facilement le poussa à réfléchir à un plan. Soit, il piochait au hasard entre les deux titres qu'il supposait être ceux de chansons, soit il s'enfuyait et se cachait dans une ruelle. Avec un peu de chance, il ne tomberait pas sur un autre barbare avec une Tesla.

-Le grand Jaskier a le trac ? Se moqua Geralt en le voyant rester silencieux à s'accrocher à son verre. Tu mentais donc lorsque tu disais qu' « aucune soirée n'est digne de ce nom tant que je ne suis pas monter sur scène ».

- Moi ? Je n'ai jamais le trac. Si un jour j'ai eu le trac, je faisais forcément semblant parceque je suis beaucoup trop talentueux pour ça ! S'enflamma le barde en se levant, je n'ai jamais peur, ce sont les autres qui tremblent à l'idée de recevoir une leçon de chant. Et tu sais quoi ? Je ne vais chanter aucune de ces mélodies !

-Ha oui ? Fit Geralt en riant doucement.

-Tu peux resté assis ici et apprendre.

Jaskier avait levé le menton, tourné les talons et pris le chemin menant à la scène avec une confiance en lui infinie. Cette même confiance diminua cependant à mesure qu'il s'approchait de l'endroit. Il commençait sérieusement à s'en vouloir lui et sa sempiternelle arrogance. Qui plus est, il prenait également peu à peu conscience qu'il n'y avait aucune chance pour que la population de ce monde connaisse les odes qu'il avait pour habitude de chanter dans les tavernes. Personne ne tapera dans les mains à l'entente de « la fille du poissonnier » ou du « Prêtre et sa chèvre ». Il n'avait pas mentit lorsqu'il disait qu'il n'avait jamais le trac mais en ce moment, cette vérité semblait horriblement erronée.
Au moment où il se rappelait de son plan de fuite, un homme barbu lui occulta une tape puissante dans le dos en le remerciant d'être présent et l'informant qu'il le cherchait justement pour pousser la chansonnette. C'est donc contre son gré, qu'on le jeta en pâture aux lions sur une petite scène, avec une lumière virée sur lui au cas où il ne serait pas assez visible.

-Tu es venu jusqu'ici pour montrer que tes chansons ne sont pas des vulgaires tartes vide... Se répéta-t-il à maintes reprises avant de demander à ce qu'on lui apporte une guitare.

Dès qu'il se mit à gratter délicatement les cordes, une vague de surprise traversa le public. Habituellement, il se contentait de chanter des musiques d'autres chanteurs en les mettant à sa sauce et, ces dernières étaient rarement aussi douces. Géralt fut probablement le plus marqué par cette nouveauté car le barde chantait enfin quelques chose qu'il avait écrit et ce, avec bien plus de passion qu'il n'en avait jamais mis dans toutes ses autres reprises. Il était déjà tombé sur le carnet de son époux mais Jaskier n'avait pas assez confiance en ses mots pour les partager.

Le brun réussit à entraîner le public dans son engouement malgré le côté médiéval de sa chanson. Il se sentait de nouveau lui même. Son regard rencontra celui du blond et il se permit même de lui faire un clin d'œil. Sa musique séduisait Geralt et c'est tout ce qu'il voulait.
Cependant, ce petit moment cathartique ne dura pas. Il fallu qu'elle fasse son apparition. La sorcière qui réussissait toujours à envoûter son sorceleur avec ses attributs féminins un peu trop parfait. Elle posa sa main sur son épaule et Jaskier oublia son public pendant un instant. Sa voix commençait à baisser en volume quand quelque chose fit tilt dans sa tête.

-Chantez avec moi ! S'époumona-t-il soudain en reprenant le refrain de sa musique en acapella.

Il sauta de la scène, se mêla au public comme il avait l'habitude de le faire, chanta, dansa avec eux et traversa la foule joyeuse pour rejoindre Geralt et Yennefer. Le naturel était revenu au galot. Le barde s'etait soudainement rappelé qu'il ne s'était jamais laissé abattre et n'avait jamais, au grand jamais, abandonné peut importe ce qui arrivait. Il n'était peut être pas une belle femme au regard de braise mais il connaissait Geralt mieux que personne. Et il savait comment le captiver entièrement.

Jaskier offrit son plus beau sourire à la sorcière et s'assit délicatement sur les cuisses du rockeur pour chanter le dernier couplet. La chaise humaine se sentit aussi gêné qu'heureux de voir Jaskier revenir vers lui. Les spectateurs applaudirent son insolence et s'écrièrent de joie lorsqu'il embrassa langoureusement le blond.

Encore une fois...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant