Je laisse tomber ma tête sur le plan de travail avant de fermer les yeux et de laisser un grognement s'échapper d'entre mes lèvres. La douleur ne s'estompe pas, malgré ma bonne volonté à me concentrer sur ma respiration. Au contraire, j'ai plutôt l'impression qu'elle s'accentue au fil des minutes. Malheureusement, je n'ai pas d'autres astuces de grand-mère et aucun médicament n'a réussi à m'éviter ces crampes incessantes. Dame nature est plus forte que la science sur ce coup-là. Les douleurs arrivent à un pic très élevé au moment où Lily entre dans l'arrière-boutique. La tête baissée, je ne vois pas la sienne, mais je mettrais ma main à couper qu'elle s'est mordu la lèvre en me voyant dans un état aussi pathétique.
— Je t'avais bien dit que c'était cette semaine que tu avais tes règles, me rappelle-t-elle à la fois ennuyée et très fière.
Je relève le visage, plus blasée que meurtrie désormais. Est-elle obligée de me rappeler ce moment gênant où elle a vu Jake pratiquement à poil ? Ainsi que celui où elle l'a giflé sans aucune retenue ? Ou juste me rappeler qu'une seule petite semaine s'est écoulée entre cette journée et aujourd'hui ? Si j'avais eu quelque chose de mou à ma portée, je lui aurais volontiers balancé à la figure pour effacer ce sourire qu'elle arbore effrontément.
— Je t'ai connue plus compatissante dans ce genre de période, lui fais-je savoir un peu maussade.
— Je t'ai connu moins rapide, me rétorque-t-elle avec un large sourire.
De la part d'une autre personne, je l'aurais très certainement mal pris. Vraiment très mal pris. Mais pas de la part de Lily, parce que... Elle est comme ça et je sais que ces mots n'ont jamais comme but de blesser. Pas moi en tout cas. Il n'empêche que sa légère pique est un sujet que j'évite depuis le départ de Jake. Je suis encore trop chamboulée et... prise de doutes. Plus qu'auparavant. Et cela ne se disperse qu'une fois que j'ai de ses nouvelles. Un message. Un appel. Une photo.
— Tu sais, on n'en a pas vraiment parlé, m'indique-t-elle d'une petite voix.
Aussi étonnant que cela puisse être, nous n'avions à peine dit un mot.
Rectification. Je prends la fuite à chaque fois que ma meilleure amie essaie de mettre le sujet sur le tapis.
Malgré ces moments de doutes, je dois avouer que je suis sur un petit nuage depuis près de sept jours. Mais j'ai peur. J'ai peur de redescendre sur Terre en abordant ce sujet avec Lily. Elle a beau être imprévisible et spontanée, une fois qu'on se met à parler d'un sujet très sérieux, elle est assez douée pour pointer les points négatifs de la situation... Je n'ai pas envie de ça maintenant. Pas après ce mois difficile. J'ai besoin de profiter de ce moment, besoin d'être simplement heureuse et ne pas me soucier des problèmes qui pourraient subvenir plus tard. Je m'en chargerai à ce moment-là.
Il y a mes envies... Et il y a Lily que je ne pourrai pas fuir éternellement.
— Je sais que tu dois penser que je suis folle et irresponsable, finis-je par dire avec dépit.
— Mais pas du tout ! me contredit-elle outrée par mes propos.
La bouche et les yeux grands ouverts, je dévisage ma meilleure amie durant de longues secondes. Après plus de dix ans d'amitiés, ses réactions et opinions peuvent encore me surprendre au plus haut point. C'est assez déroutant. Je pensais plutôt qu'elle s'opposerait à cette relation.
— J'étais certaine que tu allais m'engueuler...
— T'engueuler ? lâche-t-elle dans un rire avant de reprendre son sérieux. Bon, d'accord, j'avoue que coucher avec lui dès le premier soir, ce n'est pas la meilleure des idées que tu aies pu avoir dans ta vie. Néanmoins, en regardant de plus près, je ne peux être qu'heureuse et te féliciter.
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Scènes Coupées | Tome ☆ ☆ : moteur !
Storie d'amoreLes derniers mois ont été intense pour la jeune fleuriste anglaise. Entre des rencontres improbables, un voyage et une courte relation, Aby n'a pas trop eu le temps de s'occuper de ce qu'elle ressentait. Mais quand ce fut le cas, elle s'est heurté à...