Chapitre 11

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Ce matin là , je me retrouvais encore au cachot . Pourquoi cette fois ci , et bien car je m'étais battue avec Leclerc . Il avait la fâcheuse manie de s'attaquer à Pépino , et cette fois  , comme un  peut trop souvent sans doute , j'avais été là . Il fallait  dire qu'il était de petite nature aussi , quelques coups m'avaient suffit pour le mettre au tapis ; puis , comme d'habitude , Chabert , Rachin , cachot , travaux d'intérêt général , c'en  était presque devenu une routine . Seulement , je ne semblais pas être la seule sur laquelle Rachin s'acharnait , il y avait aussi Mohrange . Apparemment son assiduité en classe était toute relative, et pour l'exemple il finissait souvent par jouer les cendrillons . La chorale de monsieur Mathieu , elle , prenait forme petit à petit . J'avais appris que l'hymne au Maréchale avait en fait été chanté par Boniface , c'était la seule chanson qu'il connaissait. Même si les résultats n'étaient pas encore fameux , on obtenait quelque chose , seulement voilà , sans l'accord du directeur , ce projet resterait de malheureux aires de musique chantés dans un dortoir miteux.J'avais revu la fille de notre directeur quelques fois , mais toujours de loin , toujours en silence , parce que ce qui c'était passé dans le haul ce matin là , c'était resté notre secret . Je ne m'étais jamais fais de dessin sur une possible amitié , je le savais depuis longtemps , un monde nous séparait . Elle vivait une vie douce , celle des histoires et contes de fée , celle où on rentre dans la case , celle où les adultes posaient sur vous des regard attendris et disaient « Qu'elle gentille enfant ! Ah lala ce qu'elle est bien élevée ! » . Moi , comme les pensionnaires de fond de l'étang , je venais de l'autre monde . Celui du rejet , celui où l'affection d'un père , où la tendresse et la douceur d'une mère s'était effacés pour laisser place à bien d'autre choses . Aux punitions , aux lignes qui n'en finissaient plus , aux regards mauvais , aux vêtements trop légers en hiver parce que plus personne n'est là pour nous en envoyer, ou tout simplement parce qu'on avait  oublié le jour des visites . Il faut de tout pour faire un monde , des chanceux , des moins chanceux , des pauvres , des riches , des heureux des malheureux ,  cependant ,personnes n'aime être celui qui est en bas de l'échelle , mais il y en a toujours ; et a fond de l'étang nous étions le bas de l'échelle .

Je fus sortie de mes pensées par un coup de vent plus fort que les autre ,qui me ramena à un présent bien moins philosophique . Le mois de novembre et ses courants d'air rendaient le cachot encore plus glacial qu'il ne l'était déjà , et après avoir passé la nuit au frais , je commençais sérieusement à être glacée . La porte grinça , et s'ouvrit sur  Le Querrec et sur Chabert qui l'accompagnait  . Quand je les aperçus un petit sourire se de forma sur mes lèvres . Je n'irais pas jusqu'à dire que j'avais fait de Le Querrec un ami , mais à force de passer des heures « au trou » , on avait finit par se connaître. « Alors commençais-je des nouvelle de là haut ?
-Bah tu sais comme d'habitude « vous naturellement , toujours vous ! Au cachot ! », tout ça pour une malheureuse anti sèche !
-Je vois ... Ce vieux pruneau de Rachin est toujours aussi désagréable !
-Ouais ... et toi pas trop dure la nuit en bas ?
-Non tu sais , c'est comme tout on s'y fait ! J'ai juste froids !
-Bah t'es bonne pour un gros rhume .
-Comme d'habitude ! J'ai faim ...
-Pour ce que tu rates ! Plus le temps passe , plus la bouillie de la mère Marie me semble immangeable... Je rêve de tartine de confiture , de gâteaux , de biscuits !
-Tu l'as bien dit mon vieux , tu rêves ! Pour nous ce sera comme toujours,légume bouillie et avoine . N'oublie jamais cette règle d'or « seul Rachin mange à sa fin ! »
-Tu viens de l'inventer ?
-Ouais ! Mais bon , te fais pas de faux espoirs tu serais déçu ! Allez viens t'asseoir sur le banc au lieu de rêver , les rêves c'est pour les riches , et surtout .... pour les libres . » . Le Querrec avait finit par venir s'assoir , et épaules contre épaules , on s'était tenu un peu chaud . Non Le Querrec n'était pas tout à fait un ami , parce que justement c'était Le Querrec , et que j'étais Dangert , mais au fond il l'était presque parce qu'il était comme moi , tout cassé par la vie , tout abimé , mais qu'il tenait encore la route .

Tu trouveras une lumière dorée (les choristes ) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant