Le lendemain matin , Mohrange avait des cernes énormes . Il avait vraiment l'air fatigué , et sa tête ce matin là au réveil, valait toutes les insomnies du monde ! Enfin , il fallait admettre que ma figure non plus n'était pas très glorieuse. J'avais le teint cadavérique , les cheveux en bataille , et des cernes qui descendaient presque jusqu'à la fin de mon nez . Quand il m'aperçut , Pépino eu même un mouvement de recule . Au petit déjeuner le Querrec jeta sur moi un regard qui en disait long , très long même . Finalement , c'est en classe que cette insomnie commença à avoir des conséquences , je somnolais , tombant de fatigue , ce qui n'avait pas l'air de plaire à notre directeur :«Dangert ! Mon cours est il ennuyeux au point que vous vous endormiez ! Je savais que vous n'accordiez pas d'importance à l'école aux vues de votre bulletin , mais de la à dormir ! Vous me décevez beaucoup mademoiselle ! Au cachot , comme d'habitude ! Tiens , Mohrange , vous qui êtes si silencieux depuis le début du cours , une fois n'est pas coutume , vous l'y amènerez ! » . Tandis que je me levais , le corps tout ankylosé , je pus me rendre compte de la chose suivante , je n'étais pas la seule qui souffrait d'un manque cuisant de sommeil , mon voisin en pâtissait également , ce qui ne fut pas au goût de Rachin : « Moharange ! Mohrange vous dormiez vous aussi ! Et bien soit , au cachot avec Dangert ! Que je ne vous vois plus ! Pépino, emmenez les ! » . Nous suivîmes Pépino jusqu'à la loge du père Maxence où était monsieur Mathieu , puis ce dernier nous enferma au trou . J'étais assise sur le sol , le dos collé au mur humide , tandis que Mohrange lui , était sur le banc qui servait de lit à ceux punis pour plus longtemps . J'avais déjà fait plusieurs fois l'expérience de cette planche en bois , et à mon avis à part meubler , elle ne servait pas à grand chose , car elle était aussi agréable que le sol . Alors que monsieur Mathieu venait de remonter Mohrange commença :« Tu es contente ? Grâce à ton obstination on a fini au cachot !
-De rien ! Moi aussi ça me fait plaisir ! Répondis-je sur un ton faussement enjoué
-Tu m'énerves !
-Je sais ! ».Cet échange fut court , mais j'aurais aimé que l'on s'arrête sur ce dernier , seulement le destin en décida autrement . Quelques minutes plus tard il se mit à pleuvoir , la pluie accentuant l'humidité présente dans les murs , je me mis à frissonner , me maudissant intérieurement de ne pas avoir pris de chandail avec moi . Je commençais à me frictionner les bras , essayant ainsi de me procurer un peu de chaleur corporelle, sans succès . Alors qu'une dizaine de minutes s'étaient écoulées , Mohrange fit une chose qui me marqua . Ce geste simple, mais si inhabituel, si étrange pour moi peu habituée aux attentions . Il ouvrit son pull , et me lâcha sur un ton neutre : « Viens ! Tu vas attraper froid sinon ... ». Je le regardais sans comprendre , comme figée , alors il reprit sur un ton neutre , ou presque ,: « Viens j'te dis ! J'ai envie de dormir cette nuit , et si tu es malade tu vas me gêner ! ». Je m'approchai alors de lui en silence , et me posai contre son épaule , sans rien dire , tandis qu'il passait le pull autour de nous. La chaleur commença à s'imprégner doucement dans mon corps fatigué , et petit à petit mes yeux se fermèrent , m'emmenant au pays de Morphée ...Combien de temps nous passâmes ainsi , je ne saurais le dire , mais quand monsieur Mathieu vint nous chercher nous étions encore endormis . En effet, si Morphée avait eu raison de moi , elle n'avait pas pour autant épargné mon camarade , et notre manque de sommeil commun nous avait poussé à nous endormir . Le surveillant ouvrit la porte , nous regardant d'une façon particulière, d'une façon propre aux adultes , celle qui en disait long , tout en étant silencieuse . Pourtant , cet épisode ne ressortit jamais au détour d'une conversation, c'était comme une aparté , un songe cotonneux, au milieu de la dureté de notre quotidien. Pendant ce cours moment , nous avions tous les deux , sans le vouloir sans doute , laisser tomber un mur le temps d'un instant , pour enfin , ne plus être que des enfants , plus tout à fait petits , mais pas encore tout à fait grands .
VOUS LISEZ
Tu trouveras une lumière dorée (les choristes )
Teen Fiction« À la fin du voyage il n'y a pas que des gagnants parce qu'on a tous perdu un peu de notre enfance de notre innocence et de notre naïveté. » Cette histoire est largement inspirée du film « les choristes »de Christophe Barratier , elle reprend notam...