CHAPITRE VI

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Voilà bien deux semaines passées depuis l'attaque sur l'autoroute. La routine avait repris son train, les cours avançaient, les entraînements s'enchaînaient. C'était comme s'il n'y avait tout simplement jamais eu d'appartement. Malgré cette impression, certains des élèves ne pouvaient que garder une trace de cet évènement. Notamment Shoto et Rui, qui avaient été, tous les deux, sur le devant de la scène ce jour-là. En rentrent, les deux s'étaient fait sermonnés par leurs professeurs pour ensuite se faire féliciter par ces mêmes enseignants. Ils étaient tous deux retournés dans leur chambre sans comprendre quoique ce soit à ce qu'il venait de se passer.

Ce jour-là, ils avaient une heure de vie de classe avec leur professeur principal. C'était la première heure de l'après-midi. Ils étaient censés commencé une heure de théorie héroïque juste après la pause. Comme à son habitude, la jeune fille n'avait pas vraiment été attentive à l'heure de vie de classe. S'entendre avec ses camarades ne lui semblait pas vraiment important et papoter des soucis de cette même classe l'ennuyait bien plus qu'autre chose. Ce n'est pas qu'elle les trouvait barbants, mais c'était quand même un peu ça lorsqu'ils souhaitaient vraiment être ennuyeux. Et puis, elle ne venait jamais aux sorties proposées alors elle ne trouvait pas l'utilité de s'intéresser aux discours de Monsieur Aizawa.

Soupirant d'ennui, elle avait alors entamé des dessins sur une feuille vierge de son cahier. Elle n'était pas une artiste, loin de là, mais ça décompressait, le dessin. Pendant une bonne demi-heure, elle ne fit que ça. Puis lorsque la cloche du changement d'heure retentit, elle s'était empressée de ranger ses affaires de vie de classe, trouvant cette heure assez barbante ainsi pour rester quelques minutes de plus. Elle put voir Monsieur Aizawa ranger lui aussi ses affaires, leur prochaine heure de cours n'étant pas avec lui. Il s'apprêtait à partir quand soudainement il s'arrêta sur le pas de la porte pour lancer à son encontre d'une voix forte et fatigué :

« Et Suzuki, tu passeras dans mon bureau après votre prochaine heure. Il faut vraiment que tu trouves ce que tu souhaites faire plus tard. »

La jeune fille s'était légèrement tendue sur place mais avait acquiescé d'un signe discret de la tête avant de plonger son regard dans un roman qu'elle venait de sortir à la hâte, emprunté à la bibliothèque. Elle plissa des lèvres, sentant désagréablement le regard de ses camarades sur elle. Il fallait dire qu'être admis dans une filière héroïque ne laissait pas beaucoup le choix quant à la question sur l'avenir. Et entendre son professeur principal faire une généralité sur la question au lieu de développer prouvait bien son indécision quant à cela. Rui se mordilla la lèvre inférieure. Cette histoire de héros et de vilains l'agaçait. Elle ne comprenait pas pourquoi ils s'entêtaient tous à rendre la société aussi compliquée. Elle ne croyait pas à leurs idéaux. Alors se faire juger ainsi à cause de son opinion, aussi bien directement qu'indirectement, l'agaçait au plus haut point. Ne pouvaient-ils pas se mêler de leurs affaires ?

Cependant, ce qui l'agaçait le plus, et qu'elle n'avouerait jamais, était de sentir son regard sur elle. Et dire qu'elle commençait à s'intéresser à lui était un euphémisme. Il l'intriguait tellement qu'elle s'en retrouvait à attendre avec une certaine impatience leur prochaine discussion aussi bien constructive qu'inutile. Alors son regard sur elle semblait prouver que depuis le départ elle s'était trompée. Qu'il n'était pas si intriguant que ça, mais surtout, qu'il était finalement comme les autres : un simple mouton du système social. Qu'il était en pleine remise en question sur sa personne, malgré les nombreuses paroles échangées entre eux. Et c'était frustrant. Terriblement frustrant.

Sa dernière heure de cours se passa relativement calmement, malgré les regards remplis de questions que ses camarades posaient sur elle. Personne n'eut le temps de l'approcher à la sonnerie qu'elle s'était littéralement rué vers la sortie pour s'enfuir lâchement vers le bureau de leur enseignant numéro un. Eh bien... Suzuki n'avait pas très envie d'être confrontée à ses camarades. Surtout s'ils étaient censés venir en horde de douze pour tous lui poser la même question barbante et ennuyante. Ce fut alors en semi-courant qu'elle arriva dans le bureau de Shota Aizawa. Il la vit entrer sans surprise et lui intima de s'asseoir poliment d'un geste de la tête. Elle s'exécuta, et débuta alors ainsi une lutte acharnée sur le futur de la jeune fille. Il lui reposa les mêmes questions qu'à leur dernière entrevue.

Héros au Sens Propre [Tome 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant