Chapitre 6.5

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Jouer contre Tobio était exaltant et frustrant.

Oikawa ressentait toute sa détermination, toute sa passion, et elles venaient doubler la sienne, le poussant au-delà de ses limites. Il lisait en Tobio comme dans un livre ouvert grâce à leur lien si spécial, et dont il était à peu près sûr qu'eux seuls, plus Iwaizumi, connaissaient l'existence ; il dupa sans mal Kageyama lors de leur duel au filet, puis pressentit l'attaque finale, donnant la victoire à Aoba. Tobio aussi avait lu dans son jeu, mais peu importait.

La part de frustration venait du fait qu'il ne pouvait pas savourer la victoire, avec toute la tristesse émanant de Tobio qui venait noircir son humeur. Il était sûr que leur défaite en finale contre Shiratorizawa y était en partie due. Et l'inverse fut vrai aussi : quelques mois plus tard, quand ils retombèrent sur Karasuno lors de la course aux Nationales, il ne put convenablement faire le deuil de la défaite, à moitié occupé par l'euphorie de son cadet.

Les désagréments ne s'arrêtèrent pas là. Malgré toute sa bonne volonté, Oikawa fut incapable de se retenir d'aller assister au match contre Shiratorizawa –de revenir vers Tobio. C'était la logique des choses, deux âmes sœurs ne pouvaient que converger l'une vers l'autre ; mais qu'il soit aussi facilement soumis à ce fait l'effraya beaucoup.

Novembre arriva, et les problèmes avec. Un soir qu'Oikawa dormait chez Iwaizumi, il remarqua que celui-ci était sur son téléphone ; et, en grimpant sur lui pour avoir son attention, il ne s'attendait pas à lire que son interlocutrice n'était autre que Katsuko. Il eut l'impression de se prendre une gifle.

-Tu l'as revue !?

-Je l'ai croisée, oui, répondit Iwaizumi sans détourner les yeux de son écran.

-Iwa-chan, regarde-moi.

Iwaizumi obtempéra, ses yeux verts emplis d'ennui, et daigna poser son téléphone.

-Je suis tombé sur elle dans à la librairie où je suis allé l'autre jour, expliqua-t-il. Elle m'a reconnu, et j'ai vu qu'elle avait un pin de volley-ball accroché à son sac. Donc la conversation s'est engagée naturellement, et on a échangé nos numéros.

-Et... ? murmura Oikawa, la gorge sèche.

-Tu sais qu'elle a le même poste et le même numéro que moi !? s'enthousiasma soudain Iwaizumi. Une sacrée coïncidence-

-Ah ça, répliqua Tooru d'une voix glaciale. A croire que vous êtes faits l'un pour l'autre.

Il se redressa et récupéra ses affaires sans un mot.

-Tu vas où ? demanda Iwaizumi.

-Je m'en vais.

-Oikawa, y'a rien.

-Y'a beaucoup trop, coupa Tooru. C'est avec moi que tu sors, non ? Parce que je me pose la question, là. T'es vraiment en train de privilégier une fille que t'as vu deux fois au mec que t'es censé aimer depuis cinq ans ?

-Bien sûr que non, arrête de faire le gamin.

-Ouais, t'en fais pas. Je te laisse lui parler tranquille.

Il quitta la maison, laissant le vent froid geler les larmes sur ses joues. Le pouvoir des âmes sœurs était quelque chose de puissant, il ne s'y était jamais laissé berner. Mais il avait cru qu'Iwaizumi serait assez fort pour y résister comme lui l'avait fait –toutes ces fois où il aurait voulu aller vers Tobio, toutes ces fois où il l'avait senti en colère, frustré, découragé, chagriné, sans oser lui envoyer un message pour savoir s'il pouvait aider, déterminé à rester fidèle jusqu'au bout à ses engagements.

RésonanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant