Chapitre 12

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Cela faisait quinze heures que Tobio était retenu quelque part. Le ciel avait commencé à s'assombrir au-dessus de Sendai, et la pluie s'était mise à tomber, froide et régulière, avant de devenir une véritable averse.

Oikawa, Romero, Hinata, Miwa, Ushijima, Hayashi et le policier étaient tous assis autour de la table de la cuisine, silencieux et pensifs dans la grisaille de l'atmosphère. Le bruit régulier des gouttes contre les carreaux rythmaient leurs réflexions. Oikawa avait allumé la lumière, et son éclat blanc, cru, ne faisait qu'accentuer les angles inquiets des visages.

A un certain point, Hinata avait reçu un appel de Sawamura, lui aussi lié à l'affaire désormais. Le groupe de policiers dont il faisait partie avaient inspecté l'appartement de Kageyama et Ushijima de fond en comble sans rien trouver d'autres que les traces de lutte au milieu du salon, et la porte résolument intacte. Déterminés à ne laisser passer aucune piste, Daichi avait envisagé de jeter un œil à la voiture de Tobio.

Hinata n'avait pas trop su répondre, et avait passé le téléphone à Ushijima, plus renseigné que lui.

-Bonjour, Sawamura-san. On a le garage 14. Il y a trois voitures. Celle que Kageyama emprunte d'habitude, c'est la Jaguar XF. Le modèle 2017 en noir. Oui.

Oikawa posa son menton sur la paume de sa main pour empêcher sa mâchoire de se décrocher. Il était bien conscient que Tobio n'était pas pauvre, mais ce genre de marque de luxe le laissait interdit. Et en même temps... Qu'attendre d'autre ? La vitesse avait toujours été le péché mignon de Kageyama. Normal qu'il ait voulu une voiture rapide et puissante. Ushijima lui-même avait mentionné qu'il aimait se balader avec.

L'image mentale de Kageyama, lunettes de soleil sur le nez, au volant dans un intérieur de voiture en cuir, était étrangement séduisante –et Oikawa se laissa plusieurs secondes pour la savourer avant de revenir à la triste réalité de l'enquête.

Il s'était recouvert de plusieurs couches de vêtements, enfilant un pull par-dessus son T-shirt à longues manches, puis passant de nouveau un gilet par-dessus ; il était complètement gelé, et à peu près certain que son âme sœur était en hypothermie. Il ne savait pas si Tobio pouvait puiser dans sa propre chaleur corporelle, mais la situation ne s'améliorait pas vraiment.

De même, la faim continuait de saper ses forces. Il doutait que Kageyama ait déjà passé près d'une journée sans manger ; et même s'il était immobilisé, il s'affaiblissait peu à peu, tout de même éprouvé par son angoisse... Et si les contacts à travers le lien ne laissaient pas Oikawa indemne, lui aussi devait en subir les conséquences de son côté.

-Rien dans la voiture, annonça Hinata en posant son téléphone sur la table. L'équipe de Daichi reste sur place en attendant les résultats des analyses de vidéosurveillance. Elles devraient tomber d'une minute à l'autre.

Ils attendirent donc. Le policier passa plusieurs coups de fil, chaque fois brefs et secs, pour se plaindre de l'investissement des médias dans l'affaire. Oikawa n'avait pas envie d'allumer son téléphone, et il le garda à portée de vue sur la table sans vouloir y toucher, préférant contempler ses ongles et se concentrer sur le lien, essayant d'envoyer vers Tobio tout le positif qu'il pouvait, tout le bien-être de sa propre situation physique.

De temps en temps, il jetait un coup d'œil vers Romero, assis en face de lui. Sa discussion avec le champion ne cessait de lui tourner en mémoire, le triste sort de son âme sœur, sa relation avec Tobio, ce qu'ils allaient devenir à présent. Oikawa n'avait aucune idée de ce que voulait vraiment Kageyama, s'il était prêt à lui laisser une chance ou s'il ne voudrait pas se détacher de Nicolas. A la fin, c'est lui qui aurait le dernier mot, ils en étaient tous les deux conscients.

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