Chapitre 9 : Julien joue les infirmières

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«Eh, toi ! Qu'est-ce que tu fous ?! Julien gueule en terminant sa course dans la neige, essoufflé d'avoir dévalé la pente.»

Quelle surprise n'a-t-il pas lorsqu'il voit le Grand JD se retourner, comme pris en flagrant délit.

 Julien sent aussitôt la peur en lui se muer en colère. Lui, ici. C'est encore pire que s'il s'était agi d'un curieux, non, c'est cette enflure qui est venu jusqu'à leur tente, et vu son air surpris de trouver Julien derrière lui, il n'avait pas d'intentions très nettes. Quelques secondes en trop, et le Grand JD aurait trouvé Jérémy dans la tente, fiévreux et faible. L'idée enrage Julien, car si on cherche un peu loin, c'était de sa faute à lui aussi si Jérémy était dans cet état. 

Les deux Julien, détruisant Jérémy à petit feu.

«Monsieur Connard-

- En personne, Julien rétorque.»

Il n'a pas ses lunettes de soleil pour cacher son regard furieux, cette fois. Tant pis, ou tant mieux. Son sang bouillonne dans ses veines. Il pourrait se jeter sur le Grand JD et lui péter la gueule, ce serait facile et rapide, mais ça n'arrangerait rien, et ça effacerait tout ce que Jérémy et lui se sont démenés à construire, ce pour quoi ils ont abandonné leur dignité.

«Et JDay, il est où ?

- En courses, Julien dégaine du tac au tac.»

Hors de question de lui dire la vérité. Jérémy ne le voudrait pas. De toute façon, il n'a certainement pas besoin qu'on le rappelle de la dette dans l'état où il est. Julien le tiendra en sécurité, loin de cela.

«Bizarre, le Grand JD répond avec une moue dubitative. Je n'ai vu personne à part toi sur le bas-côté, quand je suis passé à Thonon.»

Julien sent son sang ne faire qu'un tour. Le Grand JD est passé en voiture près de lui, et il ne s'en est même pas rendu compte.

«Je ne pensais pas que ce serait vrai, quand on m'a dit que vous habitiez tous les deux dans une tente, mais je me gourais ! Vous n'y allez pas de main morte !»

Il y a un silence. Julien serre les poings, il n'ose s'approcher pas de la tente, et prie intérieurement pour que Jérémy ne tousse pas. Mais là, abaissant le regard derrière le Grand JD, il voit d'anciennes traces de pas dans la neige, les siennes, presque recouvertes entièrement de neige, et celles de quelqu'un qui est sorti de la tente et est parti en direction des bois. Jérémy.

Intérieurement, Julien panique. Mais il ne peut rien laisser passer sur son visage. Il faut qu'il fasse partir le Grand JD et qu'il s'élance à la recherche de Jérémy. Il espère follement qu'il est revenu à la tente, c'est déjà impossible de penser qu'il soit sorti.

Le Grand JD s'est aperçu que Julien fixait un peu trop la tente.

«Personne ne garde votre tente ? Ce serait dommage que quelqu'un vienne et y trouve quelque chose de valeur...

- Quelqu'un comme toi, par exemple ? Julien crache sans retenir le venin dans ses paroles. Qu'est-ce que tu fais là?

- Ne t'inquiète pas, je ne suis pas venu vous voler. Je venais juste aux nouvelles, vu que vous vous obstinez à ignorer mes mails. Ça ne doit pas être facile de vivre dans une tente merdique par ce genre de temps...

- A qui le dis-tu, Julien rétorque, ne le lâchant pas des yeux.»

Il trouve pas mal d'ironie à ce qu'il ose lui dire ça, lui qui les force à se mettre plus bas que terre.

«Mais ce sera fini quand vous m'aurez payé les 150 000...»

En un éclair, Julien comprend la raison de sa venue.

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