deux

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-Je peux pas venir avec toi ? Me demandait Izïa, allongée dans mon canapé, absorbée par sa série complètement niaise

-J'aimerais bien, mais tu sais comment Adam il est, jamais il ne décrochera un oui.

Ce soir, j'avais ma première interview, j'étais super nerveuse, surtout à l'idée qu'on me pose des questions pièges. Ma meilleure amie voulait absolument m'accompagner, mais avec mon agent, ça serait impossible. Moi aussi, au fond j'aimerais qu'elle vienne, ça aurait pu me rassurer un minimum, mais apparemment, je devais prendre mes jambes à mon cou.

-Au fait, c'était comment ta soirée d'hier ?

Je repensais alors à la veille, aux rappeurs que j'avais rencontré, et à quel point j'étais gênée qu'on me regarde à travers un écran me déhancher.

-C'était super gênant, il devait y avoir au moins cent personne qui m'avaient regardé twerker, ou baiser, ça dépend.

-Les risques du métier. Mais, tu regrette pas un peu d'avoir tourné ce film, enfin, vu comment ça te gêne.

- Non, pas vraiment en soit, mais c'était surtout le fait que je sois aussi en train de me regarder.

Elle hochait de la tête. J'adore Izïa, même si je n'arriverais jamais à me faire à son côté despotique, elle s'intéresse toujours à comment je vais, peut être que ça paraît normal d'un côté, mais à chaque fois qu'elle me pose une question, ça me faisait chaud au cœur.

Elle est parfaite, teint hâlé , cheveux blonds et yeux verts, avec sa taille de mannequin, tout est beau chez elle, et j'avoue que je l'envie d'avoir ce physique.

-Tu vas faire quoi toi ? Demandais je en fronçant des sourcils

-Je vais manger chez mes parents, puis rentrer chez moi, je suis pas de service ce soir.

Izïa travaille dans un bar en coin de rue du 9e, elle adore son travail, même si au fond je sais que ce n'est pas ce qu'elle souhaite faire dans sa vie. Elle est en dernière année de faculté de droit, en espérant décrocher et métier de ses rêves, juge.

-Tu vas à ta première interview ce soir ?

-Ouais, j'ai trop peur. Dis je en me concentrant sur le repassage de mon jean large noir.

-T'inquiète tu vas tout déchirer, et puis Adam il t'a dit quoi dire s'ils te posent des questions piège. Me dit elle, me faisant comprendre que tout allait bien se passer

***

-C à vous la suite, à table, ce soir, le retour qu'on attendait tous dans le cinéma d'après Gala, Une des actrices les plus promettantes de sa génération d'après Elle. Tina Borsali, merci d'être avec nous.

-Merci à vous. Disais je en souriant

-Vous avez remporté une palme d'or à vos vingt et un ans , lors du festival de cannes de l'année deux mille douze, revenons sur ces images. Annonçait Pierre Lescure, assis à ma droite, que je connaissais aussi en étant le président du festival de cannes

À l'écran, on me voyait en plan centré, le prix à la main, habillée d'une robe luxueuse et maquillée aux petits soins, les larmes aux yeux, n'arrivant même pas à aligner trois mots dans mon discours de remerciement.

-Cela va faire quatre ans maintenant, est ce que ce sont des souvenirs encore frais, ou vous avez vraiment réalisé pour le coup?

-Je pense que quand j'ai reçu ce prix, à mes vingt et un ans, j'ai pas trop réalisé, je crois même que j'ai tout bien digéré que depuis deux ans, ça a été tellement fort émotionnellement que j'arrivais pas trop à garder les idées en place.

-Au festival de cannes, vous remportez donc ce prix, et à l'après soirée, c'est comme si vous vous étiez envolée, plus aucune nouvelles de vous à partir de ce soir là, jusqu'à quelque jours, comment expliqueriez vous ce départ aussi soudain.

La question piège, celle qui me faisait le plus de mal à entendre, et à répondre en cachant la réalité de ma « disparition ». Après tout dire la vérité était impossible, et le sera à tout jamais. Adam m'avait prescrit mes réponses, je les avais mémorisées comme des verbes irréguliers. Mon cœur tambourinait sous mon pull vert en laine, et mes membres tremblaient d'anxiété.

-À 19 ans, je me suis rendue compte que pour moi ça comptait énormément d'avoir ne serait ce un diplôme ou quelque chose dont je pourrais me servir si un jour je voudrais refaire ma vie, j'ai alors préféré m'éloigner de tous les médias et me concentrer sur mes études.

-Et vous avez eu un diplôme, fait donc des études ?

-Oui j'ai fait quatre ans d'études dans une école d'art.

-Et donc, comment avez vous pu revenir dans le monde du cinéma aussi vite ?

-C'est grâce à mon agent, Adam, il m'a toujours encouragé et a travaillé dur pour me décrocher des castings qui pouvaient être prometteurs.

-D'ailleurs en parlant de castings, vous aviez dit dans une interview en deux mille dix que vous adoriez en passer quand le personnage que vous deviez incarner était complètement différent de la Tina que vous êtes dans la vrai vie, est ce toujours le cas ?

-Oui, je trouve qu'il n'y a rien de plus jouissant pour un acteur que de jouer quelqu'un opposé à nous, ça nous permet de nous faire des défis car souvent on va devoir jouer des émotions qu'on n'a pas l'habitude d'effectuer ou même des gestuelles.

-Vous avez donc joué dans un film de Mélanie Besson, c'est l'histoire d'une danseuse dans un bar de prostituée, on embarque donc dans ce monde assez sombre, il va y avoir de l'amour mais aussi beaucoup d'ennuis et de violence, qu'est ce qui vous a donné envie de jouer ce rôle ?

-Je pense que ce genre de femme dont on attribue un nom assez vulgaire, on oublie très vite que si quelques une font ça, c'est qu'elles n'ont pas le choix. Et il ne faut pas oublier que ce qu'elles font ce n'est que leur travail, à côté elles sont des femmes comme moi, comme vous, elles pleurent, rigolent, sont heureuses, malheureuses. Beaucoup de personnes oublient ça et c'est ce qu'on essaie de montrer dans le film.

Les questions s'enchaînaient, j'en avais marre et commençais à douter du fait que j'allais devoir supporter ça pendant tant de temps. S'asseoir sur une chaise, répondre à des questions qui ne parlent que de sa personne, en réalisant qu'apparemment notre vie est intéressante. Le plus culpabilisant dans une interview, c'est de se dire qu'on ne peut pas duscuter, écorcher un « et toi » après avoir répondu à la question que le journaliste nous avait posé.

-Merci Gabrielle Borsali, alors ce soir sur scène nous allons accueillir la chanteuse la plus populaire de l'année, Angèle.

Idylle amoureuse Où les histoires vivent. Découvrez maintenant