Je frappe et entre à nouveau. M'excuse d'un geste de la tête discret auprès de M Banning. Je sens son regard me suivre attentivement tandis que je regagne ma place. J'évite scrupuleusement de croiser les yeux de Cameron. Jack me toise bizarrement mais, pour une fois, il ne dit rien. Tant mieux. Je m'assois. Lorsque je remarque au tableau le gigantesque préservatif vert fluo gonflé à bloc que le prof a accroché , cela déclenche en moi un fou rire nerveux impossible à masquer. J'ai beau essayer, le rire monte en moi de façon sporadique et incontrôlable. Je craque. Je voulais surtout ne pas me faire remarquer. Je me penche en avant vers la table dans l'espoir de disparaître mais les paroles du professeur m'arrêtent.
- Melle Parks ? Vous allez mieux ? Vous êtes toute pâle !
Il fait une pause, cherchant à comprendre la cause de mes gloussements. Il se tourne vers le tableau qu'il désigne d'un geste de la main.
-Ah, oui, ceci vous fait rire. Votre camarade s'inquiétait de la taille des préservatifs. A tort évidemment : alors je lui ai fait gonfler ceci. Il partira rassuré ce soir et évitera de nous semer des petits blondinets aux yeux bleus.
Je sens Banning tout heureux de sa blague et tente de lui sourire gentiment, voulant laisser de côté mon problème. Il est gentil ce prof. Il veut bien faire. Que dirait-il s'il savait... pour moi ?
Par réflexe, et pour éviter de réfléchir plus, je regarde la feuille de consignes données en mon absence et remplis rapidement sans aucune difficulté toutes les cases et griffonne même un ou deux schémas explicatifs, pour la théorie, je suis la première. Rien à redire.
J'ai honte.
C'est en pratique que ça se gâte. Je devrais expliquer à M. Banning qu'il faut offrir des préservatifs « porte-clés » par exemple ou mieux des coques de téléphones abritant une cachette secrète remplie des capotes. L'ado, ayant un pic hormonal imprévu, en aurait toujours une sous la main. Il ne lui resterait plus qu'à garder l'esprit « frais » et clair, lors de sa "première expérience" pour penser à l'utiliser. Paré à tout imprévu. Ado 3.0.
Ce qui n'est pas mon cas. Le mien d'esprit, dans la clairière, avait clairement mis la clé sous la porte et était parti en vacances aux Bahamas alors que Cameron me faisait découvrir l'extase dans ses bras.
Mon téléphone vibre encore. Je soupire d'exaspération. Faudra que je parle à Pia : plus de textos en classe. Mais plus tard.
Cameron doit savoir avant. Curieusement, j'ai plus qu'une idée en tête : partager mon fardeau, mes espoirs et mes craintes avec lui. Même si ne n'ose plus le regarder. Une autre vibration. Agaçante et insistante. Je vérifie sur l'écran.
Cameron : « Maddie, tu vas bien ? Tu me manques. »
Franc et direct. Je rougis. C'est la première fois que je reçois un message de lui depuis... notre expérience. Bon sang, ce qu'il m'a manqué à moi aussi ! Je n'hésite même pas une fraction de seconde et glisse mon portable sur mes genoux.
Maddie : « Non ça ne va pas. Tu me manques aussi. »
La sincérité. Il n'y a que ça de vrai.
- T'as fini, Maddie ? Je voudrais vérifier mes réponses.
Jack et son sens de l'à-propos. Je ferme les yeux. La politesse ne l'étouffe pas celui-là. L'idée furtive de l'étouffer avec sa feuille de réponse roulée en boule m'effleure. Les hormones sûrement.
- S'il te plaît ? Merci ?
- Quoi ?
Il me regarde totalement confus. Ok il comprend pas. C'est pas mon problème.
- Rien. Laisse tomber.
Je lui file ma feuille car un nouveau texto est arrivé.
Cameron : « Parle-moi, Maddie, stp. Je suis là si tu as besoin de quelque chose et j'ai beaucoup de choses à te dire. On doit parler.»
Je suis nerveuse tout à coup.
Moi aussi Cameron, tu n'imagines même pas à quel point !
Quelle est la meilleure façon de lui annoncer ? Y a-t-il une bonne façon pour rappeler à votre meilleur ami que vous avez tous les deux été assez idiots pour faire l'amour sans protection ?
Et pour lui annoncer que, sans décision rapide de votre part à tous les deux, un bébé aux magnifiques yeux verts sera là dans 9 mois ?
Je suis plongée dans mon angoisse et à peine consciente de ce qui se passe autour de moi.
- Bon, vous devez avoir terminé, les enfants. J'ai vu que vous êtes tous très doués sur ce chapitre. Évaluation théorique la semaine prochaine, mais l'important n'est pas là !!! Le message est le suivant : Utilisez-les ces sacrés préservatifs. Un carton est là sur la table près de la porte et il restera là toute l'année scolaire. Libre service !!
Quelques garçons, sans surprise, se ruent à l'avant de la classe. Je me retourne doucement et regarde Cam par dessus mon épaule. Il me fixe sans ciller, de son beau visage pâle et crispé. Il semble attendre quelque chose et j'avais l'impression que seule sa volonté retient ses muscles tendus. Évidemment mon coeur se met à nouveau à battre de façon irrégulière comme pour me rappeler à quel point ce type me fait de l'effet. Enceinte. Je suis enceinte de lui.
Je ne résiste plus.
Je tape rapidement sur le clavier virtuel. Je me recroqueville sur moi-même, angoissée par ma décision. Je jette un regard furtif derrière moi. Cameron me fixe toujours. Ses yeux me questionnent. Il semble de plus en plus inquiet. J'appuie sur la touche « envoi ». Le regrette immédiatement. Trop tard. j'aurais jamais dû. Je suis une fille horrible.
La sonnerie annonce la fin du cours.
VOUS LISEZ
°• Quand la théorie ne suffit pas •°
أدب المراهقينMaddie, jeune lycéenne sans histoire jusqu'ici, se heurte à un... gros problème. Qui pourra l'aider ? Cameron aimerait surement le faire mais le laissera t'elle intervenir ? Lorsque le choix à faire est tellement important qu'il est difficile...