Chapitre 10

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Je n'ai pas perdu de temps. Aussitôt après avoir entendu "enfants" de la part de Prince, je me suis convaincue qu'il pourrait y avoir un indice chez ses filles. Ainsi, à travers de nombreux contacts, j'ai pu facilement retrouver l'adresse de Katherine Jackson, mais pas celle de sa sœur.

Je n'en ai pas parlé à Michael puisque je connaissais pertinemment sa réponse : comme il l'avait souligné lors de notre repas, il ne voulait absolument pas que je questionne sa famille.

Mais j'avais perdu trop de temps. Je me devais de prendre des initiatives toute seule.

– Qui êtes-vous ?

Cette femme que je venais de rencontrer, petite de taille et à la peau noire me fixait, montrant une expression marquant son incompréhension. J'eus un peu de mal à y croire. C'était la mère de Michael. La fille du râleur. Auquel ressemblait-elle le plus ?

– Je... suis une amie de Michael. J'aimerais vous parler de certaines choses... Puis-je entrer ? tentai-je timidement.

Elle ne se posa pas plus de questions, acceptant ma demande car son air montrait à présent une sorte d'inquiétude. Je lui avais peut-être fait un peu peur en mentionnant son fils...

– Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda-t-elle quelque peu paniquée en me menant au salon.

Je me posai sur une chaise qui m'avait été destinée, ma sacoche en main. L'endroit était épuré et calme. Mais surtout minuscule. Est-ce qu'elle avait déménagé après que ses enfants aient quitté le nid ? Je ne pouvais pas croire qu'une famille entière ait grandi ici.

Katherine me dévisageait attentivement, attendant impatiemment ce que j'avais à dire. Cet air à l'écoute, ses manières accueillantes. C'était à Michael qu'elle ressemblait le plus.

– Ça ne le concerne pas vraiment...

– Alors, que me voulez-vous ? demanda-t-elle simplement.

Sa question sonnait comme un reproche. Je retire ce que je viens de dire.

– Je me présente, Hailey Davon. Je travaille pour un projet personnel, au sujet de la guerre...

Ses yeux s'étaient détournés de moi. Elle savait où je souhaitais en venir et ça n'avait pas l'air de lui plaire.

– C'est au sujet de Prince ? Écoutez, je ne comprends pas pourquoi vous êtes venue me voir moi, ou que vous impliquiez mon fils. On ne pourra pas vous aider.

Le ton commençait à monter. Il fallait trouver les bons mots. Je ne devais ni la brusquer, ni la rendre méfiante. Je devais simplement agir doucement et simplement, comme si elle discutait avec une amie.

– Non, ce n'est pas à son sujet, mais plutôt le vôtre. J'aimerais savoir comment vous avez vécu la guerre, en tant qu'enfant.

Elle s'était enfin détendue, ses membres se décrispant. J'avais certes menti, mais le chemin la concernant allait rejoindre peu à peu celui de Prince.

– Je ne me souviens plus vraiment, j'avais seulement quatorze ans, c'était il y a longtemps... Mais c'est pour quoi, exactement, ce projet ? s'intéressa-t-elle enfin.

Quand une inconnue était captivée par votre histoire, c'était toujours bien perçu (ou presque, si j'en croyais mon expérience avec le vieillard). Et notre conversation le prouvait encore une fois.

– J'aimerais écrire une nouvelle.

Ça avait don de la rassurer. Effectivement, j'avais utilisé la ruse, puisque lui dire la vérité n'aurait eu que pour effet de perdre un témoignage important.

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