Chapitre 44

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   De retour au bureau le mardi, après une bonne journée à tenter de récupérer mon manque de sommeil, Betty m'accueille chaleureusement. Elle arrive souvent tôt en ce moment vu la masse de travail que l'on a. J'ai presque envie de lui tomber dans les bras tant tout semble m'échapper ces derniers temps.

– Dis donc, jolie Charly, les congés existent pour se reposer, non ? demande-t-elle en caressant mes cernes du bout des doigts.

Elle m'enlace et me claque une grosse bise sur la joue pour signifier sa joie de me voir.

– Il paraît, ouais, réponds-je en rigolant. Mais tu me connais, je ne fais jamais rien comme tout le monde !

Je ne peux m'empêcher de scanner l'agence des yeux pour essayer de repérer une masse de cheveux blancs, une boule au ventre, mais il n'y a que nous. Nous prenons alors un moment avant l'arrivée des autres pour papoter et rattraper le temps perdu.

– On est tellement occupées par le travail, j'ai l'impression qu'on ne se voit plus ! geint Betty. Il faudrait qu'on s'organise un truc toutes les deux, bientôt !

– Avec plaisir, ça nous changerait les idées.

Nous nous accordons sur un restau dans la semaine et échangeons quelques banalités sur nos dossiers respectifs. J'ai du mal à me concentrer totalement sur la discussion. J'essaie de trouver comment réagir en voyant Chloé ici après ce qu'il s'est passé. Je sais que je peux agir normalement et avec professionnalisme, mais la douleur fuse dans mon cœur par anticipation et notre confrontation me stresse... Finalement, Betty m'annonce qu'elle a pu poser une semaine pour Noël.

– Je le fête en famille en Espagne. On a loué une grande maison en Andalousie, tous mes cousins seront présents, j'ai trop hâte !

– Veinarde ! D'après Joanne, ce n'est pas gagné d'avoir des vacances à ce moment-là pour nous.

– Oui, mais c'est grâce à Chloé.

– Comment ça ?

– Ben tu es au courant, n'est-ce pas ? C'est toi son assistante.

Je fronce les sourcils, car visiblement, non.

– Elle a déplacé ses congés. Normalement elle avait Noël, mais finalement elle a pris cette semaine. Elle était présente hier, je pensais qu'elle t'avait prévenue.

Je secoue la tête en guise de négation.

Cette constatation me dérange. Comme le dit si bien Betty, c'est moi son assistante, je devrais connaître son emploi du temps. Pourtant, elle n'a pas cru pertinent de m'en informer. Je fulmine intérieurement, mais prends soin de ne rien laisser paraître.

En pénétrant dans mon bureau, je ne peux m'empêcher de lorgner celui d'en face, tout en sachant qu'il restera vide pour la semaine. Ma poitrine se crispe un tantinet à cette pensée.

En parcourant mes mails, je trouve en effet des prérogatives de ma référente pour les dossiers à traiter, accompagnant son annonce de congés. Il débute par « Bonjour » et se termine par « Cordialement ». Cette formalité me pique au vif, et je suis un peu déçue de ne pas bénéficier d'un message plus personnalisé. Cependant, je ne peux pas lui reprocher son professionnalisme. Pourtant, je suis clairement déçue de ne pas la voir. Malgré la manière dont nous nous sommes quittées dimanche, je ne pouvais m'empêcher de ressentir de la hâte à l'idée de sa présence au travail.

Ces réflexions me laissent perplexe. Je suis tout à la fois fatiguée du tumulte incessant qui remue mon cœur, et amusée par tout ce qui me passe par la tête. Chloé a envahi la moindre cellule de mon existence et chacune de mes pensées est désormais teintée d'un filtre couleur noisette. Je suis peu habituée à ces nouveaux sentiments et ces sensations inédites qui s'emparent de moi, mais malgré la perspective incertaine de ma relation avec Chloé, je me surprends à aimer ressentir tout ça.

Hating, Craving, FallingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant