Délivrance

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Mon père paraissait tellement abattu, épuisé par ce qu'il avait vécu mais qu'il taisait par orgueil. Je le sentais tout aussi meurtri et fatigué. Lorsque Tata Martine et Tata Jeanne lui apprit la raison pour laquelle sa femme était dans cet état, il entra dans une colère noire. Je sentis pour la première fois, que mon père eu de la compassion et surtout une sorte d'amour pour ma mère. Tellement il cachait bien ses sentiments, que rarement, nous le voyions dans cet état. Ma mère se réveilla quelques heures après et fut tellement heureuse de voir que toute sa famille était réunie autour d'elle. Elle était toujours faible physiquement mais paraissait très forte intérieurement. J'ignorais d'ailleurs où elle trouvait cette force de vivre pendant que moi son fils pleurais toutes les nuits à cause de ce qu'elle avait vécu.

-Émilienne, comment te sens-tu? Lui demanda t-il lorsque nous fûmes tous sortis de la chambre (bien sûr je faisais tout pour écouter ce qu'ils se disaient)

-Je me sens épuisée mais je suis en vie et c'est l'essentiel. Et toi? Tu ne m'as pas encore dit comment tu as réussi à t'échapper pour revenir.

-Je te raconterai tout ça après mais pour le moment, il faut que nous quittions ici. Nous ne sommes plus en sécurité et les enfants non plus. Quand j'étais en captivité, c'était un de mes élèves que j'ai rencontré et qui m'a aidé à m'échapper; il m'a d'ailleurs conseillé de quitter le quartier et si possible le pays. Il va m'aider vu qu'il est soldat et qu'il a de l'influence.

-C'est une bonne idée mais dans mon état je ne pourrai pas faire grandes choses ni même t'aider avec les enfants pour le voyage.

-Ne t'inquiètes pas. Tes copines viennent avec nous donc vont nous aider. Je leur ai proposé ça automatiquement quand je suis revenu et comme elles ont des connaissances ailleurs, elles profiteront juste du voyage avec nous vu qu'elles t'ont vraiment sauvé la vie, c'est le moins que l'on puisse faire.

-C'est compris. On partira donc quand exactement?

-Cette nuit vers deux heures du matin. Un de leurs pickup viendra nous chercher pour au moins nous escorter jusqu'à la frontière. Une fois là bas, j'appellerai mon frère pour qu'il vienne nous chercher.

-D'accord. Il va falloir alors le dire aux enfants.

-C'est déjà fait. Ils sont d'ailleurs entrain de s'apprêter. Maintenant je te laisse te reposer. Il te faut récupérer des forces. On a un long voyage à effectuer.

Aucune allusion à ce qui lui était arrivé. J'avais beau être patient pour écouter tout ce que mon père avait à lui dire mais à aucun moment, je n'entendis une seule phrase qui exprimait sa tristesse au moins par rapport à ce qu'elle avait subi. À croire qu'il avait même peur de se dévoiler à elle. J'étais soulagé qu'il soit en vie mais au final, il finissait toujours par s'en sortir. À croire que de tous les bourbiers, il arrivait toujours à s'extraire sans égratignures. D'aucuns diraient que j'exagérais mais je voyais tellement ma mère souffrir que je lui en voulais à lui de rester toujours en vie, de ne rien subir comme ce à quoi j'avais assisté. Mais bon, il était mon père et je l'aimais quand même; c'était ainsi et je ne pouvais me l'expliquer.

La nuit qui vint, tout se passa exactement comme prévu et son élève en question, nous aida à passer tous les barrages comme si nous faisions partie de leurs troupes. Trois heures plus tard, nous atteignions la frontière et là, sans ambiguïté, nous traversâmes. Je quittai ainsi ma terre natale, la seule terre que j'avais toujours connue sur une note amère, acre que je ne saurais même jusqu'à aujourd'hui bien décrire. Une fois sorti du pays, mon père réussit à demander de l'aide pour appeler son frère et quelques minutes plus tard, il vint avec sa femme. Tata Jeanne et tata Martine attendirent que ma mère soit bien installée dans la voiture de mon oncle avant de partir elles aussi chacune de leurs côtés. Elles nous promirent appeler pour avoir de nos nouvelles chaque jour puis je les vis disparaître dans des taxis cette nuit-là.
Immédiatement, mon oncle amena ma mère aux urgences car elle devait se faire examiner par un médecin à cause de ses plaies qui avaient recommencé à saigner. Nous passâmes donc toute la nuit à l'hôpital et le lendemain matin, mon oncle et sa femme nous ramenèrent nous les enfants chez eux à la maison. Mon père décida de rester au chevet de ma mère. Une fois chez eux, nous fumes accueillis par leurs trois  enfants qui paraissaient plutôt étonnés de nous voir.
-Maman, maman, c'est eux nos cousins? Demanda la plus petite d'entre eux

-Oui oui je vous présente Rico, Alvin et Mike. Et voilà mes enfants: David, Declan et Aurélie. Répondit ma tante en nous présentant.

-Bonjour, nous répondîmes pour saluer tout le monde.

-Mais maman, pourquoi ils sont aussi bizarres et ringards? Demanda la plus petite

-Arrête avec tes bêtises Aurélie et vas plutôt leur montrer leur chambre. Ils sont fatigués et ont besoin de prendre une bonne douche pour récupérer.
Je n'avais même pas encore passé une journée dans cette maison que je sentais qu'on y vivrait des choses encore plus étonnantes mais au moins, j'allais dormir ce soir sans entendre les bruits des fusils et des Kalashnikov.............

L'histoire d'une vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant