Chapitre 21 - Capucine

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Si je vis un rêve idyllique avec Noah qui me montre dès qu'il le peut à quel point je suis belle, désirable et qu'il adore mon corps tout autant que nos moments à deux, au bureau, c'est un cauchemar.

Patrick ne cesse de me prendre en grippe ; regard noir, encore plus qu'avant, remarques cinglantes, rabaissement. A l'instant encore, il me lance :

— Vous devriez vous concentrer un peu plus sur votre travail au lieu de votre jupe qui vous fait ressembler à un boudin !

Pas le temps de réagir qu'il quitte mon bureau. Chaque mot blessant est un coup de massue sur ma poitrine. Il a raison, évidemment, mais j'ai enfilé cette jupe en pensant à Noah. Aimes-t-il ce que je porte ? Apprécie-t-il de me croiser de loin et apercevoir mes jambes à découvert ? Je ne sais même pas s'il apprécie ma façon de m'habiller...

Parfois, quand il s'assure qu'il n'y a personne dans les parages, mon chef de service crie sur moi, me rabaissant davantage avec des paroles détournées, des critiques, me traite d'incapable et juge mon travail de médiocre. Plus il continue, plus les doutes s'enfoncent dans mon esprit.

Fais-je vraiment du mauvais boulot ?

Mon radiateur a été réparé, mais j'ai gardé le petit électrique que j'ai rangé dans l'armoire qui a, disparu... Je ne sais pas quoi faire. Et si Barry le réclamait ? Je ne pourrais même pas lui dire où il se trouve, puisque je l'ignore !

Barry se trouve plus souvent qu'avant à notre étage, se penche sur les maquettes, les corrections. Ça fait enrager davantage Patrick qui me le fait payer dès qu'il le peut. Je me doutais que tout serait de ma faute...

Depuis deux jours, je traîne un peu plus des pieds, ce qui énerve Patrick, évidemment. Mais je ne me sens pas bien. Je suis fatiguée, mal au crâne, j'ai des courbatures partout. J'essaie de me soulager avec de l'ibuprofène, mais c'est à peine si cela me fait de l'effet.

Il y a un léger courant d'air dans mon bureau, à peine minime, mais je le ressens, c'est juste derrière moi. Le loquet de la fenêtre a du mal à se refermer. Je ne l'ai dit à personne, je n'ose pas. Je ne veux pas encore attirer l'attention sur moi.

Et je veux prouver à Patrick que oui, je fais très bien mon boulot !

***

Deux jours s'écoulent. Dures. Pénibles. J'encaisse chaque remarque de Patrick, chaque critique. Il a voulu me montrer ce qui n'allait pas sur mon texte et s'est penché sur mon travail. S'il aurait voulu jeter ma tête dans l'écran de l'ordinateur, il l'aurait fait ! A la place, il a posé une main sur mon épaule – ce qui m'a dégoûté – et il me l'a brouillé. J'ai retenu un cri de douleur, mais je n'ai pas pu m'empêcher de grimacer. En quittant mon bureau, il souriait.

Je ne me sens pas mieux, mais je prends sur moi le plus possible. Je ne veux pas craquer. Je ne dois pas craquer.

Je n'ai pas pu voir Noah de la semaine. Il m'a donné rendez-vous à un restaurant. J'aurais dû annuler et me reposer, mais si je l'avais fait, il se serait inquiéter et je ne veux pas lui donner plus de soucis qu'il n'en a déjà avec son travail.

Malheureusement, à bout de force, je m'écroule avant même d'avoir atteint la table où mon amant se trouve. Avant de sombrer, j'entends sa voix qui m'appelle, puis, plus rien.

***

J'ai froid. Chaud. Tous mes membres sont lourds, tout comme mes paupières que je peine à soulever. Je perçois une présence près de moi. Apaisante. Sécurisante. Des mots sont chuchotés à mon oreille, mais je n'arrive pas à saisir leur importance. Je suis dans le flou, un tourbillon qui m'emmène loin de tout et qui me plonge dans une torpeur où je me retrouve sans force, comme vidée de toute énergie.

Sweet love ( auto édité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant