❧ Chapitre 24 ❧

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« La mort est une possibilité que chacun porte en soi à chaque instant.»

- Marcel Achard 


« Un lourd secret se découvrira », voilà les paroles prophétiques de Monique. Je comprends désormais que ses prédictions étaient fondées et malheureusement pour moi, se produisent réellement. Aucun son ne veut sortir de ma bouche. Je comprends enfin pourquoi j'avais vu Henry à la fête de Northwood ou encore pourquoi ses yeux noisettes me semblaient si familiers en étant pourtant si différents de ceux de... Northwood. Ce monstre avait donc un fils et, qui plus est ami avec son pire ennemi. La tête m'en tourne.

— Je peux comprendre votre affolement, s'empresse-t-il d'ajouter, mais je ne suis pas comme lui. Je le hais, croyez-moi !

Il n'est pas notre ennemi, il n'est pas notre ennemi ! Je me répète ces paroles en boucle, la tête entre mes mains. Après tout, il vient à l'instant de m'avouer partager mon aversion pour son propre père. Je me dois de le laisser s'expliquer.

— Vous m'avez pourtant avoué que votre père était mort...

— Oui, c'est ce que j'ai l'habitude de dire lorsque l'on me pose la question, s'empresse-t-il de répondre. Pour moi, il nous a quitté le même jour que ma mère. C'est sa faute si elle est morte lorsque je n'avais que cinq ans. Ce soir-là, elle s'était disputée avec lui car elle estimait qu'il accordait trop d'importance à son héritage et à sa « traque des ressuscités ». Elle est partie avec l'intention de ne plus jamais le revoir et c'est juste après cela qu'elle a eut son accident de voiture. Elle avait prévu de revenir me chercher, je le sais, finit-il, la voix brisée et l'envie de pleurer perçant dans cette dernière. Depuis, se reprend-t-il brusquement, j'ai toujours détesté mon père et j'ai décidé de prendre le nom de ma mère : Summershigh. Lui non plus n'a plus jamais été le même depuis sa mort ; il s'est entêté avec encore plus de force à pourchasser les Passeurs du Temps, bien que je n'ai jamais vraiment saisi ce que ces personnes lui avaient fait...


J'assimile ses paroles avec tristesse et une affreuse envie de le serrer dans mes bras. C'est alors que la menace de cette femme à la fête de Northwood me revient : « Saches, Chérie, que celle qui t'a précédé n'en est pas sortie vivante à la fin ». Elle parlait alors de Northwood et je me rends compte que j'aurais dû l'écouter.

— Je pense que nous pouvons cesser de nous vouvoyer maintenant que nous nous connaissons un peu mieux, soupiré-je en fixant un point imaginaire sur l'autre extrémité de ma cellule.

— Et bien oui... si tu le veux, hésite-t-il adorablement. Puis-je savoir à quelle époque tu vivais avant ?

— En 2020.

— Cent ans dans le futur ! s'exclame-t-il en sifflant. Je suppose que je suis déjà mort depuis un petit moment ? l'entends-je rire en écho.

— Certainement, éclaté-je de rire à mon tour. Mais je peux t'assurer que le prochain siècle ne sera pas de tout repos !

— Je sais à quoi m'en tenir à présent !


Mon rire se joint au sien jusqu'au moment où je comprends que je mourrais définitivement dans quelques heures. Northwood ne fera jamais de mal à son fils mais à moi, avec certitude. Je retrouve mon sérieux en une seconde alors que la joie du jeune blond s'estompe doucement à mes oreilles. J'ai soudainement extrêmement chaud si bien que j'ai envie d'arracher mon gilet. Je le jette d'un geste rageur dans un coin du cachot avant de voir mon bandage et de l'arracher à son tour. À ma grande surprise, toute trace d'égratignure à disparu de ma peau. On pourrait croire que ma blessure n'a jamais été qu'une hallucination, pas l'ombre d'une cicatrice ni d'une rougeur. J'ai guéris remarquablement vite. Peut-être ma condition d'immortelle me privilège-t-elle finalement ? Je souris amèrement : je doute qu'Aimée puisse en faire autant.

Contre le temps : 20'sOù les histoires vivent. Découvrez maintenant