Chapitre 4 : Un autre monde

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Ce fut la douce brise accompagnée d’un air frais qui réveilla Lena. Son corps tout entier était engourdi, et un mal de tête indescriptible l’assaillait. Cette douleur était accentuée par des chocs infimes, comme si elle se trouvait sur un cheval au trot, très lent. Lorsqu’elle ouvrit les yeux, son regard fût tout de suite attiré par la chevelure blonde se trouvant à proximité de son visage. En baissant les yeux, elle comprit qu’un homme la portait sur son dos en la tenant par les jambes, et que cette sensation de trot n’était pas qu’une illusion. Son champ de vision se limitait donc à ce qui se trouvait devant. Elle ne savait pas comment elle était arrivée là, mais savait Ewald en sécurité, puisque elle ne se souvenait que de sa rencontre avec le mystérieux Jilvis, qui semblait sous l’emprise de nombreuses drogues, au vu de ce qu’il lui avait expliqué.

-          « Comme si un monde parallèle pouvait exister, se dit-elle »

Pourtant, même si elle ignorait qui la portait, elle ne dit rien, feignant d’être toujours assoupie. Le plus discrètement possible, elle releva les yeux, pour se faire une idée de l’endroit où elle se trouvait. Cependant, elle fut déçue de ce qu’elle vit : des étendues de hautes herbes l’entouraient. En revanche, elle pouvait clairement distinguer le bruit spécifique du fracas de l’eau d’une cascade. Alors que ses sens s’éveillaient, le parfum de l’homme à la chevelure blonde se faufila à l’intérieur de ses narines. Il lui évoqua une délicate odeur de rose, mêlée à une touche de menthe, ce qui inspirait à la fois la douceur, et la fraîcheur. Lena se sentait en sécurité, sans vraiment savoir pourquoi, mais décida de garder le silence, au cas où. Ses yeux continuaient de scruter discrètement les alentours, quand soudain son attention fut captée. Ses sens étant affûtés de nature, elle perçut un mouvement dans les hautes herbes qui serait passé inaperçu pour n’importe qui d’autre. Tapis dans l’ombre, elle réussit pourtant à discerner les deux petites taches rouges qui semblaient les suivre. Elle plissa alors les yeux, tentant de deviner ce qui se cachait derrière. Soudain, alors qu’elle tentait tant bien que mal d’imaginer ce qui les suivait, elle vit les petits points rougeoyant s’immobiliser. A peine eut-elle le temps de plisser un peu plus les yeux qu’ils avaient disparus. Son être tout entier se sentait menacé, ses muscles tendus, ses sens encore plus en alerte. C’est pourquoi, lorsqu’un mouvement brusque venant des hautes herbes brisa le calme, elle s’écria :

-          «  Attention ! »

L’homme blond sursauta lorsqu’il entendit sa voix, et fit un bond en arrière. Lena sentit une rafale de vent lui fouetter le visage. Elle venait à l’instant de leurs sauver la vie. A l’endroit où ils se tenaient quelques secondes plus tôt, une bête au pelage noir très sombre se tenait majestueusement. Ses deux pattes avant se voyaient prolongées par des sortes d’ailes, dont les contours semblaient aussi tranchants que la lame la plus aiguisée. Ses pattes arrières cohabitaient avec une queue épaisse, dotées d’épines de la taille d’un pouce. Des écailles d’un noir-gris acier  protégeaient le torse de la créature. Au bout de ses pattes, de petites griffes acérées venaient compléter son arsenal mortel. Au bout d’un long cou se trouvait sa petite tête. A l’arrière de celle-ci, de fines oreilles félines prolongeaient son crâne, et au-dessous de ses yeux d’un rouge ardent, son museau s’allongeait en bec d’aigle. Lena n’eut pas le temps de décrire plus la bête, puisque celle-ci se baissa sur ses pattes avant, prête à bondir. L’homme blond déposa délicatement Lena par terre, en même temps qu’une voix familière s’écriait derrière elle :

-          «   Edgar, c’est un Draak, laisse-moi m’en occuper ! »

En se retournant, Lena reconnut immédiatement Jilvis. Ses yeux l’envoutaient, et elle s’y plongerait volontiers pendant des heures. Mais à cet instant, son regard n’était plus le même, la douceur qui l’animait laissait désormais place à un esprit combatif sans pareil. Il tenait un marteau énorme d’une seule main, ce dernier reluisant d’un bleu tout aussi éclatant que ses yeux. Sa posture indiquait qu’il était sur la défensive, prêt à intercepter les assauts du Draak. Le silence avait imposé son règne, témoin à la fois de la tension et de la concentration. Ce fût la bête qui y mit un terme. En un clin d’œil, elle bondit sur Jilvis, lançant ses ailes tranchantes devant elle, dans un mouvement en arc de cercle, tentant de le blesser. Mais celui-ci, avec une rapidité tout aussi incroyable, esquiva chaque coup. Soudain, le Draak changea de stratégie et lança un coup vertical, et Jilvis, surpris, exécuta une roulade sur le côté au dernier moment. Le coup avait frôlé son épaule gauche, où son armure était en partie arrachée. Ses réflexes venaient de lui sauver la vie, et lui offraient aussi une ouverture : l’aile de la bête était coincée dans le sol. Ses griffes acérées mêlées au tranchant de ses ailes ayant raté leur cible, elles avaient pénétré la terre et s’y étaient profondément enfoncés. Il se rua alors dans sa direction, visant la tête. Le bruit du fracas entre le crâne et le marteau fût intense, reflétant la violence du choc. La créature s’écroula sans aucune résistance, balayée comme un fétu de paille. Jilvis rangea son marteau à sa ceinture, et se retourna, sans un mot. A cet instant, alors qu’il semblait mort, le Draak se releva, et en faisant un tour complet sur lui-même, envoya sa queue à pleine vitesse dans sa direction. Le guerrier, avant d’être frappé de plein fouet, pointa son doigt vers la bête, et s’écria haut et fort :

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