Clock 6 : Froid sur l'orphelinat

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Lisa et Shabal arrivèrent en sueur, après avoir entendu le vacarme provoqué par Mika. Ils constatèrent la même chose que les autres. Le décor extérieur était faux.
- Ça explique mieux pourquoi la pluie est silencieuse, dit Mika. Voilà aussi pourquoi j'ai l'impression de respirer le même air depuis quelques temps, même la fenêtre ouverte.
- C'est quoi ce foutu délire ? marmonna Will.
- Soeur Elizabeth était une menteuse... répliqua Nelly. Mika avait raison depuis le début...

Les enfants ne savaient pas comment réagir. John et Janice se tenaient la main face à l'écran endommagé. Ils tremblaient de peur et d'excitation. C'était comme un jeu pour eux. Mais un jeu mystérieux. Quelque chose clochait dans cet orphelinat et eux aussi venaient de le comprendre.
- Ça aussi, c'est un coup de Sologne ? demanda Shabal.
Tout le monde se tourna vers Lisa et le garçon. La jeune rousse baissa les yeux et serra les poings.
- Je ne sais pas. Je me souviens juste que toi, Grent, Noah et moi étions avec sœur Elizabeth lorsqu'on l'a aperçu. Cet homme sabote la chaudière. Alors il est peut-être aussi dans le coup...
- En parlant de Noah, ça fait déjà bien longtemps qu'il a disparu, répondit Nelly. Comme Rudy. Il va falloir qu'on s'en aille au plus vite ! Sinon, on disparaîtra nous aussi.

Jude se leva brusquement et courut. Son écharpe virevoltait et ses cheveux se démêlaient. Rapidement, il montait les escaliers et haletait tel un chien. Il n'avait pas d'endurance et se sentait compressé par le poids du temps. Il devait à tout prix quitter l'orphelinat, peu importe les moyens.
- JUDE ! ATTENDS !
Grent se mit à courir à son tour. Sa voix résonnait dans la cage d'escalier. Ses hurlements étaient audible depuis la cantine mais personne n'entendait Jude lui répondre.
- QU'EST-CE QUE TU FOUS ?
Le mécanicien entra dans la troisième chambre. Il s'arrêta devant la porte une fois entré. Face à la fenêtre, à dix mètres d'elle, il reprenait sa respiration. Totalement épuisé, les bras relâchés, Jude tremblait.
- REVIENS ICI !
- Je suis désolé les amis...
Son pied prit appui sur le sol quadrillé et il bondit loin, jusqu'à la fenêtre.
- JUUUUUUUUDE !
Le garçon tomba dans le vide. Il chuta d'une hauteur incertaine en essayant de s'agripper à un rideau qui représentait un faux décor.

Les orphelins restaient silencieux. Leurs ventres gargouillaient et ils attendaient que Grent revienne. Les minutes défilaient. Personne ne savait ce qui se passait là-haut. Puis au bout d'un certain temps, le garçon à lunettes revint, en pleurs.
- Jude... dit Lisa inquiète. Où est-il ?
- Il s'est empalé... Sur des pieux...
Mika baissa la tête et expira tous ce qu'il avait dans ses poumons.
- On ne sortira jamais.

Will interpella ses frères et sœur. Il se tenait debout, les mains dans les poches, sur la table.
- On devrait envoyer des éclaireurs partout et chercher une sortie ! Un passage secret, une porte qu'on n'a jamais ouverte, peu importe. Trouvons une faille !
- Je suis d'accord, répliqua Nelly. Faisons des équipes !
Shabal, Grent et Lisa se retrouvèrent ensemble. La plupart des orphelins se sont répartis au niveau de la cantine, de la salle de jeu, des chambres, du grenier et à la salle des machines. Les trois plus vieux se dirigèrent vers une porte au fond d'un couloir froid.
- L'atelier... Soeur Elizabeth nous disait toujours de ne pas y aller. Mais maintenant qu'elle est morte...
- Attendez !
Nelly arriva en poussant Mika.
- On vient avec vous.

Les yeux grands ouverts, les mains derrière le dos, John leur fit un grand sourire.
- Qu'est-ce que tu fais ici ? C'est sûrement dangereux.
- Je suis un super-héros ! Je vais vous aider !
- Quelle équipe... soupira Mika. Bon... On avance ?
Shabal ouvrit la porte et de nombreuses toiles d'araignées se cassèrent si facilement. Grent sourcilla.
- Il n'y a pas de lumière.
- Je vais chercher une bougie ! s'exclama John en collant sa main à sa tempe. Je suis le soldat John !
- Bah dépêche-toi, microbe. grogna le garçon sur son fauteuil.
Le petit blondinet se précipita vers la cuisine et récupéra du matériel. Il revint en quelques minutes avec deux bougies, des allumettes et un couteau.

Lisa et Shabal tenaient les lumières. Grent avait la lame en main droite, prêt à se défendre contre tout type d'ennemi.
- Lisa...
La rousse continuait d'avancer, sans regarder Mika.
- Qu'est-ce que tu sais sur les monstres ?
- Rien.
Le métis brûlait les toiles et les araignées s'enfuyaient.
- Tu avais l'air d'en connaître plus que nous en tout cas.
- Sur celui-ci en particulier, probablement. Il s'appelle Sologne. Il est... Gentil.
- Quoi ?
Grent s'arrêta et se tourna vers sa camarade. Puis il haussa les épaules et leva ses mains, paumes dirigées vers le plafond.
- Comment ça, gentil ?
- J'ai passée une nuit seule avec lui. Terrorisée.

« J'étais là, devant lui. Sur une chaise. Dans la noirceur la plus totale. La lumière était dévorée par les ténèbres autour de moi. Ma bougie ne servait à rien... J'étais tétanisée, j'ai pissé dans ma culotte. Je hurlais dans ma tête mais aucun son ne sortait de ma bouche. Mais il ne bougeait pas. Il ne m'attaquait pas. »

Quelque chose passa soudain derrière Nelly en courant. Les bruits de pas répétés avaient été entendus par tout le groupe mais personne n'a pu voir ce que c'était.
- Putain, j'ai envie de partir loin d'ici...
- Finis ton histoire, Lisa.
La rousse s'arrêta devant un tableau poussiéreux et gigantesque. Un tableau très sombre.
- C'était un artiste en herbe. Regardez cette œuvre. Il m'a représentée sur cette chaise avec un sourire et des petites fleurs dans les cheveux. Lorsqu'il souhaite hiberner pendant des années, après avoir dessiné quelque chose, il sabote la chaudière et pars dans un très long sommeil.
- En gros, répliqua Shabal, on empêche ce type de dormir ? Mais qui c'est ? Un monstre ?

Des griffes s'incrustèrent dans les planches de bois qui servaient de murs. De longs bras provenant du fin fond de l'atelier tirèrent la créature jusqu'à eux. Cette chose se hissait lentement mais sûrement jusqu'à Grent qui tremblait. Le couteau dans ses deux mains, les jambes fléchies, il avait peur.
- C'est lui. dit Lisa. C'est Sologne...

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