Le chariot continuait d'avancer. Il ralentit au fur et à mesure jusqu'à ce qu'il s'arrête dans un endroit à l'abri du froid: sûrement l'entrepôt dont Alen lui avait parlé. Anastasia arrêta de trembler. La guérisseuse entendit le livreur descendre de son chariot puis, petit à petit, des mains inconnues enlevèrent les victuailles entreposés dans le chariot. Des mains se saisirent du tonneau dans lequel elle était cachée, et elle se remit à tourner. Au bout d'un moment, un homme remit le baril en place.
Anastasia se mit à écouter les conversations qui bourdonnaient autour d'elle, et l'une d'elles attira son attention:
- Toujours pas de nouvelles?, déclara un homme, le ton inquiet.
- Non, toujours pas, déclara un autre, d'une voix beaucoup plus jeune. L'homme que recherche la sorcière ne s'est pas encore montré...
- Rassemblez vos hommes, et effectuez une nouvelle battue dans les environs de la Tour. Cette givrée ne cesse de me demander des comptes, et sa patience sera bientôt à bout: dépêchez de me coincer cet emmerdeur pour qu'on puisse avoir la paix!
- Oui, mon Commandant!
Anastasia entendit les deux hommes se séparer. A l'exemple des deux soldats, les autres discussions s'arrêtèrent progressivement. Une femme brailla d'ouvrir la porte, et la charrette d'Alen ressortir de l'entrepôt. La guérisseuse attendit qu'il y ait un silence total avant de pousser le couvercle du tonneau: fort heureusement, il n'y avait rien de posé au-dessus d'elle, et elle n'eut aucun mal à le retirer. Anastasia jeta un coup d'oeil à l'extérieur: dans l'entrepôt, il n'y avait personne, et la jeune femme ne se fit pas prier pour sortir.
Extirpée du tonneau, elle tituba un peu, avant d'inspirer de grandes bouffées d'air frais. Anastasia eu soudain envie de vomir, et elle se précipita dans un coin isolé de la pièce pour se vider les intestins. Peu après, elle saisit sa gourde pour rincer le goût âcre coincé au fond de sa gorge. Désaltérée, elle tourna la tête pour apercevoir Eden, qui quittait lui aussi le tonneau où il était enfermé. A l'image de la jeune femme, il tituba puis se ressaisit avant de la rejoindre:
-Si je comprends bien, nous nous trouvons en ce moment même dans l'entrepôt indiqué par Alen?
- Je crois que oui, lui répondit la guérisseuse. Rien de cassé?
- Non ça va.
- Alors, allons-y.
Le duo traversa la salle pour arriver devant une porte en fer, fermée à double-tour:
- Nous n'avons pas la clef, rumina Anastasia. Vous n'avez pas un tour de passe-passe pour l'ouvrir?
- Laissez-moi faire: "Retour!"
Rien, puis, comme poussée par une force invisible, la porte s'ouvrit:
- Comment avez-vous fait?
- J'ai fait remonter cette porte dans le passé: dépêchez-vous, car elle ne tardera pas à se refermer...
La guérisseuse et le Condamné s'y engouffrèrent. Le duo déboucha sur un couloir rustique, éclairé chichement par quelques torches qui n'inspiraient qu'à se consumer. Ils avancèrent dans la pénombre, jusqu'à déboucher sur un embranchement: les deux chemins semblaient mener vers les quartiers des soldats, en raison de la plus grande opulence des lieux:
- Vous prenez à droite, et je prends à gauche, expliqua Eden. Ramenez aussi toutes les babioles qui nous auraient une quelconque utilité: cela pourra nous servir.
Anastasia opina d'un coup de tête, et ils se séparèrent.
Seule, la guérisseuse traversa le long couloir éclairé par les torches. Elle tomba sur une porte, ouverte, et des voix s'en échappaient: sûrement les quartiers des gardes.
- Encore gagné?!, commença l'un. Décidément, tu ne fais que tricher!
- Moi, je triche?, répondit l'accusé. Tu peux dire, toi qui ne fais que bluffer!
- Moi, je bluffes? Pour qui te prends-tu, tricheur?
- On peut reprendre la partie?, demanda le troisième homme, qui n'avait pas encore ouvert la bouche.
Les cris cessèrent, et la partie reprit son cours. Anastasia s'apprêta à rebrousser chemin mais les voix reprirent:
- Ca vous dit qu'on aille manger un bout?, demanda le premier. J'ai faim.
- T'as tout le temps faim Bertrand, répliqua le second.
- Oui mais j'ai rien bouffé depuis ce matin, et vu le régime que nous impose la sorcière, j'ai peur de devoir avaler du bois pour calmer mon estomac...
- A vrai dire, j'ai moi aussi envie de manger, expliqua le troisième, donc je viens avec toi.
- Eh, me laissez pas tout seul!
Anastasia entendit des chaises bouger, puis des pas venir en sa direction. La guérisseuse regarda autour d'elle, et elle aperçut un recoin sombre entre deux commodes. Les choix limités, la jeune femme s'y recroquevilla en espérant que les trois hommes passeraient leur chemin. Le trio apparut dans son champ de vision et, heureusement pour elle, ils n'y virent que du feu. Une fois partis, Anastasia se releva, puis elle se faufila dans le dortoir.
Les quartiers des gardes n'étaient pas très luxueux: ils avaient chacun un lit et un coffre pour ranger leurs affaires personnelles. Comme Eden le lui avait demandé, la guérisseuse se mit à fouiller les possessions des soldats: elle y dénicha deux pommes, quelques biscuits, des herbes médicinales ainsi qu'une carte du rez-de-chaussée de la Tour des Camarans.
Satisfaite, Anastasia quitta le dortoir. Lorsqu'elle revint à l'embranchement, Eden l'attendait déjà:
- Qu'avez-vous réussi à trouver?
La guérisseuse lui montra ses découvertes:
- Deux pommes, des biscuits... Rien de trop, déclara le Condamné. Et si je comprends bien, l'escalier que j'ai repéré descend vers les geôles: suivez-moi.
Eden et Anastasia se retrouvèrent en face de ladite porte, et la poussèrent: un corridor, éclairé par des torches suspendues aux murs, emmenait vers un escalier qui descendait dans les profondeurs du donjon:
- Sepa doit être par là: allons-y.
Le duo s'engouffra dans le couloir. Plus loin, ils descendirent la première marche de l'escalier. Désormais, ils marchaient en territoire inconnu: que trouveraient-ils dans cet enfer?
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Les Faces du Destin 1: Le Commencement (Réécrit)
FantasíaLorsqu'à Anastasia voit Eden s'écraser en plein milieu de son village, son sang ne fait qu'un tour: cet homme à des réponses aux questions qu'elle se pose sur sa mère, qui l'abandonnée à la naissance. A la recherche de ses origines, elle suivra le d...