3 - Deux cadavres

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     Les aconits avaient fanés depuis longtemps. Ralph marchait au milieu d'herbes mortes, craquant sous ses pieds. Le vampire se figea lorsqu'il arriva devant la maison qu'il avait habité de nombreuses années.

     Elle était en ruine. La porte ne tenait même plus sur ses gonds, le porche qu'ils avaient construits était entièrement détruit, les fenêtres étaient ou brisées ou inexistantes et une partie du toit était effondrée.

     Ralph eut un pincement au cœur qui ne battait plus depuis longtemps. Mais voir cette maison dans cet état l'attrista. Le vampire enjamba les marches instables et s'engouffra dans la maison.

     Elle était sinistre, triste, et sans vie. Il resta sans bouger plusieurs secondes avant de gravir les marches en même temps que les souvenirs revenaient à lui. De bons souvenirs, d'autant plus qu'il les chérissaient au fur et à mesure qu'il lui remontait en tête. Chaque pièce, chaque mur, chaque pas lui faisait se souvenir de Lewis et d'Alec.

     Il finit par arriver dans leur chambre. Hormis les draps recouverts de saletés, de terre et rongés par les mites, rien n'avait changé. Bien entendu, Ralph savait que des personnes mal intentionnées seraient passées durant son absence, le fait de voir les tiroir des lampes de chevet à terre et vide confirma son idée.

     Mais en se tournant devant l'armoire, il savait que personne n'aurait eu l'idée de trouver le faux fond de l'armoire. Il délogea la planche séparable et tomba avec une joie un peu triste sur l'armurerie d'Alec. Ses outils de chasseur de prime étaient recouvert de rouille, mais heureusement, les quelques trésors de son amant étaient restés intacts. Il attrapa la boite et l'ouvrit sans regret, pour tomber sur des photographies et des portraits d'eux trois.

     Un sourire traversa le visage du vampire. Il parvint à mettre la main sur un médaillon avec un lien en cuir. Il attrapa ensuite des photos portraits de ses deux amants, les plaça dans le médaillon, puis il le referma avant de le passer autour du cou.

     Ralph attrapa toutes les photos et les plaça dans une sacoche, puis il ressortit de la maison.

     Elle contenait trop de souvenirs pour lui, et n'en prendre qu'un échantillon était bien suffisant pour lui. En retournant au rez-de-chaussée, il songea un instant à la réserves d'argent de Lewis, qu'il cachait dans la cave. Il s'en empara, caressa un instant l'urne funéraire d'Alec et il ressortit de la maison. Il était en train d'étouffer.

     Une fois dehors, il constata que le jour se levait doucement. Insensible à la chaleur du soleil, il entreprit de marcher à travers la forêt, pour finalement tomber sur une petite route. En la longeant, il finit par tomber sur un croisement, où était planté un panneau en bois.

     L'une de ses directions indiquait « Londres ».

     Ralph dégluti, mais il suivit ce chemin.

———————

     Edward Chapman était en retard, et c'était son premier jour en temps qu'inspecteur de Scotland Yard. Il était d'abord arrivé de justesse au commissariat, mais lorsqu'on lui avait apprit que son mentor, le bientôt retraité Bryce Lynch, était déjà sur les lieux de la nouvelle affaire, même en prenant un taxi et en lui imposant de griller les limites de vitesse (tout en lui montrant sa plaque), il était arrivé dix minutes plus tard.

     Bryce Lynch l'attendait devant un cimetière balisé par des rubans, et il croisa les bras en tapotant du pied.

« Sérieusement, Eddie, c'est ton premier jour, râla-t-il.

— Je suis désolé, je croyais qu'on devait se rejoindre devant Scotland Yard !

— Oui, en effet, à neuf heures tapantes ! Il est neuf heures et quart !

     Edward fit une moue et baissa les yeux au sol. Bryce lui donna un coup sur l'épaule et l'incita à le suivre.

— Bon, on ne va pas rester plantés là durant des heures, on a deux cadavres qui nous attendent.

     Le jeune inspecteur se décida à le suivre et il marcha dans les pas de son mentor, le suivant pas à pas.

     Un premier corps se trouvait au milieu de l'allée. Son cou formait un angle anormal et une profonde entaille ornait son cou. Edward regarda son mentor avec une lueur dans les yeux, attendant son feu vert.

— Eh bien, qu'est-ce que tu attends ? Examine, petit, examine !

     Edward eut un petit sourire qu'il ravala bien rapidement. Il reprit rapidement son sérieux et il s'accroupit devant le cadavre. C'était probablement le cou tordu qui l'avait tué, et il n'avait pas de marque de violence autre part.

— Qui a découvert le cadavre ? demanda Edward.

— Le gardien du cimetière, quand il est arrivé ce matin. Qu'est-ce que tu peux en conclure de la rigidité cadavérique ?

— Que la mort remonte à quelques heures tout au plus.

— En effet. Et la cause de la mort ?

— Peut-être le cou tordu, ou alors de la blessure situé sur son cou.

— À ton avis, d'où provient la blessure sur le cou ?

     Edward déplaça délicatement la tête du cadavre, pour mieux observer sa blessure.

— Peut-être d'un objet tranchant, comme une lame.

— Bon raisonnement. On ne peut pas tirer plus d'information, on va aller voir le deuxième cadavre.

     Le jeune inspecteur hocha la tête et suivit Bryce. Ils entrèrent dans une des cryptes, et le visage d'Edward se ferma. Ce cadavre était bien plus abimé, et une large flaque de sang se trouvait autour de lui.

— Quoi que tu trouves, je t'interdis de prononcer le mot.

     Edward secoua sa tête en guise de réponse, puis reporta son attention sur le cadavre. Son cou avait été déchiqueté, et il était impossible de penser que la chose qui l'avait tué était humaine. En examinant mieux, il pu remarquer que la peau de son cou comportait... Des marques de dents. Son visage s'illumina.

— C'est un vamp...

— Eddie, ne dit pas ce mot...

— Mais pourquoi ?! Tu as une explication plus logique ?

— Pas pour l'instant, mais c'est parce qu'on manque d'information.

— Alors c'est peut-être ça, non ?

— Eddie, tous les vampires de Londres, et maintenant, dieu sait qu'il n'y en a plus beaucoup, on un alibi pour cette nuit.

— Alors c'est un nouveau vampire, un qui vient d'arriver en ville ? C'est possible, non ?

— Oui, c'est possible, mais il doit passer par le registre des admissions de la ville. Et à ma connaissance, personne n'est arrivé hier soir. Mais on ira vérifier, si tu veux. »

     Edward se renfrogna mais garda sa théorie en tête. Bryce lui tapota l'épaule et il lui fit signe de marcher à ses côté pour retourner au poste. 

Le Sacre du Vampire, T2 [MxM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant