Prologue

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Quatre ans plus tôt...

À une heure tardive, je suis escortée par les gardes de mon grand frère. J'essaie de suivre leur rythme malgré le sommeil qui me prend le dessus. Mes pieds traînent au sol et je remercie les gardes qui m'agrippent vu le nombre de fois où j'ai failli me casser la gueule. Un des gars me serre le bras fortement et vivement, je plante mes ongles dans sa paume de main accompagné d'un regard noir.

Même si le sommeil est toujours présent, j'arrive à réfléchir et je me pose la question pourquoi mon frère veut me voir à trois heures du matin. Pourquoi tout de suite et non demain ? Qu'est-ce qu'il a d'important à me dire ?

Après tant de jours, il décide enfin de m'adresser la parole. Après le décès de notre mère, il s'est éloigné de moi et lorsque j'avais vraiment besoin de son soutien, Santos n'était pas là.

Si j'avais la force de bouder contre lui, croyez-moi, je le ferai sans hésiter ! Mais aujourd'hui, je n'ai plus cette force. Non, je me sens épuisée mentalement.

Une fois arrivés devant la porte du bureau de mon frère, un des hommes ouvre celle-ci et m'incite à entrer en me faisant une pression au bas du dos.

Le bureau du chef de La Moretti. Ce bureau appartenait à ma défunte mère, mais désormais, il revient à mon grand frère.

La Moretti est une mafia espagnole dont la domination s'étend jusqu'au monde oriental comme dans le monde occidental. Mon frère, mon aîné, Santos Moretti, est à la tête de cette mafia. Ce qui nous distingue des autres mafias c'est que la nôtre se lègue de mère en fille, les femmes sont dominantes dans notre famille.

Normalement, je devrais succéder à ma mère mais je suis encore jeune et je n'ai pas encore acquis suffisamment de connaissances.

Et au fond de moi, je ne me sens pas réellement prête...

Avec mes jambes frêles, je titube dans l'obscurité de ce bureau et un souffle lourd similaire à une respiration d'un monstre résonne dans l'immense pièce . Je me laisse tomber sur un des fauteuils et tape entre mes mains. La lumière éclaire enfin le bureau et je retrouve Santos dans un piteux état. Une pile de bouteilles d'alcool jonche sur la table tandis qu'une odeur de whisky vient me titiller le nez.

Depuis quand Santos est dans cet état ? Il a bu toutes ces bouteilles en une journée ?

Une inquiétude naît en moi mais le regard que mon frère m'envoie me fige sur mon fauteuil.

Un regard sans vie, sans rien. Juste un regard de mort.

Chacun a sa façon de gérer le décès soudain de maman. Moi avec mon violon et mon aîné dans un cercle vicieux entre l'alcool et son inconscience.

On m'a toujours traité d'égoïste mais j'ai toujours tendu ma main à mon frère et il n'a jamais accepté mon aide. Il a besoin d'un soutien, il a besoin de moi mais il refuse.

On doit être ensemble pour supporter cette dure épreuve. Oui, ça fait mal, terriblement mal mais on ne doit pas rester dans son coin. Si maman était encore là, elle nous forcerait à se serrer les coudes.

— Tu voulais me voir ? je demande avec une voix incertaine.

Santos passe une main dans ses cheveux en bataille et ancre son regard bleu dans le mien.

— Tu es une épine pour moi. Notre tante Prudencia et sa fille me font un coup de pression pour te laisser ma place, souffle-t-il avec une voix lente et épuisée.

— Pourtant je t'ai donné ma place, c'était voulu. Tu veux que je leur parle ?

Il secoue sa tête de droite à gauche et reste silencieux avant de servir un autre verre d'alcool sous mon regard peiné. Tante Prudencia est une des petites sœurs de ma mère.

Deux Identités Pour ElleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant