Chapitre 35

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Les vacances d'été démarrent sous des trombes d'eau. Il pleut à verse depuis la nuit dernière. Une pluie froide sous un paysage triste d'immeubles ininterrompus et d'avenues détrempées.

Je n'ai d'autres choix que de me rendre au travail en transport en commun. Les passagers excédés sont serrés les uns contre les autres, un parapluie dégoulinant sur leurs chaussures dans une main, un téléphone vissé dans l'autre. Chacun est dans son monde. Personne n'ose se parler. Celui qui oserait le faire serait considéré comme un courageux illuminé. Seules quelque rares personnes âgées, absentes des transports à cette heure matinale, osent encore franchir le pas avec un naturel et une bienveillance oubliés. La technologie censée nous rapprocher, nous a éloigné et coupé les uns des autres. Et moi la première suis victime de ce nouveau mal du XXIème siècle.

En descendant du bus, des gouttes s'écrasent sur ma capuche que j'ai rabattue jusqu'au front. Ce matin, impossible de mettre la main sur un parapluie. Je l'ai probablement encore égaré. Je suis incapable de garder un parapluie plus d'une année. Par conséquent, j'ai cessé d'investir dans ce genre d'objets, pratique, mais source de déficit budgétaire pour une personne comme moi.

J'ai dix minutes d'avance lorsque je traverse le parking - où la majorité des places sont libres - avant d'entrer dans le large bâtiment surmonté d'un logo vieillot marqué « Watton Electrique ». Les portes vitrées coulissantes s'ouvrent et une bouffée d'appréhension monte depuis mon estomac. L'angoisse de la première journée de travail. Il va falloir s'habituer à mes futurs collègues, composer avec de nouvelles méthodes de travail et prendre mes repères dans un environnement étranger. Directement, sur ma droite, j'avise un comptoir surmonté d'un panneau stipulant "accueil" et derrière celui-ci, une femme d'âge mûr et une autre d'âge moyen en grande conversation. Celles-ci s'interrompent et tournent la tête dès qu'elles me remarquent.

- Ah, voilà la p'tite !

Je me présente en me fendant d'un grand sourire :

- Bonjour, je suis Alba Altereau. Je suis envoyée par l'agence Kingston pour le poste de réceptionniste.

La plus âgée, une blonde à lunette rondelette avec un carré long, me tend la main et se présente. Elle se nomme Christine et m'invite à la suivre avec une certaine affabilité. Sa collègue se tourne vers nous :

- Je te laisse Christine, on se voit tout à l'heure à la pause déjeuner.

- À plus tard Sabine !

La dénommée Sabine nous adresse un vague signe de la main et disparaît derrière un coin de mur en faisant cliqueter ses minuscules talons contre le carrelage. Christine me fait installer à son bureau et m'explique que je vais être formée à ses côtés pendant deux semaines avant qu'elle ne me laisse travailler en complète autonomie.

- Avec mon mari, nous avons cumulé nos jours de congé pour pouvoir nous offrir six semaines de vacances cet été. Deux semaines pour nous reposer à la maison puis quatre semaines en camping-car dans les pays d'Europe de l'Est. Nous allons visiter la Slovénie, la Hongrie, la Slovaquie et la Pologne. C'est pour ça qu'il fallait quelqu'un pour me remplacer cet été.

Chaleureuse et joviale, elle m'a tout l'air d'être une grande bavarde. Elle extirpe un classeur d'un tiroir et me le présente comme s'il s'agissait du Graal.

- Ce classeur est ton meilleur ami ici. Absolument, toutes les procédures et indications du travail à effectuer y sont indiquées, m'informe-t-elle en tapotant la couverture bleue de son index vernis. Si tu as le moindre doute, regarde dedans.

Christine passe la matinée à me montrer les différentes fonctions de son poste. Rien de très complexe. Les tâches consistent essentiellement à répondre au téléphone puis aiguillier les interlocuteurs vers le bon service, accueillir les rares clients qui se présentent, trier les courriers et les colis et classer certains documents administratifs tels que des factures ou des devis. Dès qu'un employé franchit les portes vitrées, Christine l'interpelle et effectue sommairement les présentations :

En effervescence [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant