Chapitre 16

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La semaine suivante se déroule sans incident notable.

Par peur d'être jugée, je n'ose raconter à Fleur et Elena la désastreuse soirée de samedi. Je mentionne simplement et en éludant, être sortie avec mes colocataires. En fait, je n'ai parlé à personne – pas même à Andréa - de l'épisode avec Nicolas et de sa disparition au moment où j'étais aux toilettes. J'ai tellement honte de mon comportement...

D'ailleurs, je le croise plusieurs fois dans les couloirs et à chaque rencontre fortuite, je baisse le menton et rabat mes cheveux devant le visage pour me cacher. A un moment, l'un de ses amis me pointe du doigt en riant et je détourne la tête aussitôt en marchant à grands pas sous les regards étonnés de Fleur et Elena. Si j'avais plus d'assurance, comme Andréa par exemple, je relèverais la tête et avancerais d'un pas sûr et conquérant. Je serais fière de montrer que je peux être écervelée et imprévisible, que je ne me prends pas au sérieux et que je me contrefiche du regard des autres. En vérité, c'est loin d'être le cas. Je suis discrète et je déteste être le centre de l'attention. Je préfère mille fois mieux être une petite souris cachée dans un trou plutôt qu'une bête de foire.

A la partie de cache-cache dans les couloirs de l'école, s'ajoute le stress des examens. C'est la dernière semaine avant que les partiels ne commencent et la tension est palpable. L'angoisse est là, qui monte doucement en même temps que les jours s'égrènent trop rapidement. Travailler toujours davantage me permet de camoufler cette angoisse tapie dans ma poitrine. Je peaufine les détails, ne laisse aucun chapitre de côté, examine d'anciens examens, fais et refais des exercices. Au fur et à mesure que j'ingurgite de nouvelles informations, j'ai le terrible sentiment de ne pas être assez bien préparée et d'oublier des connaissances qui devraient pourtant être acquises. J'ai cette drôle de sensation de ne jamais en faire assez.

Puisque mon cerveau chamboulé est relié directement à mon estomac, je perds l'appétit. Il me semble être affamée, mais dès que je tente de me nourrir, mes entrailles se nouent. N'ayant pas d'autre choix, je me force donc à grignoter en petite quantité, trois à quatre fois dans la journée.

Le week-end arrive à grand pas et je me retrouve angoissée, le dimanche soir, à la veille du premier examen. Il s'agit de l'épreuve de mathématiques qui commencera à dix heures le lendemain et durera deux heures et demie. Lorsque je visualise la matière en générale, je me sens assez prête. Les mathématiques ont été essentiellement des révisions et des approfondissements de ce que nous avons étudié au lycée.

Attirée par les matières littéraires, je n'ai jamais été très douée en maths. Cependant, le programme de l'année ne m'a pas paru particulièrement compliqué.

D'aussi loin que je me souvienne, les maths ont toujours représenté un calvaire pour moi. Une véritable torture. Un blocage. Des professeurs antipathiques, des mauvaises notes, des boules au ventre avant les cours et des pleurs le soir sur le cahier quand venait l'heure des devoirs. Tous ces chiffres, lettres, théorèmes et symboles se mélangeaient confusément dans mon esprit... et je me demandais pourquoi on avait ajouté des lettres et des symboles, à des chiffres qui étaient déjà bien assez compliqués comme ça. Je maudissais Thalès, Pythagore, Archimède et leurs langages codés qui avaient traversé le temps et traumatisé des générations d'élèves.

En école d'ingénieur, Louis m'avait guidé avec dextérité dans le monde impénétrable des mathématiques et m'avait aidé, avec patience, à me reconstruire des bases solides. A son contact, j'ai fini par comprendre un peu mieux cette langue universelle. Je ne suis pas douée, mais je comprends l'essentiel de ce que je fais. C'est comme apprendre une langue étrangère, particulièrement riche et complexe : je peux utiliser les bases avec plus ou moins de facilité, mais une fois sortie du champs de mes connaissances, je suis complètement perdue.

En effervescence [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant