Chapitre 44

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Je vis chaque jour des deux semaines qu'il nous reste avec une urgence et une intensité saisissantes. A mesure que la date fatidique approche, le temps semble s'accélérer et les moments que nous passons ensemble passe en une fraction de seconde. J'aimerais pouvoir attraper le temps qui s'écoule pour le retenir, mais tel de l'eau, il se faufile et s'échappe entre mes doigts.

Mathéo et moi sommes tous les soirs fourrés ensemble – n'en déplaise à mon colocataire claquemuré dans sa chambre – et passons des nuits bouillantes et enflammées blottis l'un contre l'autre. Je profite de chaque instant passé avec lui comme si c'était le dernier et grave dans ma mémoire ses propos, ses caresses et les traits de son visage pour pouvoir me les remémorer plus tard, lorsqu'il sera loin.

J'évite soigneusement de songer à son départ et aux mois qui vont suivre. Pour le moment, seul le présent existe. Tout ce qui vient après l'été est laissé dans un flou volontaire. Parfois, il arrive que mes pensées vagabondent et que mon imagination se perde, anticipant déjà les longues semaines d'automne. Alors un trou béant s'ouvre dans ma poitrine et mes entrailles se contractent me coupant net la respiration. Heureusement, le remède à cette sensation pénible qui s'empare de plus en plus fréquemment de moi reste les bras réconfortants de Mathéo.

Une fois, nous nous autorisons une longue discussion sur la Corée et fixons quelques règles ensemble. Dans la mesure du possible et selon l'emploi du temps de chacun, nous nous engageons à nous téléphoner une à deux fois par semaine. La tâche ne sera pas aisée car le décalage horaire est de sept heure. Cela signifie qu'en me levant le matin, Mathéo aura déjà entamé son après-midi. Les messages écrits pourront être envoyés à volonté et nous nous promettons également d'être transparent l'un envers l'autre. Pas besoin de connaître toutes les activités et sorties auxquelles nous participeront, mais simplement faire preuve d'honnêteté. Mathéo me demande également de le tenir au courant des agissements d'Adrian par rapport à moi. Il ne lui fait pas confiance et ne me cache pas qu'il n'apprécie guère de me « laisser avec lui ». J'accepte de bon cœur. Sa possessivité flatte légèrement mon ego.

Même si j'ai conscience que ces règles ne seront probablement respectées qu'au début, elles ont pour effet de me rassurer et d'augmenter ostensiblement ma confiance en Mathéo.

A l'inverse, au fil des jours, il semblerait que la confiance de Mathéo envers moi n'eût cessé de baisser. Je le ressens à travers la multitude de questions et de recommandations dont il m'abreuve. Ses doutes portent majoritairement sur mes fréquentations et évidemment sur Adrian dont il redoute le retour. Il essaie même de me faire promettre de ne pas me laisser retourner le cerveau par mon colocataire, qui - selon lui -, tentera de nous séparer par tous les moyens possibles : mensonges, ruses et séduction. Agacée par son excessivité, je finis par lui demander un peu sèchement de se détendre, ce par quoi il répond en s'excusant immédiatement.


Pour ne rien arranger, je reçois un message de Louis au début de la dernière semaine qui précède le départ de Mathéo. Passé le cérémonial habituel des civilités, je réceptionne un curieux de message de sa part :

« Je me suis inscrit sur une application de rencontre, mais ça ne marche pas vraiment. J'ai eu quelques rendez-vous et il y a deux filles avec qui ça a été plus loin. Tu fais des rencontres toi ? »

Sous-entendu de la dernière question : as-tu couché avec d'autres garçons que moi ? Bien que cela ne le concerne pas, je ne m'offusque pas de cette curiosité que me semble être légitime. Louis n'a pas encore fait le deuil de notre relation et cherche, d'une part à éveiller un semblant de jalousie chez moi, d'autre part à savoir s'il y a une chance que nous nous remettions ensemble un jour. Inutile de le blesser en lui avouant la vérité. Je choisis donc de laisser son message sans réponse.

En effervescence [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant