Chapitre 38

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En une fraction de seconde, je me suis retrouvée projetée hors de la goliath. Le plus bizarre, c'est qu'elle n'est pas vraiment devenue une boule de feu. Elle a plutôt « explosé » et des tas de morceaux de cette bestiole se sont éparpillés de partout. D'ailleurs, je crois bien que j'ai un truc coincé dans mes cheveux... peut-être un bout de patte ?

J'attrape délicatement ce machin rond et hyper visqueux de la grosseur d'une noix.

Beurk ! C'est un œil...

Je ne suis pas loin de vomir quand Hariel me tire brutalement en arrière, juste à temps pour m'éviter d'être de nouveau capturée par une autre goliath.

— Bien tenté, tout à l'heure, lâche Hariel, en balançant un puissant jet de lumière sur cette saleté.

Elle fond littéralement sous la force de l'énergie thermique communiquée par la magie du dernier des anges, il ne reste plus qu'un plasma informe.

Rien à voir avec mon hachis de goliath...

— Tenté ? dis-je en surveillant soigneusement mes arrières cette fois.

— Tu as appelé la lumière quand tu t'es sentie en danger de mort, mais au dernier moment... c'est finalement l'obscurité qui t'a sauvée. Mais c'était bien essayé, admet-il.

Je n'ai pas vraiment le temps de répondre, les goliaths se sont reformées en bataillon, prêtes à en découdre. J'en attaque simultanément une dizaine...

Autant voir grand, vu leur nombre ! À croire que les andouilles des tours ne contrôlaient plus la prolifération de ces horreurs sous l'immense sphère du jugement. Gavées d'oxygène et de malheureux condamnés, les goliaths n'ont pas oubliées de se reproduire.

C'est une véritable catastrophe... elles sont sans doute plusieurs centaines.

Ni Hariel ni moi ne prenons le temps de souffler, mais les araignées gagnent imperceptiblement du terrain. Nous ne pouvons pas envisager d'utiliser le chant de façon moins ciblée... Ahn, Liam, et tous les habitants des tours abandonnés par le gouverneur n'y survivraient pas.

Nous risquerions un carnage.

Désormais, nous détruisons de véritables grappes velues à coups de lumière et d'obscurité. Hariel donne quelques signes de faiblesse, quand je suis toujours avide d'aspirer la vie de ces bestioles.

Plus j'en dévore et plus j'en veux...

J'ai la sensation qu'un truc inconnu se glisse peu à peu en moi, s'insinue dans chacune de mes cellules, et ce n'est pas vraiment désagréable.

C'est même excitant... enivrant !

Tout en se battant, Hariel me surveille du coin de l'œil.

— Retire-toi du combat ! intime-t-il soudain. L'obscurité est en train de t'envahir... tu pourrais tuer tout le monde !

C'est comme s'il me ramenait à la raison...

Malgré une gigantesque envie de continuer à me goinfrer, je recule prudemment. Hariel se débrouille comme un chef, mais sans mon aide il risque d'être submergé.

Peut-être devrions-nous envisager d'évacuer Ahn et Liam ?

Peut-être faut-il utiliser conjointement la lumière et l'obscurité pour raser la totalité des tours, se débarrasser des goliaths quitte à sacrifier ceux d'en haut qui n'ont pas été éligibles au départ vers les colonies.

Alors nous ne vaudrions pas mieux que le gouverneur et ses sbires...

Est-ce que supprimer les uns fait partie des règles immuables de la survie pour les autres?

Hariel est presque noyé dans une forêt de monstres, je m'apprête à le secourir quand une pluie de balles explosives s'abat sur les araignées. Les projectiles creusent des trous énormes dans leurs proies, font éclater les exosquelettes sous un tonnerre de couinements désespérés.

Armés jusqu'aux dents, les prédicateurs ont investi les tours, décidés à en éjecter les parasites. Et c'est bien le problème...

La panique s'est installée dans les rangs adverses, les goliaths émettent des stridulations aiguës. Merde... on dirait que les « chefs » ont ordonné la retraite.

Une nuée de goliaths se sont précipitées vers les sorties les plus proches, celles qui mènent à l'extérieur des tours. Au passage, elles ont écrabouillé plusieurs prédicateurs. Par bonheur, Ahn et Liam sont indemnes... et armés...

Les deux me lancent un air de défi en rechargeant leurs fusils respectifs.

— Bon sang de bonsoir ! Liam m'a montré comment me servir de ce truc en un clin d'œil, jubile mon amie. Aussitôt que les prédicateurs nous ont équipés, aussitôt on a été efficaces !

Mince ! Je vais finir par ne plus la reconnaître...

Je porte un regard inquiet vers les sorties des tours, sur l'ordre d'Hariel les portes roulantes ont été abaissées. Mais des groupes de goliaths ont réussi à filer et les habitants d'en bas n'ont aucune idée du terrible danger qui les guette.

Je dois impérativement mettre Elvis et mon père en sécurité...

***

L'Élue (Evangeline)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant