Chapitre 3.1

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Mon métier consiste à réaliser des soins spécifiques, des gestes techniques, ainsi que la prise en charge de la douleur dans différents domaines dont celui de la médecine d'urgence. Je dois dire que cette partie, l'analyse et l'évaluation rapide des lieux d'accidents, me donne toute l'adrénaline dont j'ai besoin pour me sentir vivante. Dire tout bonnement que nous aimons sauver des vies est prétentieux, pourtant c'est le cas. Heureusement, nous en sauvons plus que nous en perdons. Si ce n'était pas le cas, ma capacité à vouloir continuer à exercer cette profession serait nulle et non avenue, comme pour beaucoup d'entre nous. Surtout chez les enfants qui sont censés avoir toute la vie devant eux pour grandir et profiter pleinement et entièrement de l'avenir qui s'offre à eux. On me demande souvent comment je fais quand je suis face au décès d'une personne. Pendant les OPEX auxquelles j'ai participé, j'ai été confrontée à la mort, mais à la vie aussi. Il faut se réjouir de chaque bataille gagnée contre la faucheuse. Je ne vais pas dire que je suis immunisée, non loin de là. Je pense que je me protège à ma manière. Seule mon âme peut se plaindre des mauvais traitements que je lui fais subir, car j'intériorise tout. Parfois ça pète, j'explose et il faut que ça sorte. Je vais alors au stand de tir, ou je fais du sport jusqu'à épuisement. J'ai du mal à communiquer, à partager avec quelqu'un, car il ne faut pas se plaindre. De part mon éducation car à la maison je n'étais pas seule, mais aussi dans mon boulot ou tout le monde est logé à la même enseigne.

J'ai grandi avec l'absence et les départs imprévus de papa, les déménagements ou encore les tensions que je pouvais percevoir au sein de la famille. Attention ne vous méprenez pas, j'ai été élevée dans une famille aimante où l'autonomie était de rigueur et où les plus grands devaient s'occuper des plus petits. Mais avec des frères et sœurs qui ont respectivement, dix-sept, quinze, neuf et cinq ans de plus que moi, pas facile de se faire une place. Je suis celle qui ne devait pas arriver, l'accident. Maman, trente-sept ans, à la surprise générale était enceinte de son cinquième enfant, moi ! Je ne suis proche que de mon plus jeune frère, mes sœurs étant trop occupées à sortir tard le soir avec leurs amoureux. Elles croyaient aux contes de fées, aux princes charmants. Mais je vous le demande, quelle putain de fée peut décider de qui as le droit de connaitre ou non le bonheur ? Non mais franchement... ces fées ont dû subir un sort pour faire chier à ce point-là les filles comme moi à qui il n'arrive rien d'exaltant. Pourquoi faudrait-il attendre de se faire réveiller d'un baiser, sans mon putain de consentement, par un mec. Il passerait par là et deviendrait mon chevalier servant aux boucles blondes parfaitement retombantes « en mode l'Oréal, parce que je le vaut bien » même sous un casque, ad vitam aeternam !

Je m'égare là, mais je pense à mes deux sœurs qui sont mariées à leurs amours de jeunesse, leurs premiers ! Ce sont mes parents, à moitié vieux jeu, qui ont dû être contents. Combien de fois j'ai pu entendre, « Marie-Jeanne, ne peux-tu pas prendre exemple sur tes sœurs, regarde le bel avenir qu'elles se sont tracées ». Désolée maman que mon métier ne soit pas aussi important que le leur ou le tien. Jean-Bapt, quant à lui me prenait pour une petite chose fragile, il a détesté mon choix d'armée, surtout que j'ai préféré défier le commandant en n'intégrant pas la marine. Il était hors de question que je puisse avoir deux pères sur le dos. Avoir mon frère comme lieutenant en démarrant au bas de l'échelle, non merci. Je voulais prouver à tout le monde et à moi-même que je pouvais moi aussi avoir mes propres choix, ma propre ligne de conduite, ma propre vie. Ça ressemble copieusement au vilain petit canard c'est vrai. Je me suis d'ailleurs beaucoup sentie comme cela pendant longtemps. Et puis un jour, mes notes et mes aptitudes physiques ont montré que justement je n'avais rien à prouver. J'avais ça dans le sang, il fallait juste que je m'affirme. Je devais vraiment relever la tête, être forte savoir répondre mais aussi savoir me taire à bon escient. De toutes manières il était hors de question que je puisse avoir des traitements de faveur, de par mon nom, mais aussi du fait que je sois une femme. Une femme dans l'armée n'est en aucun cas une balle qu'on se tire dans le pied. Il faut me croire, j'ai entendu bien pire ! Je préférais de toute façon avoir les pieds sur terre et non enfermée sur un navire de guerre. Au grand dam de mon père, j'ai le mal de mer. Ce n'est pas faute d'avoir habité au bord de la mer pendant ma jeunesse. Le commandant m'a bien entendu fait essayer la voile, mais je n'avais pas le pied marin.

Salut Les Wattpadiennes Anonymes,

Un chapitre qui vous donne un aperçu de la famille de M.J.
Ah la famille pas toujours facile.
A vendredi.

Bises

Vinie

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